C’est un film resté dans les cartons pendant quatre longues années. Une commande passée par Solidaires Bretagne au journaliste Gwenvaël Delanoë. Dans « Le Syndicalisme pour changer la société » – documentaire en trois parties visible ci-dessous -, plusieurs militant·es mus par les idéaux libertaires analysent l’émergence d’une structure singulière dans le paysage syndical, à l’heure du néolibéralisme triomphant.
« On voulait montrer la trahison de la social-démocratie et du syndicalisme d’accompagnement. On n’est pas si nombreux à avoir vécu ça de l’intérieur », explique d’emblée Serge Le Quéau. À 70 ans, l’ancien facteur siège depuis peu au Conseil social économique et environnemental (Cese) au nom de l’Union syndicale Solidaires. La prolongation d’une vie de lutte, essentiellement menée comme postier, du Finistère aux Côtes-d’Armor en passant par Paris. Porteur de divers mandats sous l’étiquette de la CFDT, il a vu son organisation, jadis autogestionnaire, se transformer sous l’ère Mitterrand. Jusqu’à à la rupture et la fondation de Sud PTT, en 1989.
« On pourrait encore en dire beaucoup sur les connivences entre Edmont Maire et Jacques Delors. François Ruffin a repris cette histoire dans “Faut-il faire sauter Bruxelles ?“, un fascicule sorti en 2014 », se remémore celui qui fut aussi l’un des fondateurs d’Attac dans les années 1990.
Floriane Hédé fait partie des militant·es auquel Serge Le Quéau a passé le flambeau, à La Poste comme au sein de Solidaires Côtes-d’Armor. Et qui souhaite faire vivre cette mémoire. Dans le film, elle témoigne depuis le port du Légué de la fermeture du centre de tri de Saint-Brieuc en 2012 et du mouvement des Gilets jaunes, auquel elle a participé.
Le documentaire réalisé par le journaliste Gwenvaël Delanoë aborde le retour du traitement policier des mouvements sociaux. Si la répression n’a fait que s’accentuer depuis 2019, Floriane Hédé retient une évolution positive et inattendue : « Sur les retraites, la CFDT a fait l’union jusqu’au bout ». Pas suffisant néanmoins pour l’emporter.
Rien qui n’empêche de faire circuler ce film, qui, jusqu’à sa mise en ligne la semaine dernière n’avait été vu que par quelques dizaines de privilégiés. Serge Le Quéau et Floriane Hédé aimeraient s’en servir comme support lors de débats publics. Et pourquoi pas tirer un livre des 50 heures de rushes qui dorment pour l’heure sur des disques durs ?
Privée de barnum depuis le passage de la tempête Alex, l’intersyndicale CFDT, CGT, CFE-CGC du site Nokia de Lannion s’est retranchée dans un gymnase prêté la ville, le jeudi 8 octobre, pour rendre compte des discussions portant sur le plan dit de sauvegarde de l’emploi (PSE). L’absence d’avancée du gouvernement, dont les discussions avec la direction finlandaise du groupe de télécommunication n’ont commencé qu’à la fin de l’été, rend chaque jour plus concrête la suppression d’un emploi sur deux et la disparition à moyen terme de l’établissement.
« Nokia devrait revenir vers les salariés début octobre avec de nouvelles propositions », déclarait la ministre Agnès Pannier-Runacher lors d’une séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le 22 septembre. Deux semaines plus tard et en dépit de rumeurs relayées par la presse, le gouvernement demande aux élus du personnel d’attendre encore quinze jours avant de connaître les « avancées significatives » promises par le directeur général de Nokia France, Thierry Boisnon, en comité social et économique.
« On ne sait pas si ce sont des annulations de postes qu’ils vont nous annoncer, si ce sont de nouvelles activités, de nouveaux projets. […] Aujourd’hui, on n’a aucune idée de ce que Nokia va mettre sur la table », déplore le délégué syndical CFDT Bernard Trémulot devant 200 collègues réunis en assemblée générale, ce jeudi, à Lannion.
En réponse, l’intersyndicale compte poursuivre ses actions, convaincue du poids des images pour maintenir l’attention des autorités sur le site de Lannion. Deux lignes semblent toutefois émerger. Après l’accrochage de 402 silhouettes sur les grilles du site le 8 septembre puis l’organisation d’un relais à vélo pour rejoindre virtuellement le siège social finlandais, le 21 septembre, certains salariés réclament des actions plus fortes, susceptibles de réduire l’activité de l’entreprise, engagée dans la bataille de la 5G.
« Rien n’a bougé depuis le mois de juillet. Pour avancer, on a quinze jours pour réagir, compte Abderrahim El Boujarfaoui. Si vous voulez vraiment que les choses bougent, il faut se bouger le cul parce que maintenant c’est le site de Lannion qui va fermer. » Le délégué syndical CGT obtient des applaudissements en proposant une occupation des locaux jusqu’à l’obtention de réponses.
« Il ne faut pas leur donner le bâton pour nous battre. Je pourrais arrêter de répondre aux astreintes, mais je sais qu’il y a des Portugais et des Indiens qui n’attendent que ça », rétorque un ingénieur.
Ce changement de ton passera d’abord par un appel à quitter le télétravail pour rejoindre les bureaux afin de reformer les collectifs éclatés depuis mi-mars, à l’occasion du confinement. Un premier pas vers des actions moins « gentilles » ? Ce 8 octobre, l’option du blocage était loin de faire l’unanimité, même si la patience commence à trouver ses limites parmi les cols blancs trégorrois.
Interview d’Abderrahim El Boujarfaoui, délégué CGT
Conférence vidéo. L’un des porte-parole de l’Union syndicale Solidaires, Eric Beynel, a donné une conférence au centre Sainte-Anne, à Lannion, lundi 28 septembre, pour présenter « La raison des plus forts ». Ce recueil des chroniques racontant les 41 jours d’audience du procès France Télécom est sorti en juin, aux éditions de l’Atelier, six mois après la condamnation de l’entreprise et de sept ex-dirigeants pour « harcèlement moral institutionnel ».
L’établissement lannionnais aujourd’hui connu sous le nom d’Orange Labs a connu plusieurs suicides durant le plan Next, qui prévoyait le départ de 22.000 salariés à l’échelle nationale, « par la fenêtre ou par la porte », selon les mots prononcés en 2006 par le P-DG Didier Lombard devant une assemblée de cadres supérieurs. Il s’agissait de la face la plus visible d’un mal-être social très profond causé par un management brutal dans une entreprise récemment privatisée, d’abord identifié par Sud PTT et la CFE-CGC, co-fondateurs d’un observatoire d stress et des mobilités forcées.
« La raison des plus forts » est pensé comme un outil militant pour tirer les enseignements d’un procès hors-norme, à l’heure où la « start-up nation » finit de mettre à genoux le code du travail et que ses députés-managers et autres ministres-DRH semblent incapables de maîtriser la crise sanitaire du Covid-19.
Contre quoi faudra-t-il lutter et comment le ferons-nous dans les prochaines semaines et mois ? Comment limiter l’influence du pouvoir politique sur nos propres corps ? C’est par des questions ouvertes que la gazette commence et vous apporte ensuite les dernières nouvelles. Des révoltes éclatent dans les centres de rétention administrative, les sous-traitants du nucléaire bossent pour EDF comme si de rien n’était, l’été s’assombrit pour les intermittent·es et Amazon subit un sérieux revers.
Il faudra lutter un peu plus…
Le Medef et le gouvernement se lâchent en petites phrases pour préparer les esprits à des attaques d’envergure contre le code du travail. Contre la musique du « travailler plus pour sauver l’économie », il va falloir lutter encore plus pour la détruire !
Les pistes envisagées à la fin du long article de Jérôme Baschet dans Lundi Matin sont les suivantes : amplifier la colère légitime (notamment vis-à-vis de la situation de l’hôpital public), profiter du temps du confinement pour réfléchir à des modèles alternatifs (stratégie de L’An 01 mais seulement applicable pour les privilégié·es du confinement), ne pas redémarrer l’économie (stratégies de blocages, de ZAD), multiplier les initiatives d’auto-organisation et d’entraides locales (on en a parlé dans la gazette numéro 6). Il y a de quoi faire !
D’autres histoires à partir de nos corps
Le gouvernement, dans cette gestion de la crise sanitaire, s’attache particulièrement à gérer nos corps. Certains corps vont être sommés de ne plus sortir de chez eux tandis que d’autres sont forcés de servir les flux économiques qui « doivent » être maintenus dans des conditions plus que critiquables.
Sur les corps des femmes se matérialise aujourd’hui de façon accentuée la violence du système patriarcal, notamment pour les femmes confinées avec des partenaires violents. Nous pouvons dire que leur interdire de fuir est une violence supplémentaire que l’on peut signaler.
Dans nos corps se matérialise aussi l’incompréhension de la situation présente : nombre d’entre nous ont des règles chamboulées, décalées, retardées. Bien sûr, des explications biologiques existent et sont cohérentes pour cela.
Cependant, souhaitons-nous accepter tout cela ? Nous pouvons nous donner des outils pour modifier ces emprises sur nos corps. On nous enjoint à prendre soin de nous et de nos proches : mais la guérison et le soin, ce sont aussi des processus de transformation politique.
Collectivement, proposons de nouvelles histoires, qui guérissent, à partir de nos vécus et de ceux que les autres partagent avec nous.
Révoltes aux CRA de Mesnil-Amelot et de Vincennes
Le 11 avril au soir, les sans-papiers détenu·es dans le centre de rétention administrative (CRA) du Mesnil-Amelot occupent la cour du bâtiment et bloquent la promenade pour protester contre leurs conditions de détention, notamment après qu’une personne porteuse du coronavirus est temporairement enfermée dans le centre, risquant de contaminer nombre de prisonnièr·es.
Les détenu·es (ainsi que les policièr·es du centre) ne disposent ni de masque, ni de gel hydro-alcoolique. La répression policière s’abat sur le CRA le lendemain matin, et plusieurs détenu·es sont déporté·es vers d’autres centres en France, menaçant d’y répandre l’épidémie.
Le 12 avril, au CRA de Vincennes, des affrontements éclatent entre sans-papiers et policièr·es, ces dernièr·es refusant le transport d’un détenu malade à l’hôpital ; les détenu·es obtiennent finalement gain de cause.
Le 25 mars, la demande de fermeture des CRA pour circonstances exceptionnelles déposée par plusieurs associations dont le Gisti devant le Conseil d’État avait été rejetée. Le ministre de l’Intérieur soutenait alors que « la condition d’urgence n’[était] pas remplie et que ne [pouvait] être retenue aucune carence de l’autorité publique de nature à constituer une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, dès lors que les mesures de rétention actuellement en cours sont nécessaires et proportionnées, que des mesures de prévention ont été prises et que l’accès aux soins en rétention est garanti ».
On voit ce qu’il en est dans la réalité des faits…
EDF s’est vanté en début de confinement de réussir à faire tourner les centrales nucléaires avec une petite fraction de ses salarié·es. Or, les salarié·es d’EDF ne sont que des cadres : toutes les opérations de manipulation sur ses sites sont assurées par des sous-traitants.
C’est donc oublier que le monde de la production énergétique nucléaire ne se restreint pas à un contrôle depuis une salle couverte digne d’un film de science-fiction. Les installations nucléaires nécessitent aussi un entretien, qu’il soit celui, basique, du nettoyage, ou celui moins classique des opérations à réaliser sur les tranches (c’est à dire les réacteurs) comme les arrêts qui permettent de renouveler le combustible.
Lorsqu’on a que des salarié·es qui peuvent travailler à distance, il devient bien plus simple d’afficher des chiffres de télé-travail élevés. Les salarié·es des sous-traitants, quant à eux, sont pour pas mal au boulot.
Les syndicats continuent à réclamer des conditions de travail conformes aux mesures sanitaires, dénoncent une ambiance anxiogène, et s’inquiètent d’une communication imprécise. Les salarié·es partent parfois en « grand déplacement » d’une centrale à l’autre sans être testé·es et sans savoir si du boulot est disponible là-bas plutôt qu’ici.
Et c’est le contexte choisit par le gouvernement pour publier un décret accordant un délai supplémentaire à l’EPR de Flammanville, pour lequel les retards et dépassements de budget sont déjà bien nombreux. Plus localement, la préfecture de la Meuse a autorisé le 10 avril l’Andra à capturer et recenser des amphibiens dans le cadre du projet d’enfouissement Cigéo.
Pour finir sur une note joyeuse : de très jolies illuminations sont apparemment prévues pour l’anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl (c’est le 26 avril, préparez-vous) !
Amazon : le tribunal de Nanterre fait un carton chez les salarié·es
« Première victoire syndicale » jubile Solidaires mardi 14 avril. L’Union syndicale fait plier Amazon France devant le tribunal judiciaire de Nanterre. Le risque d’attraper le covid-19 dans les entrepôts de la firme justifie la réduction drastique de ses activités. La décision est relayée par CNN.
Les critiques répétées de Muriel Pénicaud à l’endroit du géant du commerce en ligne ne disaient rien qui vaille. Ce n’est toutefois pas l’action de ses services qui contraint Amazon à réduire la voilure, mais l’assignation en référé d’un syndicat.
La juge Pascale Loué-Williaume observe dans l’ordonnance que nous nous sommes procuré·es (à partir de la page 9) que les représentant·es des salarié·es n’ont pas été associé·es à l’évaluation des risques, en ce qui concerne le portique d’entrée ou l’utilisation des vestiaires.
Au sujet des transporteurs, « il n’est toujours pas justifié des protocoles de sécurité prévus par le code du travail ». Le risque de contamination par le biais des chariots automoteurs sur les quais de livraison n’a pas été suffisamment évalué. Pas plus que celui lié à la manipulation des cartons. Sur le site nordiste de Lauwin-Planque, des « non-respects » ponctuels des mesures de distanciation ont été relevées et partout les formations dispensées tout comme la prise en compte des risques psycho-sociaux sont insuffisantes.
« Il y a lieu […] d’ordonner […] à la société de restreindre les activités de ses entrepôts à la réception des marchandises, la préparation et l’expédition des commandes de produits alimentaires, d’hygiène et médicaux tant que la société n’aura pas mis en œuvre, en y associant les représentants du personnel, une évaluation des risques professionnels inhérents à l’épidémie de covid-19 sur l’ensemble de ses centres de distributions. »
Pour s’assurer d’être entendue, la première vice-présidente du tribunal assortit sa décision d’une astreinte d’un million d’euros par jour et par infraction constatée. Une somme qui doit être rapportée aux 4,5 milliards de chiffres d’affaires déclarés en 2018 sur le territoire. Conséquence, la multinationale ferme ses entrepôts jusqu’au lundi 20 avril, minimum.
Solidaires espère que ce jugement permettra de donner raison aux salarié·es qui ont tenté d’user de leur droit de retrait. Et même qu’il « ouvre la voie à d’autres actions ». Dans ce dossier éminemment politique, le juge d’appel peut néanmoins revenir sur cette décision dans les prochains jours, par exemple si Amazon arrive à fournir les pièces manquantes à son dossier.
Le tribunal des référés de Paris avait rendu le 9 avril une décision similaire, dans l’affaire qui oppose Sud-PTT et la direction de La Poste. Le groupe doit « recenser les activités essentielles et non essentielles à la vie de la nation » et associer le personnel à une évaluation des risques liés à l’épidémie.
Les intermittent·es fragilisé·es
La culture n’aura jamais semblé aussi accessible. De nombreux contenus sont désormais disponibles en ligne, temporairement ou pendant toute la durée du confinement : collections de musées (Giacometti, Louvre), expositions (Frida Kahlo…), musique (Opéra de Paris…), littérature ou encore théâtre (par exemple le Théâtre des Amandiers…).
Cette soudaine manne de libre accès ne doit pourtant pas nous faire oublier que les artisan·nes de la culture, et notamment du monde du spectacle, déjà précaires, sont fragilisé·es par le confinement.
Pour bénéficier de leurs indemnités sur les périodes où iels ne travaillent pas, les intermittent·es du spectacle doivent faire un minimum de 507 heures (ou recevoir au moins 43 cachets) en 365 jours.
Le gouvernement a fait un premier pas en banalisant toute la période du confinement (à partir du 15 mars), qui ne comptera donc pas dans les 365 jours. De plus, les intermittent·es qui arrivent en fin de droits verront ceux-ci prolongés jusqu’à la fin du confinement. La déclaration mensuelle auprès de Pôle emploi reste d’ailleurs de rigueur.
Néanmoins, nombre de spectacles ont été annulés à partir du 4 mars, date des premières restrictions de rassemblement ; par ailleurs, la liste des événements annulés (Aucard de Tours, etc.) jusqu’à mi-juillet est longue, faisant non seulement disparaître des contrats mais aussi les bénéfices escomptés des répétitions menées au cours des derniers mois.
Dans l’attente d’une probable interdiction de tous les événements estivaux, les organisateur·ices peuvent théoriquement poursuivre leur travail et leurs dépenses, mais c’est bien pour une annulation qu’iels optent majoritairement. Une option qui, en l’absence d’arrêté les sécurisant financièrement, remet en cause leur pérennité, dans un secteur très soumis aux aléas.
La crise du coronavirus n’inhibe pas les vieux réflexes réactionnaires. Les patrons de presse crient haro sur le postier, cet inénarrable tire-au-flanc qui divise par deux son nombre de tournées. La rédac’ chef du groupe Centre France parle même de « prise en otage » pour mieux les culpabiliser. Leurs lecteurs sauront-ils que le SRAS-CoV2 se propage dans les centres de tri ?
C’est est trop (ou plutôt pas assez) pour la directrice des rédactions du groupe Centre France qui glisse en copie de sa lettre ouverte Bruno Le Maire, Nicole Belloubet, les chargés de com’ d’Edouard Philippe et d’Emmanuel Macron et même le chef de cabinet de Brigitte Macron. Des fois que…
Apporter l’information jusqu’à la plus humble chaumière est assurément une noble mission. Penser à ses abonné·es, souvent âgé·es, pour qui le journal papier constitue parfois le dernier lien concret avec le monde extérieur, voilà qui ne souffre d’aucune contestation.
Droit de savoir ou logique éco ?
Lancer une campagne de presse contre son distributeur quand celui-ci cherche à protéger ses salarié·es d’une pandémie ne résulte toutefois pas des mêmes sentiments. Surtout lorsqu’on mobilise l’image éculée de la « prise d’otages », invariant de toute réaction patronale (et souvent médiatique) par temps de grève. Y compris lorsqu’on se souvient opportunément des fameuses missions de service public.
L’appel du pied aux maires, député·es et sénateur·ices, dont les quotidiens régionaux seraient « la meilleure courroie de transmission entre les mesures qu’ils prennent et leurs administrés » achève de nous convaincre qu’il est davantage question de gros sous que de déontologie journalistique. Les relations de dépendance avec le monde politico-économiques n’ont du reste rarement été aussi bien décrites.
Pourtant, c’est vrai, la situation est dramatique pour bon nombre de titres, qui n’ont pas su prendre le virage du numérique. Le journaliste de Mediapart, Laurent Mauduit, parle même, en fin connaisseur du milieu, de « la possible crise de trop », au moment où la messagerie Presstalis est au bord du dépôt de bilan, les kiosques désertés quand ils ne sont pas fermés sans parler des salons organisés par les journaux pour remplir leurs caisses qui s’annulent tour à tour.
Où se situe la famille Baylet dans cette « guerre », sur la ligne de front, à l’arrière ou planquée ?
Loin de formuler une autocritique, le président de l’Alliance, puissant syndicat des éditeurs de presse, envisage un recours en justice contre La Poste. L’ancien ministre de François Hollande, Jean-Michel Baylet, toujours pédégé du groupe La Dépêche, brandit les 100 millions d’euros de subventions annuelles versées par l’Etat à l’ex-entreprise publique.
Son fils se fait même porte-flingue lorsqu’il qualifie La Poste de « déserteur » dans un édito enflammé. Les postier·es y sont opposés en creux aux soignant·es, « “nos héros” [qui] font prévaloir l’intérêt général sur toute autre considération, mettant parfois leur santé en péril ».
«Nous ne regardons plus la caissière du supermarché, l’éboueur, ou le conducteur de bus de la même façon » ajoute Jean-Nicolas Baylet, qui ne précise toutefois pas comment il les regardait précédemment. Ni où se situe la famille Baylet dans cette « guerre », sur la ligne de front, à l’arrière ou planquée ?
Le cri du cœur du patriarche – La Poste nous abandonne – est quant à lui partagé indifféremment dans les colonnes de La Montagne (Centre Presse), Le Journal de Saône-et-Loire (Ebra), Le Télégramme, Les Echos (LVMH) et L’Opinion (Arnault, Bettencourt…). Sans préciser que le secteur de la presse vit lui-même sous perfusion. Une bonne partie des aides à la presse étant consenties sous forme de tarifs postaux préférentiels.
Les postier·es craignent pour leur santé
Qu’en pensent les postières et postiers dans tout ça ? Ce n’est pas dans La Dépêche du Midi qu’on le saura. Faisant fi de la règle du contradictoire, elle a proprement ignorée le dernier communiqué adressé par Sud-PTT. Peu étonnant lorsqu’on apprend de source syndicale qu’une journaliste à la santé fragile a dû faire elle-même usage de son droit de retrait pour éviter un reportage imposé par son supérieur.
Il faut donc lire le quotidien d’origine communiste La Marseillaise, dont la parution papier est d’ailleurs suspendue, pour savoir qu’un droit de retrait a été exercé collectivement vendredi sur une plateforme des Bouches-du-Rhône où travaillait un agent contaminé. Le représentant syndical Sud-PTT Serge Raynaud assure qu’aucun masque n’y a été distribué, alors que 100 personnes sur 200 y travaillent encore.
Des chiffres sans doute sous-estimés, comme semble l’attester un document présenté comme émanant du siège. Dans la branche réseau, qui compte un quart des effectifs totaux, 167 agents présenteraient des symptômes du Covid-19 au 25 mars.
La réduction de moitié des activités ne satisfait par pour autant les postier·es, qui dénoncent l’absence de nettoyage et de désinfection des matériels. Le syndicat propose donc un recentrage sur les activités essentielles.
« La direction se refuse toujours à intervenir auprès des grands émetteurs comme Amazon, qui est par ailleurs son plus gros client. Au nom de la sacro-sainte liberté du commerce, on s’interdit donc de mettre l’appareil productif au service des besoins essentiels de la population… Quitte à continuer à mettre en danger les factrices et les facteurs, pour distribuer tout et n’importe quoi. »
Mobilisé depuis des années contre les réorganisations incessantes qui ont conduit à une fermeture de très nombreux bureaux et développé le mal-être des postier·es, le syndicat attaque le groupe en justice pour des manquements répétés. L’audience en référé devrait se tenir le 3 avril.
Depuis plusieurs jours, les médias tournent en boucle. Le docteur Raoult est-il ou non un génie ? La chloroquine est-elle un remède miracle au coronavirus ? Y a-t-il 1.312 morts du coronavirus en France à 13 h, 1.300 à 13 h 12 ou les deux? À toute ces questions, la gazette vous donne quelques arguments pour trancher le débat une bonne fois pour toutes… et changer de sujet !
Nos ami·es scientifiques connaissent les méfaits de la bibliométrie (ou évaluation des chercheurs par le nombre de publications et le nombre de citations de ces publications dans d’autres articles) : revues prédatrices, auto-citation, etc. Pourtant, il faut avouer qu’on voit rarement des abus comme ce qu’a pu faire le docteur Raoult. Il aurait participé à 1.802 articles, dont de nombreux sur le coronavirus qui ont été acceptés à publication en un jour de relecture. Quelle rapidité !
Il faudrait être mauvaise langue pour remarquer que le directeur de publication de la revue qui accepte lesdits articles est un coauteur des articles du docteur Raoult ! Quant à l’efficacité de la chloroquine, il s’agit d’un débat scientifique en cours complètement disjoint de l’escroquerie Raoult, même si l’habitude médiatique de tout personnaliser fait fureur…
Sur les 63 articles sur le coronavirus considérés scientifiques par l’Inserm – rassurez vous, l’auteur de cette rubrique ne les a pas lus, n’étant pas chercheur dans ce domaine -, il ne semble pas y avoir de conclusions positives (sinon il y aurait un consensus scientifique ce qui est loin d’être le cas). Il faudra sûrement attendre les résultats des nombreux essais cliniques en cours (par exemple l’essai européen Discovery) pour y voir plus clair.
En attendant, l’extrême-droite se coordonne pour faire de la chloroquine le remède miracle : Trump, Estrosi, Le Point, Valeurs actuelles, etc.
Le confinement s’accentue et les conséquences négatives sont occultées
La situation est catastrophique pour toutes les personnes victimes de violences domestiques (enfants maltraités, femmes battues, etc.). Pas d’école pour voir les ami·es, pas de sorties pour se reposer et changer d’air et les amendes pleuvent quand on sort de chez soi.
Heureusement, des initiatives se multiplient sur internet pour aider à mieux vivre le confinement, à soulager le stress et l’anxiété comme ce que propose l’université de Lorraine, même si ce sont de piètres consolations pour les personnes les plus en dangers.
L’impact social du confinement (qui est certes nécessaire pour enrayer la propagation trop rapide du coronavirus) ne fait pas partie du débat public, ce qui empêche de chercher des solutions (hébergement de tous et toutes, réquisition des logements vides comme l’appelle le collectif Droit au logement, Dal).
Pendant que les médias bavardaient, le gouvernement préparait son coup
L’attaque contre le code du travail qu’a fait passer le gouvernement sans aucun contrôle législatif (par ordonnances) est inédite et violente ! On pourra faire travailler des salarié·es jusqu’à 60 heures par semaine ! Cela était souvent déjà imposé, en toute illégalité, pour les soignant·es.
Tant qu’à faire, vu que ça tenait tant bien que mal (ou pas), pourquoi ne pas l’imposer à tout le monde, se dit le gouvernement ?
À voir si les autres professions seront aussi corvéables et se laisseront faire, et espérons que, contrairement à ce qu’on a pu constater jusqu’ici, les syndicats ne prônent pas l’union nationale et choisissent la lutte des classes pour préserver les intérêts des travailleur·euses.
Actions syndicales
Face à l’angoisse générée par la demande de télétravail ou de travail à l’extérieur malgré l’épidémie, les syndicats ripostent.
La CGT lance le site luttevirale.fr pour informer les salarié.es sur leurs droit en temps de coronavirus et Solidaires va mettre en place un numéro de téléphone d’assistance syndicale.
Malheureusement, avec les ordonnances, les règles changent plus vite que les formations syndicales ! Bonne chance à elleux !
Il faut rappeler les évidences
L’OMS doit rappeler aux pays riches que ne pas aider les pays pauvres serait cruel. C’est vrai qu’après les avoir pillés pendant des centaines d’années pour certains, cela ne serait pas très sympa d’ajouter en plus le fait de les laisser seuls pendant cette crise !
En plus, cela risque de se combiner avec une grave crise humanitaire liée à la destruction des récoltes par un essaim de criquet. Invasion de criquets favorisée par quoi ? Le réchauffement climatique causé en grande partie par la pollution des pays les plus riches…
Envolons-nous hors des prisons
La situation est tellement catastrophique dans les prisons que L’Envolée organise une émission de radio tous les soirs, à 19 h, pour nous tenir au courant ! Merci à elleux pour leur super initiative. Continuons de lutter contre les prisons, les centres de rétention administratives (Cra) (où la situation n’est pas meilleure) et pour aider SDF, migrants et personnes dans le besoin !
Écologie & coronavirus
Si vous avez accès à un endroit ou vous pouvez observer les oiseaux, vous avez pu constater qu’ils se portent particulièrement bien en ces temps de confinement ! Il faudra attendre des études plus poussées pour avoir des chiffres précis mais assurément, les animaux sauvages apprécient que les humain·es prennent moins de place sur la planète.
On voit même des dauphins près de la Sardaigne, des ami·es m’ont parlé du retour de variétés de papillons plus vues depuis plusieurs années dans leur jardin. Beaucoup d’entreprises sont à l’arrêt ce qui cause une baisse historique de la production en gaz à effet de serre, principales causes du réchauffement climatique.
Comme quoi, c’est possible de ralentir la folie économique et de lutter contre le réchauffement climatique ! À nous de continuer sur cette lancée une fois que la crise du coronavirus sera terminée pour limiter les dégâts (si l’on continue sur cette lancée, des prévisions prévoient +6° en 2100…).
La lutte pour l’IVG n’est jamais finie…
Alors que les circonstances sont exceptionnelles, le gouvernement refuse d’aménager le droit à l’IVG ! Ce gouvernement avait déjà montré son anti-féminisme en gazant de nombreux rassemblements lors de la journée du 8 mars… Raison de plus pour les virer tous une bonne fois pour toutes !
Gérard Gatineau a publié « 30 ans de bitume, ou les tribulations d’un flic du XXe siècle dans un univers hostile », aux éditions L’Harmattan, en 2009. Aujourd’hui âgé de 75 ans, celui qui est passé de l’autre côté de la barricade dès novembre 1968 reste fidèle à la CGT et au Parti communiste. Il défilait d’ailleurs avec son drapeau, le 1er mai 2019, dans les rues de Paimpol (22), sans rien concéder à la maison poulaga.
Quatre mois de prison avec sursis, c’est la peine à laquelle Gérard Gatineau a été condamné il y a maintenant trente-cinq ans. « Simplement pour avoir dit à un officier que le racisme n’était pas inscrit dans la Constitution », plaide l’ancien flic parisien, qui se targue d’avoir monté une section CGT dans son commissariat du XVIIIe et d’avoir mis en grève les pervenches. François Mitterrand était alors président.
S’il refuse de parler d’un racisme généralisé dans la police, le retraité, désormais connu pour son engagement associatif, se félicite de ne pas être « passé dans la machine à broyer les consciences », renvoyant la responsabilité jusqu’aux sommets de la hiérarchie. « On raconte sans arrêt aux policiers que tous les problèmes qu’ils rencontrent sur la voie publique sont l’œuvre d’immigrés. Même les plus solides mentalement, on leur montre des chiffres qui ne sont pas réels. »
Le refus des manifs anti-ouvrières
Parlons chiffres justement. L’enquête électorale du Cevipof concernant la dernière présidentielle montre qu’une majorité absolue de policiers déclarait voter Le Pen dès le premier tour. « Le recrutement de base se fait sur une questionnement politique de l’individu, remarque Gérard Gatineau, pas étonné. […] C’est pour ça que j’ai hésité, mais avec des copains on s’est dit “c’est de l’intérieur qu’on se bat, pas de l’extérieur”. »
« Mon travail c’était au service des citoyens dans la rue, poursuit celui qui se présente aujourd’hui encore comme un fils d’ouvrier. Pas au service de la hiérarchie et du massacre des travailleurs. […] J’ai toujours refusé d’aller dans des manifestations anti-ouvrières […], d’attaquer celui qui était en face de moi, qui pouvait être mon père, mon frère ou moi avant d’être flic. ».
Gardien de la paix, quinze ans à Paris puis quinze ans à Saint-Brieuc, mais certainement pas CRS. « Si j’avais été versé chez les CRS, ma carrière de policier se serait arrêtée tout de suite. Je n’aurais pas supporté d’obéir à des ordres qu’au fond de moi-même je ne ressentais pas comme légaux », affirme celui qui a offert son uniforme à une troupe de théâtre.
« Mais de tous ces policiers, qu’est-ce qu’on va en faire ? Ils s’en iront à la ville, taper sur les ouvriers, taper sur leurs frères ! », chantait Gilles Servat.
« Les droits de l’Homme sont parfois foulés au pied »
Même si sa carrière s’est terminée il y a vingt ans, avec le grade de sous-brigadier – « le plus bas qu’on peut faire après trente ans, en tenue, sur la voie publique » – son témoignage résonne avec l’actualité.
Le documentaliste David Dufresnes a signalé 780 violences policières depuis le début du mouvement des « Gilets jaunes » (au 7 mai 2019), dont un décès, 280 blessures à la tête, 23 éborgnements et cinq mains arrachées. Aucune plainte n’a encore abouti, indique le Canard Enchaîné. Pas plus que celles déposées depuis des années par des habitants des quartiers populaires, du reste.
« Dans la police, parfois, les droits de l’Homme sont foulés au pied. », déclarait Gérard Gatineau à la Fête de l’Huma, en 2010. L’ordre de démuseler les chiens qu’aurait donné le nouveau préfet de police de Paris, Didier Lallement, ne l’a pas rassuré. « Ça ressemble à un Etat nazi », s’emporte l’admirateur de Jean Ferrat, qui cite la chanson « Nuit et brouillard ». « Votre chair était tendre à leurs chiens policiers », chantait le poète.
« Tout le monde se tait et ça encourage les débordements »
Gérard Gatineau revient à la charge : « Le responsable principal c’est le pouvoir politique, c’est pas le CRS. À l’époque où je travaillais, quelqu’un qui faisait une connerie dans une manifestation il allait rendre des comptes. Maintenant, on tire à flux tendu sur des manifestants. En droit ça n’existe pas. Donc on devrait demander des explications au gars. Or, là personne ne lui dit rien, tout le monde se tait et ça encourage des débordements gratuits. »
Si ces violences illégitimes deviennent monnaie courante, l’ancien syndicaliste avance que la quasi-disparition du syndicat CGT n’y est pas étrangère. « Il ne reste que des syndicats autonomes, des syndicats maison. Ils ne vont pas monter au créneau contre le pouvoir politique. Ils pensent d’abord à leur carrière. »
Gérard Gatineau ne voit pas la situation s’améliorer à moyen terme. « Les ‘black blocs’ qui ont toujours existé […] ce n’est pas possible qu’une police préventive ne soit pas au courant des tenants et des aboutissants de ces groupes, sinon que ça leur sert bien. »
Les femmes ont toujours été impliquées dans les luttes sociales, mais leur présence est particulièrement remarquée depuis le début du mouvement des « gilets jaunes ». Ce sont elles qui tenaient le mégaphone lors de la manifestation intersyndicale du 5 février 2019, à Guingamp. Rencontre avec Frambroise Clausse, conseillère en orientation professionnelle, Soizic Roche, aide-soignante dans un Ehpad, et Marie-Françoise Zanchi, secrétaire générale de la CGT de l’aide et des soins à domicile des Côtes-d’Armor.
Plusieurs dizaines de « gilets jaunes » ont répondu à l’appel des syndicats CGT, Solidaires et FSU, lors de la journée de grève du 5 février 2019, à Guingamp. Une première pour un mouvement qui veille jalousement à son indépendance vis-à-vis de toute structure établie et au sujet duquel nombre de syndicalistes ont d’abord eu de la méfiance, y voyant la main de l’extrême-droite et des mots d’ordre poujadistes.
« Les femmes sortent de leurs cuisines, elles sortent de leurs usines »
Auteure d’un livre publié en 2009 intitulé « À ma mère, à mes filles, à vous toutes » (éditions Épée Et Chemins), dans lequel est relaté son « parcours de guérison » après le viol dont elle a été victime à l’âge de 18 ans, la militante féministe se réjouit de la mobilisation en cours.
« On n’a jamais vu autant de femmes dans les rues, constate Framboise Clausse. Ça, c’est très particulier, parce que les hommes ont l’habitude d’occuper le terrain, c’est plus facile. Pour nous les femmes c’est toujours un effort supplémentaire d’agir dans le domaine public, de se montrer, de prendre la parole. Et aujourd’hui, les femmes sortent de leurs cuisines, sortent de leurs usines, parce qu’elles voudraient que le monde soit meilleur pour leurs enfants. »
Les premières études sociologiques confirment cette observation. (lire l’encadré ci-dessous)
Des travailleuses malades du « care »
Les femmes étant largement majoritaires dans les professions du soin, du « care » en anglais, c’est assez logiquement que se trouve à Guingamp une délégation 100 % féminine du syndicat départemental CGT de l’aide et du soin à domicile.
Ces aides à domicile et autres aides-soignantes courent la campagne pour veiller sur des personnes fragiles, le plus souvent âgées. Un travail qui nécessite de l’empathie, pratiqué en dépit de contrats à temps partiel, comprenant des amplitudes horaires souvent indécentes (9 h – 19 h, payés 5 heures), pour un salaire inférieur au Smic, résume Soizic Roche, qui travaille dans un Ehpad, à Plestin-Les-Grèves. « Nos métiers sont en train de disparaître », tranche-t-elle, en appelant au Conseil départemental, à l’Agence régionale de santé et à l’Etat.
Sa secrétaire générale, Marie-Françoise Zanchi, est convaincue que les employeurs profitent d’une certaine docilité de ces travailleuses pour rogner sur les primes et même sur les frais de déplacement. Le syndicat dénonce la fusion des 80 structures des Côtes-d’Armor, initiée en 2017 par le Conseil départemental à majorité LR-UDI, qui aboutit à des compressions d’effectifs et à des temps de trajets rallongés. Des groupes privés ont parfois repris l’activité gérée jusqu’à présent par des associations, en lien avec les collectivités locales.
Plusieurs marches de femmes « gilets jaunes » ont illustré le besoin de mettre en avant des revendications spécifiques, comme l’égalité de salaires entre les sexes ou la pénalisation réelle des violences conjugales. L’une des plus importantes s’est d’ailleurs déroulée le dimanche 26 janvier, à Saint-Brieuc. Menée par des militantes grimées en Marianne, elle avait réunie près de 300 personnes. Les journalistes présents avaient souligné le caractère pacifique de cette manifestation, contrastant avec les violences observées la veille, à Rennes.
Des femmes majoritaires chez les « gilets jaunes », plus qu’une impression
Selon l’enquête menée par cinq sociologues de Sciences Po Grenoble, par le biais de questionnaires en ligne diffusés sur 300 groupes Facebook de « gilets jaunes », 56 % des 1.455 réponses exploitées émanent de femmes. Elles apparaissent toutefois surreprésentées dans l’échantillon des manifestant·e·s « moins actif·ve·s ».
Les chercheurs insistent sur l’importante proportion de « gilets jaunes » en situation de forte précarité. Ils sont 74 %, soit le double de la moyenne nationale. Les femmes (78 %) sont plus touchées que les hommes (68 %).
Hervé Chuberre est représentant du personnel (SNPREES-FO) à l’IUT de Lannion. Professeur de physique à l’Enssat, il nous explique les raisons de l’entretien sollicité auprès de la sous-préfète, Christine Royer, et du rassemblement organisé simultanément sous ses fenêtres, le jeudi 25 octobre 2018.
L’avenir de l’Institut universitaire de technologie trégorrois s’écrit en pointillés. L’établissement public fait les frais d’une politique austéritaire qui devrait s’amplifier. Rennes 1, dont il dépend, a été placé sous tutelle du rectorat, et donc du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche dirigé par Frédérique Vidal, à cause d’un déficit atteignant 2,8 millions d’euros cette année.
Un plan social à Rennes 1
Ce jeudi, le conseil d’administration de l’université a validé le plan de retour à l’équilibre présenté par son président David Alis. Il prévoit la suppression de 120 postes, dont 28 enseignants-chercheurs, sur un total de 3.300 personnels, d’ici la rentrée 2021. La masse salariale représente 213 millions d’euros sur un budget de 283 millions.
Yann Le Page, secrétaire de la CGT-Ferc, calcule même que 274 postes seront économisés, grâce au non renouvellement de contractuels.
« Cette amputation fait suite au plan de 100 suppressions de postes en cours depuis 2016 » et s’ajoute « à la baisse de 25 % sur les cinq dernières années des crédits affectés par l’université aux formations et laboratoires de recherche, et prévoit une baisse supplémentaire de 15 % alors que, sur la même période, le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter (+ 12 %) », renseigne l’intersyndicale, qui organisait également un rassemblement dans la capitale bretonne.
Dans une interview accordée à Ouest-France, David Alis demande un soutien financier du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche pour payer les fonctionnaires et rénover le parc immobilier de l’université.
Menace sur le DUT journalisme
Les conséquences se feront particulièrement sentir à Lannion. Selon la trajectoire dessinée par le PREQ, en septembre 2019 et par comparaison avec la rentrée 2015, l’IUT aura perdu 13 % de ses personnels. Dans le même temps, les dotations versées par l’université auront baissé de près de 50 %.
Six postes d’enseignants-chercheurs sur 70 pourraient disparaître en 2019 (8,6 % de l’effectif), plus trois postes non-enseignants sur 36 (8,3 %).
L’IUT de #Lannion est menacé de fermeture, étouffé par les destructions d’emplois pour répondre à des objectifs budgétaires.
C’est la lecture faite par l’AG des personnels et quand on observe dans le détail le plan de @UnivRennes1, on ne peut qu’en venir à la même conclusion. 😨 pic.twitter.com/R3tzEawkIJ
Certaines filières sont déjà fragilisées. Le département information-communication a perdu trois maîtres de conférence en quelques années, d’abord gelés, puis supprimés. Il pourrait encore voir partir trois contractuels et un professeur d’anglais.
Le DUT journalisme vient pourtant d’être confirmé comme l’une des quatorze formations nationales reconnues par la CPNEJ, au même titre que l’ESJ Lille, le Celsa ou le Cuej. Avec Cannes, Lannion est la seule école à recruter des étudiants en journalisme au niveau bac. Un choix revendiqué par les enseignants, qui y voient une manière d’apporter de la diversité dans une profession où la reproduction sociale joue à plein.
Département de sciences sociales isolé dans une université qui se tourne de plus en plus vers les sciences dites dures. Campus situé dans une petite ville éloignée des lieux de pouvoir dans un contexte de métropolisation. Le particularisme lannionnais semble aujourd’hui en grand danger, à cause du tarissement de ses ressources.
L’Enssat, l’école d’ingénieurs de Lannion qui dépend de Rennes 1, est également concernée. C’est pourquoi la prochaine assemblée générale sera commune aux deux établissements, après les vacances de la Toussaint. Encouragés par la sous-préfète, la délégation compte élargir sa recherche de soutiens locaux en contactant les industriels locaux, tels que Nokia ou Orange.
Disclaimer
L’auteur a étudié pendant trois ans le journalisme à l’IUT de Lannion. Il y intervient aujourd’hui comme vacataire d’enseignement.
Environ 150 agents de Lannion Trégor Communauté ont manifesté du siège de l’agglo vers le centre-ville, le jeudi 17 mai 2018. La grève contre la hausse du temps de travail et l’instauration d’une prime au mérite a commencé le mardi 15 mai, à l’appel de l’intersyndicale CGT-CFDT.
Qu’ils travaillent dans les déchetteries, les piscines, les services administratifs, à l’aquarium de Trégastel ou au volant d’un bus, les fonctionnaires territoriaux s’estiment lésés par l’harmonisation du volume de travail annuel à 1.607 heures, soit 35 heures par semaine, par la déduction de jours de congés. Ils jugent que le travail n’est pas récompensé, alors que les fusions rapides et successives entraînent des réorganisations dans les services.
Selon Yann Guéguen, professeur à l’école de musique du Trégor, représentant CGT et candidat LO aux législatives, les salariés de Lannion Trégor Communauté ne comptent par leurs heures. La suppression de congés permettrait surtout selon lui à l’agglo de se passer d’agents contractuels. L’assemblée générale propose de travailler un quartd’heure de plus par jour pour arriver au seuil recommandé par la Cour régionale des comptes.
Autre pierre d’achoppement, l’intégration d’une part variable dans la rémunération, basée sur l’évaluation des agents. Les grévistes dénoncent une mesure budgétaire qui risque de mettre en concurrence les agents et de dégrader l’ambiance de travail. Tout en facilitant le copinage, quand les critères sont difficilement quantifiables.
Après deux réunions de négociations, mardi puis mercredi, la délégation de grévistes ne note pas d’avancée de la part du président de Lannion Trégor Communauté. La direction de LTC renvoie à des négociations le 29 mai. Le mouvement se poursuivra ce vendredi 18 mai et pourrait durer, au moins, jusqu’au 22 mai, journée nationale de grève dans les trois fonctions publiques.