“On s’est dit : tant qu’à aller à Las Vegas, autant tourner un film“. Au départ, Loïc Paillard et Arnaud Sadowski, les Paillowski Brothers, avaient rendez-vous dans “la ville du pêché” pour le salon mondial des nouvelles technologies. Les lumières et l’extravagance des casinos leur inspirent un scénario de polar. Mais très vite les casinos sont remplacés par le désert californien. Et le polar par une jolie fable sur la vie. Son titre : Her name is Crazy.
Le pitch : “Mister Angry” est un écrivain raté. Même se foutre en l’air, il n’y arrive pas. Sur la route, en plein désert, il manque d’écraser Crazy. Jolie brune un peu barrée, allongée sur le bitume. Sa devise : “ce n’est pas la destination qui compte, c’est le voyage”. Crazy s’installe dans la voiture de Mister Angry. Pour partager un peu plus qu’un bout de chemin avec lui…
Her name is Crazy sera prochainement adapté en long métrage.
Arnaud Sadowski, co-réal’ et Théophile Rivière, ingé-son sur notre divan
On parle beaucoup de crise, de morosité ambiante depuis quelques années. Derrière le drame, votre film porte un message plutôt positif…
Arnaud Sadowski – On avait envie de grands espaces, de liberté… A l’heure actuelle, tout le monde se plaint pour quelques euros de découvert, pour les petits tracas du quotidien… Le message qu’on veut faire passer dans Her name is crazy, c’est finalement qu’il y a des choses bien plus graves dans la vie.
Je vais me mettre du monde à dos, mais le côté “masturbation intellectuelle” du cinéma français du type “je me lamente dans une chambre de bonne parce que la vie est difficile”, je ne vois pas l’intérêt. Quand je rentre dans une salle de cinéma, ce n’est pas pour qu’on me raconte la même chose que ce qui passe au 20 Heures.
On peut parler de choses graves, de la vie, de la mort. Mais on peut le passer à travers un film optimiste et joyeux avec un fond intéressant, sans réfléchir pendant des heures… Il y a plein de films qui l’ont prouvé en salle, comme Intouchables, qui part d’un postulat hyper sombre, le handicap, mais qui fait mourir de rire les spectateurs pendant une heure et demie.
Théophile Rivière – On aime l’idée d’un récit filmique qui offre une évasion aux gens… Le cinéma a toujours été une évasion, des pays comme l’Espagne l’ont bien compris. En France, il y a cette obligation d’être ancré dans le réel, de voir son quotidien au cinéma… Les Paillowski Brothers viennent un peu remuer cela.
A vous écouter raconter l’histoire de ce tournage, on a l’impression que le projet n’en était pas vraiment un au départ, c’est plutôt un coup de tête ?
A. S – Ça a été vingt heures de tournage, des comédiens appelés sur place, des prises de vues dans les casinos sans autorisation, une journée dans le désert… En tout, le film n’a coûté que 400 $. En fait, avec Loïc, nous avons un problème : chaque fois qu’on a l’idée d’un film, on a envie qu’il soit écrit, tourné, monté, étalonné le plus vite possible. Nous on fait des films à l’envers. On regarde ce que l’on a : un trépied, une grue, un appart’ dans Paris pour le tournage, des potes comédiens disponibles… Et ensuite on se demande ce que l’on peut faire avec ce dont on dispose immédiatement.
T. R – Certes, tourner un film c’est compliqué, mais c’est d’abord une envie de changer l’ordre établi. On voit des gens avec un scénario, en attente de subventions du Centre national du cinéma (CNC, NDLR) depuis 4 ans… Mais le but c’est de promouvoir une idée, faire naître un film, que cela soit en deux mois ou en deux ans de préparation. Réaliser des courts-métrages, c’est d’abord un plaisir.
Désert brûlant et gueule de bois : les dessous de Her name is Crazy (Making-off)
Her name is Crazy, The Paillowski Brothers, avec Zack Zublena et Leslie Coutherand, Tracto Films, 2012.