Ils racontent la manif de Nantes de l’intérieur

Félix*, 21 ans, journaliste

Qu’est-ce qui t’a poussé à participer à la manifestation ?

Comme tous les manifestants qui étaient réunis à Nantes, je suis contre ce nouvel aéroport de Nantes. Tous les arguments sont connus (coût exorbitant, inutilité du projet, sacrifice de nouvelles terres agricoles…).

Je ne défilais pas seulement contre cet aéroport, mais contre toute l’idéologie qui le sous-tend. On n’a pas forcément l’occasion de défiler tous les quatre matins pour défendre sa vision de la société, alors quand l’occasion se présente j’essaye de ne pas la rater.

Vu qu’un mouvement s’est aggloméré autour du rejet de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, je trouvais normal d’aller défiler à Nantes.

En plus, je rejoignais pas mal d’ami(e)s et quelques personnes de ma famille. Donc niveau ambiance j’y allais vraiment sereinement.

J’avais déjà participé au grand rassemblement de novembre 2012, où tout s’était bien passé. Il n’y avait aucune raison que ça tourne mal. Je ne pouvais même pas imaginer qu’il y ait le moindre problème. D’ailleurs je suis arrivé la veille en covoiturage à Nantes, et j’ai été surpris par le nombre de CRS qu’il y avait déjà dans les rues.

Le jour même, je suis arrivé vers 12 h 15 au niveau de la préfecture, où le départ de la manifestation était prévu. Et c’était très détendu comme ambiance.

Quelques camions décorés étaient sur place, des gens se glissaient des branches d’arbres dans les cheveux, il y avait des déguisements d’animaux un peu partout, la sono crachait le son habituel des manifestations.

Menu- Manifestation Nantes NDDL 22 février 2014 - Pierre-Alain Dorange - La Déviation

Quelques personnes faisaient les marioles avec les quelques dizaines de CRS massés devant la préfecture : “Eh les CRS, si vous êtes pour l’aéroport, levez la main !”

Évidemment ça a fait rire tout le monde.

Vers 13 h, la place de la préfecture était loin d’être remplie. Tous les bus étaient en retard et les gens venus en voiture se garaient super loin pour avoir de la place. Et puis d’un coup il y a eu des manifestants à débarquer de tous les coins de la ville.

J’ai essayé de rejoindre mon oncle qui m’a prévenu qu’il était sur place :
– Salut, je suis enfin arrivé, je suis à côté des girafes.
– Moi à côté du triton géant. Tu le vois ?
– D’accord juste à côté y’a le flamant rose. Je suis à ses pieds maintenant.

Les rumeurs parlaient d’un cortège de plus de 3 km pour un parcours de 1,4 km.

Sans s’en apercevoir, le cortège s’était mis en route, mais la place se remplissait à mesure que le défilé avançait. C’est là qu’on s’est rendu compte de l’ampleur de la manifestation. Les rumeurs parlaient d’un cortège de plus de 3 km pour un parcours de 1,4 km.

Il y avait des déguisements partout. On voyait bien quelques tags mais rien de très gros.

Après je suis passé devant le local de Vinci. Évidemment, les vitres étaient cassées. J’ai trouvé ça bête de la part de Vinci d’avoir laissé visible ses logos et insignes.

On est passé devant les premiers CRS qui bloquaient l’entrée de l’hyper-centre. Certains étaient recouverts de farine.

Vers 15 h, j’avais toujours pas retrouvé une partie de mes potes. Du coup j’ai coupé à partir du château des Ducs de Bretagne direction le Gaumont.

Je suis passé devant un nouvel attroupement de CRS. Là y’avait des clowns désobéissants qui imitaient les forces de l’ordre avec des grands gestes et des sifflets. Effet réussi, ça m’a bien fait rire de voir le contraste entre ces robocops surarmés bloquant l’accès à une manifestation de tritons colorés.

Et puis 50 m plus loin nouvel attroupement de CRS. Là, les manifestants tambourinaient contre les barricades. C’était vers 15 h 30.

C’est là que les affrontements ont débuté quelques dizaines de minutes plus tard.

Après, je suis resté pas loin du Gaumont. J’ai rencontré plein de connaissances. Et là, on a entendu les premières explosions. Des tirs de lacrymos et de canons à eau. On a mis du temps à réaliser. On y prêtait pas attention ça paraissait surréaliste et très insignifiant par rapport à l’attroupement impressionnant sur la place du Commerce.

Beaucoup de gens s’approchaient raisonnablement pour voir ce qui se passait.

Et puis là les lacrymos ont commençé à être lancées de plus en plus loin.

Rue Jean Jacques Rousseau police contre Nantais - Manifestation 22 février 2014 Nantes NDDL - Crédits Sébastien Hermann - La Déviation

J’en ai eu un peu dans les yeux et je me suis écarté.

Je suis allé voir des gens sur le petit parc un peu plus loin sur la place. Des chorales improvisées organisaient des chants avec des pupitres en hauteur. Les gens tapaient dans leurs mains tandis que les explosions arrivaient à contre-temps.

On a appris qu’un petit chalet avait été brûlé.

La fumée de lacrymo continuaient d’avancer doucement mais sûrement. Pendant ce temps je buvais un jus de pomme délicieux vendu en prix libre à un petit stand improvisé.

À ce moment-là j’avais finalement décidé de rester le soir à Nantes. Apparemment il y avait des concerts de prévu le soir. Ça s’annonçait sympa

Ceux qui étaient venus en bus sont partis vers les 17 h.

On voyait des mecs revenir avec des faces ensanglantées.

La place a commencé à se désencombrer. Et on a senti une poussée plus rapide des forces de l’ordre. Je suis allé prendre une bière au bar La Trinquette sur la place du Commerce.

Et puis là on a tous été pris de court. Les lacrymos commençaient à s’approcher vraiment vite. On voyait des mecs revenir avec des faces ensanglantées. Un gars a jeté un flashball à mes pieds.

Il y a eu des mouvements de foule. Les lacrymos ont envahi la place du Commerce.

Même pas le temps de finir mon verre, on a reçu des lacrymos à un mètre de nous. On hallucinait. On était encore loin ! Il y avait des gosses à côté de nous. Tout le monde faisait la fête à ce moment-là !

On a couru pour éviter les gaz. Tout le monde était paumé. On savait pas trop par où aller. On est remonté sur la place Graslin. Il y avait des camions de CRS qui stationnaient. On entendait des explosions dans nos pas. Il y avait des mouvements de foule dans tous les sens. Des Nantais étaient rattrapés par la manifestation.

Félix-Manifestation-Nantes-NDDL-22-février-2014-Crédits-Sébastien-Hermann-La-Déviation

Là j’ai flippé un peu. Deux minutes plus tard, alors qu’on cherchait par où partir, on a vu cinq CRS nous charger en courant ! C’est super impressionnant ! On a tracé le plus vite possible. Ils se sont arrêtés sur la place et nous on ne décrochait plus de nos téléphones pour retrouver nos proches.

On s’est écarté un peu, et petit à petit on a retrouvé une ville plus sereine. Mais on n’en revenait vraiment pas !

Après la manifestations je suis rentré chez mon pote j’ai rencontré un mec avec la cheville en sang. Il rentrait chez sa sœur et s’est pris un tir de flashball. Le lendemain il a été aux urgences. Et si ce mec-là est un casseur alors nous sommes tous des terroristes, parce-que c’est un pacifiste comme on en trouve pas souvent. Pourtant il boîte encore aujourd’hui.

Quelle est ton opinion sur le dispositif policier ?

Pas très impressionnant au niveau de la préfecture. Mais c’était très étrange de voir l’hyper-centre bloqué à la manifestation par des barrages de CRS.

Rue-Kervégan-Manifestation-22-février-2014-Nantes-NDDL-Crédits-Sébastien-Hermann-La-Déviation

Quelle est ton opinion sur les affrontements ?

Profondément désespérante. Entre 50.000 et 60.000 personnes se sont retrouvées à Nantes pour dire non à un projet d’aéroport et dire ensemble leur envie de porter un autre modèle de société et puis tout ça est éclipsé par des violences entre quelques manifestants et CRS.

C’est surtout la proportion que ça a pris qui m’a surpris. Il y avait pas plus de 200 mecs à provoquer les militaires et on se retrouve avec de la casse dans les rues de Nantes.

Je crois que les moyens de la gendarmerie et des manifestants violents sont très loin d’être comparables.

Soit les CRS sont vraiment incompétents soit ils espéraient précisément que la manifestation prenne cette direction.

Quand j’ai entendu a posteriori des déclarations estimant que ces fameux blacks blocs sont très organisés, et cetera, et cetera… Il faut pas exagérer. Il y avait des mecs des renseignements généraux sur tous les appartements qui surplombaient la place. L’hélicoptère de la gendarmerie est resté en survol au-dessus des heurts tout au long de la journée.

La préfecture avait tous les éléments pour gérer au mieux cette manifestation. Je crois que les moyens de la gendarmerie et des manifestants violents sont très loin d’être comparables.

Bref, gros regrets que ces violences aient éclipsé le reste. Déçu du comportement de ces provocateurs, de toute cette casse, mais scandalisé par la puissance de feu déployée par les CRS.

Et puis, ces violences, je crois que le gouvernement les espéraient en quelque sorte. Ça permet de décrédibiliser le mouvement et de retourner les habitants contre les anti-aéroports.

NB : Côté manifestants on n’est pas resté les bras ballants non plus, certaines personnes s’interposaient et empêchaient qu’il y ait de la casse.

* Le nom a été modifié. Les liens hypertextes et exergues ont été ajoutés par l’éditeur. Les photos sont de Sébastien Hermann (Flickr, CC) et Pierre-Alain Dorange (Flickr, CC).

Maxence - Bandeau Nantes NDDL - La DéviationRaphaël - Bandeau Nantes NDDL - La DéviationSéverine - Bandeau Nantes NDDL - La DéviationClément - Bandeau Nantes NDDL - La DéviationMenu - Bandeau Nantes NDDL - La Déviation

14 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Dani dit :

    Rue Kervégan, sous les pavés, du sable.

  2. Ma réflexion étant en cours, je poste mes observations dans les commentaires. Comme en plus je n’étais pas sur le terrain samedi, je pense que c’est leur place.

    Après avoir publié ces témoignages, dont je répète assurer la crédibilité, visionné un bon paquet de longues vidéos, lu d’autres témoignages de manifestants et de journalistes, certains points me paraissent clairs :

    1. La police a recouru de façon disproportionnée à la force en passant à l’offensive avec des armes potentiellement létales alors que la situation n’était pas insurrectionnelle (près du CHU notamment).

    2. Il n’y avait pas de “black bloc”, du moins pas dans les proportions des 3 et 4 avril 2009 à Strasbourg lors du sommet de l’Otan. Ceux qui ont affronté les forces de l’ordre ne constituaient pas un mouvement organisé et si certains avaient prémédité des casses, d’autres paraissent avoir surtout agi en réaction au déploiement policier inédit de mémoire de syndicaliste. Contrairement à ce que dit la préfecture de Loire-Atlantique et le ministère de l’Intérieur, il n’y avait pas 1.000 casseurs.

    3. Les dégradations sont politiques car ciblées : agences de voyage, bâtiments publics ou semi-publics (pour les transports en commun), représentation de Vinci en ville. Les commerces n’ayant pas de lien, même symbolique, avec le projet d’aéroport, sont laissés intacts.

    4. Des milliers de manifestants, majoritairement pacifistes, ont refusé les incitations à la dispersion de la police (c’est d’autant plus clair dans cet extrait : http://youtu.be/Ve7A8AWFIt0?t=14m16s). Les dégradations et incendies sur l’agence Vinci et sur une pelle de chantier se sont déroulés en début de cortège, sans trop choquer la foule qui passait à proximité. La dégradation du matériel de la société de transport publique a néanmoins été condamnée au moment où elle se produisait.

    5. 1.500 policiers et gendarmes, dont le GIPN selon Mediapart, étaient déployés. De quoi contrôler une manifestation de 100.000 personnes. Or, les manifestants étaient au plus 50.000 et la police n’a pas “maintenu l’ordre”. Le Figaro parle de 1.300 policiers qui ont tiré 1.760 grenades lacrymogènes, soit 10.560 palets : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/02/27/01016-20140227ARTFIG00370-casseurs-de-nantes-l-etau-se-resserre.php

    D’où de nouvelles questions :

    Est-ce que le recours à la violence de la part des manifestants devient légitime pour une part grandissante des personnes opposées au projet ? Cela expliquerait la volonté de rester face aux policiers qui avançaient samedi.

    Quelles étaient les consignes de la police et à quoi s’attendait le préfet en barricadant de façon spectaculaire l’entrée du cours des 50 Otages ?

    Et de nouvelles observations :

    Le traitement médiatique de l’événement s’est fait massivement en faveur du ministère de l’Intérieur. La parole de Manuel Valls, accessoirement favorable au projet d’aéroport, n’a pas été mise en doute. Les appels à témoins de la police ont été relayés dans la presse.

    Le débat autour de la présence des écologistes au gouvernement me paraît bien accessoire étant donné que par nature, les organisateurs de la manifestation ne peuvent contrôler des personnes autonomes. Il n’y a pas de lien organique avec EELV, alors comment les exclure ? Ecoutez à ce sujet l’analyse de la sociologique Virginie Grandhomme : http://www.youtube.com/watch?v=Y07IRf3N_98

    Il me paraît plus intéressant aujourd’hui de se demander si le pacifisme n’en prendrait pas un sérieux coup dans l’aile, dans un pays en déficit démocratique et où 61 % des jeunes se disent prêt à participer à une “révolte de grande ampleur”, selon l’étude Génération quoi (210.000 sondés sur internet, parmi les personnes de 181 à 34 ans – http://abonnes.lemonde.fr/emploi/article/2014/02/25/frustree-la-jeunesse-francaise-reve-d-en-decoudre_4372879_1698637.html)

    Du reste, une intervention pour déloger les occupants de la Zad paraît extrêmement risquée à tout point de vue.

    1. Hasta La Revolucion dit :

      Discuter de la violence en général comme si c’était un fait décontextualisé ça me parait particulièrement risqué que ce soit pour la légitimer ou pour la condamner. La violence a des raisons, c’est un moyen comme un autre.
      Je doute qu’on puisse comprendre la violence avec une approche revendicative. La violence n’est pas là pour faire pression sur le gouvernement car cela signifierait s’en remettre au gouvernement – ou une autre institution peu importe – pour prendre des décisions alors que nous voulons la mort de l’état – et pas un “état plus démocratique”.
      La casse c’est comme une vengeance de notre impuissance dans notre quotidien face aux forces qui le régissent. On profite de l’anonymat de la foule, de la difficulté pour les mécanismes de coercition de la contrôler afin de transgresser la loi, comme pour provoquer. Parce qu’on ne croit rien de possible dans le cadre légal.
      Il y a une désillusion pas toujours théorisée mais d’après moi parfaitement justifiée. Désillusion vis-à-vis des syndicats et de leur service d’ordre, vis-à-vis des partis et de leur parlementarisme, vis-à-vis de l’état, de ses flics et de ses énarques… En tout cas c’est comme ça que je comprends ma violence. Ce n’est pas un avertissement, c’est un spasme d’indépendance. On ne répond pas à des erreurs, on s’en sert comme justification pour se révolter contre toute l’oppression qui pèse sur nos épaules chaque jour.

  3. QN dit :

    Merci pour ces témoignanges ! Etant plus du coté des “violents” que des “pacifistes”, je trouve qu’il manque tout de même la question du refus de l’autorité “en général” et le refus de l’autorité “sociale” (c’est à dire l’image “spectaculaire”) pour les manifestants.

    C’est dommage car ça permet aussi de mieux comprendre la violence, le fait que certains manifestants aient une conscience différente des évenements et pensent que c’est une minorité qui doit lutter contre une majorité, et qui refusent l’idéalisme, donc qu’ils se fichent un peu de l’image qu’ils peuvent donner.

    1. Je crois que les deux derniers manifestants qui témoignent ont un regard très critique envers l’autorité sociale, qui veut que les manifestations soient, en France, depuis les années 1980, pacifiques.

      Suite à la manifestation nantaise, la notion de pacifisme est discutée sur ce blog, http://fabrice-nicolino.com/index.php/?p=1700 et sur de nombreuses pages Facebbok, ce qui semble montrer que parmi les militants écologistes, les actions radicales et illégales ne sont pas exclues.

      Un des slogans scandé, taggé et mis en pratique samedi n’était-il pas “Vinci, dégage, résistance et sabotage” ?

      Certaines prises de parole à la tribune allaient dans ce sens et étaient applaudies.

      Selon cet article du Monde, il y a ceux qui veulent “condamener”, ceux qui veulent “déplorer” (http://abonnes.lemonde.fr/planete/article/2014/02/28/notre-dame-des-landes-les-opposants-veulent-un-front-uni_4374972_3244.html#xtor=AL-32280515), je rajouterai ceux qui veulent “justifier”. Le débat est houleux, mais dans la boue de NDDL toutes les composantes du mouvement restent unies (agriculteurs, zadistes souvent anarchistes, population locale).

      Cette question n’est pas propre au mouvement écologique. Le mouvement des Bonnets rouges a donné lieu à des dégradations de biens et des affrontements avec les représentants de l’Etat, les séquestrations de patrons sont courantes, etc. Greenpeace mène des actions coups de poing.

      La question se pose d’ailleurs à chaque mouvement de grande ampleur où la jeunesse est présente, CPE, LRU, retraites… Même si les organisations, les syndicats et les partis, n’ont jamais revendiqué d’actions violentes, ce qui les éloignerait des institutions !

      Je crois vraiment que plutôt que se demander si EELV a sa place au gouvernement, alors que ce parti ne structure pas la lutte de NDDL (enjeu politicien), la manifestation de Nantes met un enjeu plus important sur la table :

      Jusqu’à quand les manifestants resteront majoritairement pacifistes ? Est-ce qu’une guérilla rurale serait populaire ?

      1. Camille dit :

        Allons plus loin. Les manifestants anti-NDDL ne refusent plus la violence car ils savent que sans la défense au corps à corps de la Zad lors de l’intervention César, il n’y aurait déjà plus de lutte.

        “Nous sommes nombreux à l’avoir constaté : si, le 22, il a bien dû y avoir quelques propos hostiles aux « casseurs », nous n’avons pas eu l’occasion d’en entendre, ni chez les manifestants de base, ni chez les paysans sur leurs tracteurs qui attendaient tranquillement en regardant l’action, ni chez les dizaines, peut-être les centaines, de personnes qui ont pris les dégâts en photo, ni chez les milliers qui suivaient en retrait les affrontements. S’affirmait là une forme de complicité implicite, peut-être même pour nombre d’entre nous une forme de lutte par procuration. Cette attitude s’explique par la compréhension de ce que tant de commentateurs refusent de voir, et que Nicolino a bien exprimé : l’affrontement avec la police et le refus de se laisser intimider par l’appareil guerrier de l’État ont été essentiels dans le succès de la lutte jusqu’à présent. Aurait-on tant parlé de la manif de Nantes si elle s’était cantonnée à parcourir le trajet imposé en scandant des slogans et en souriant aux caméras ? Dans ce mouvement comme dans tant d’autres auparavant, les épisodes de bagarre concourent à exercer une pression sur le gouvernement. Quel que soit le peu de sympathie que beaucoup de Nantais éprouvent pour les « casseurs », le fait que l’obstination de l’ancien maire à construire son aéroport entraîne tant de désordres ne joue pas en sa faveur. La solidarité avec les interpellés et les condamnés est donc essentielle.”

        http://www.article11.info/?Retour-a-Nantes-Reflexions-autour#forum38203

    2. Il faut aussi verser à la réflexion ce texte de Nicolas Lebourg, historien et spécialiste de l’extrême droite, qui revient sur l’histoire de l’usage de la violence par les groupes politiques.

      Il ne s’agit pas de mettre les extrêmes sur un pied d’égalité, mais de montrer que la violence des extrêmes correspond à un contexte.

      “La violence des extrémistes ne serait alors que la version brutale, saisissante, de cette sinistrose induite par une société réduite au consumérisme, sans récit historique ni projet politique, où l’Etat n’influe pas sur l’économique. Comme l’électeur, mais autrement. Les radicaux ne réclament-ils pas un retour du politique et un sens commun? Cela met nettement moins à l’aise que de ressasser les thèmes du «deux poids, deux mesures» et de la «violence des extrêmes».”

      http://www.slate.fr/story/83941/ultra-gauche-extreme-droite-radicale

  4. Mathilde dit :

    Si le gouvernement fait confiance aux mêmes agents de renseignements que ceux qui avaient travaillé sur Julien Coupat, ça nous situe le niveau de crédibilité de leur histoire de black blocs allemands.

  5. qui de plomb dit :

    Valls qui pointe des casseurs zadistes, Auxiette et la droite qui demandent l’évacuation de la Zad, la boucle est bouclée.

  6. qui de plomb dit :

    Une émeute dégénère à Nantes

    La journée avait pourtant commencé dans une ambiance bon enfant : au moins deux engins de chantier incendiés; une agence Vinci saccagée; des policiers harcelés. Les émeutiers s’en prennant également à la mairie, un poste de police et plusieurs magasins du centre-ville.

    Or dans la journée, plusieurs centaines de personnes ont convergé vers la ville dans la claire intention de manifester pacifiquement. « Ces agissements sont inacceptables » s’est empressé de dénoncer un porte parole des insurgés et membre du collectif People VS Nantes, « la présence de la gauche organisée en cortège au sein de nos émeutes est inadmissible. Il ne fait aucun doute qu’ils sont venus de toute la France et de l’étranger uniquement dans le but de scander des slogans, brandir des banderoles et ne pas s’en prendre au mobilier urbain. Nous ne les laisserons pas gâcher notre fête. »

    La suite : http://juralib.noblogs.org/

    Tout est question de point de vue ;)

  7. Fox Trot dit :

    Adieu les jeunes moyens, les pires de tous
    Ces baltringues supportent pas la moindre petite secousse
    Adieu les fils de bourges
    Qui possèdent tout mais n’savent pas quoi en faire
    Donne leur l’Éden, ils t’en font un Enfer
    Adieu tous ces profs dépressifs
    T’as raté ta propre vie, comment tu comptes élever mes fils ?
    Adieu les grévistes et leur CGT
    Qui passent moins d’temps à chercher des solutions qu’des slogans pétés
    Qui fouettent la défaite du survêt’ au visage
    Transforment n’importe quelle manif’ en fête au village
    Adieu les journalistes qui font dire c’qu’ils veulent aux images
    Vendraient leur propre mère pour écouler quelques tirages
    Adieu la ménagère devant son écran
    Prête à gober la merde qu’on lui jette entre les dents
    Qui pose pas d’questions tant qu’elle consomme
    Qui s’étonne même plus d’se faire cogner par son homme
    Adieu ces associations bien-pensantes
    Ces dictateurs de la bonne conscience
    Bien contents qu’on leur fasse du tort
    C’est à celui qui condamnera l’plus fort

  8. Le site d’info écolo Reporterre propose un compte rendu minuté de la manifestation, qui permet d’avoir une vue d’ensemble sur celle-ci.

    C’est une synthèse de divers témoignages, de personnes se trouvant à différents endroits simultanément.

    http://www.reporterre.net/spip.php?article5482

    On y retrouve les observations faites par nos cinq sources.

    En résumé, le cortège s’est scindé en deux. Alors que la tête, partie de la préfecture, comprenant les organisateurs et les politiques, s’est dirigée vers l’île de Nantes (parcours pensé quelques heures auparavant, lire “Maxence”), le corps du cortège, allant moins vite, a stagné au niveau du CHU.

    Ne sachant pas par où aller, une partie des manifestants s’est retrouvée face aux grilles anti-émeutes dressées devant le cours des 50 Otages (lire “Séverine”). Ce cours est un passage traditionnel des manifestations. En colère, des manifestants ont tambouriné sur la grille. Des objets ont été lancés sur les CRS se trouvant derrière. Ceux-ci ont répondu par des jets de lacrymo et l’usage des canons à eau (très rarement déployés à Nantes, mais ça c’était avant).

    Au même moment, des groupes mobiles de quelques dizaines de personnes au plus, sont arrivés devant les barrières de police. Ce sont eux, qualifiés de “black blocs” qui ont poursuivi le harcèlement en utilisant des armes plus dangereuses que des œufs de peinture (pavés, chariots en feu, feux d’artifice, fumigènes).

    Ces groupes avaient déjà saccagés une agence Vinci (rue de Strasbourg), mis le feu à une foreuse (Boufay), lancés des câbles lestés sur les voix de chemin de fer et attaqué le commissariat se trouvant près du CHU.

    Les affrontements se sont propagés dans diverses rues et squares, jusqu’à s’arrêter lorsque la police a repoussé les derniers manifestants sur le parking de la Petite Hollande, face à la Médiathèque, vers 18 h (lire Clément et Séverine).

    Pendant ce temps, les commerces continuaient à tourner en centre-ville. Pendant longtemps, des manifestants ont dansé à quelques centaines de mètres des affrontements, dans une atmosphère toxique (lire Maxence).

    L’auteur de l’article note sur les affrontements :

    “Mais sur tout le cours Franklin Roosevelt, il y a des centaines de personnes, peut-être des milliers, qui regardent ce qui se passe, par curiosité et avec une certaine empathie.” (lire Félix et Raphaël)

    Bilan des blessés :

    Manifestants : 50 blessures dont 13 au visage (cause flashball, grenades assourdissantes et matraques). (source : équipe médicale de la Zad)

    Policiers et gendarmes : 10 blessés “passés par l’hôpital”, selon le préfet.

    Rien ne permet formellement de dire que ceux qui ont affrontés la police le plus violemment sur des occupants (ou squatteurs) de la Zad de Notre-Dame-des-Landes. C’est pourtant le discours du ministère de l’Intérieur depuis le premier soir, qui sert d’argument à ceux qui veulent reprendre la Zad pour commencer les travaux (comme Jacques Auxiette, le président de région).

    D’ailleurs, beaucoup de questions restent posées :

    Pourquoi les organisateurs n’avaient pas prévu de service d’ordre ou des relais guidant les manifestants sur le parcours ?

    Pourquoi le bar-concert Le Chat Noir (nom équivoque) a été attaqué, alors que les autres cibles étaient des bâtiments publics, des banques, agences de voyage ou l’agence Vinci ? https://www.facebook.com/photo.php?fbid=635175949883016&set=a.128676927199590.22587.128533713880578&type=1&stream_ref=10

    Pourquoi la police a fait un usage disproportionné de la force quand elle s’est trouvée face à des manifestants pacifiques (devant le CHU notamment), entraînant plusieurs blessures graves, dont parmi eux deux journalistes parfaitement identifiés ?

    Pourquoi les autorités ont préféré faire passer la manifestation rue étroite de Strasbourg, où se trouve une agence Vinci, plutôt que sur le cours des 50 Otages, beaucoup plus large et contrôlable.

    Quel est le sens des déclarations exagérées sur l’état de la ville de Nantes par des élus (champ lexical de la guerre : “guerilla urbaine”, “saccage”, “black bloc”, etc.) ? Pour cette dernière question, il semble que le bar n’était pas une cible, mais les policiers qui se trouvaient à côté. Plusieurs personnes parlent de “tirs foireux” sur Facebook.

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