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Festival d’été de Québec, plein les jambes et les oreilles

Les festivals français, on connaît. Les européens, un peu, si on a la chance d’y aller. Mais on parie que vous n’êtes pas des habitués des festivals américains. Ça tombe bien, on était au Festival d’été de Québec, du 4 au 14 juillet.

Le Festival d’été de Québec s’est achevé dimanche sur la prestation de Stevie Wonder (à laquelle on a eu la flemme d’assister), après pas moins de onze jours de concerts, en plein cœur de la ville éponyme. Le FEQ, de son petit surnom, prend place sur les plaines d’Abraham, parc historique de plus de 100 hectares, à côté du parlement québécois (voir sur Google Map).

Le bracelet à puce du festival, et le macaron, qui ne sert à rien sinon à te faire clignoter le téton avec une LED rouge.
Le bracelet à puce du festival, et le macaron, qui ne sert à rien sinon à te faire clignoter le téton avec une LED rouge.

Lors de la conférence de presse-bilan qui s’est tenue lundi, les organisateurs ont annoncé une édition déficitaire, pour la toute première fois. Dix-mille laissez-passer n’ont pas été vendus, mais 140 000 personnes en ont quand même pris plein les oreilles entre le 4 et le 14 juillet.

Les onze jours debout, à marcher et sauter, il faut les tenir sur la durée. Mais le FEQ finit tôt, généralement avant minuit, ce qui facilite la tâche. Par contre, pas de camping prévu, les hôtels se frottent les mains. Côté orga, le pass – un bracelet à puce – et la fouille très sommaire, où on ne cherche en gros que la bière, rendent l’entrée très fluide. Le laissez-passer coûtait 80 dollars (soit un peu moins de 60 euros) cette année. Même si ça fait moins de 10$ par jour, les Québécois trouvent que c’est vraiment très cher, mais surtout que le prix a tendance à augmenter énormément d’une année sur l’autre.

La scène principale « Bell », au bord du fleuve Saint-Laurent, est taillée pour le rock et l’electro de masse. Les programmateurs n’osent clairement pas y inviter des artistes aux répertoires un peu moins fédérateurs.

Les groupes de moins grande envergure doivent se contenter du Parc de la Francophonie, plus intime, mais qui montre vite ses limites de capacité, du fait qu’il soit clôturé pour l’évènement. Il faut sinon s’aventurer en basse-ville de Québec, dans l’intimité des petites salles partenaires.

La typologie du spectateur : ado, les cheveux longs, la casquette à l’envers.

Le public québécois, un peu statique, est prêt à se laisser conquérir si on y met les arguments. Mais il ne faut pas s’attendre à des pogos dans la foule, et le slam se fait au compte-goutte, même avec les groupes les plus rock.

La typologie du spectateur du FEQ : ado, les cheveux longs, la casquette à l’envers et le T-shirt sans manche pour les garçons, les shorts très très courts et pas beaucoup de tissus pour les filles (un peu la norme ici). Le festival est sinon très familial.

 La scène Bell, avec le Saint-Laurent à l'arrière, et la ville voisine de Lévis au fond. Crédits Renaud Philippe.
La scène Bell, avec le Saint-Laurent à l’arrière, et la ville voisine de Lévis au fond. Crédits Renaud Philippe.

On peut souligner quelques faits notoires : on n’a pas vu un drapeau breton (!), les toilettes restent étonnamment hygiéniques après huit jours de festival (et c’est quand même bien sympa).

Le bénévolat est ici particulier, les vendeurs de bière ou de shots de whisky en tenue sexy se déplacent dans la foule pendant les concerts et se font des salaires grâce aux pourboires.

Le cartable-chaise, l'atout senior du FEQ.
Le cartable-chaise, l’atout senior du FEQ.

On peut aussi se procurer du « fort » comme on appelle ça ici (gin, vodka, rhum), ou même acheter des bouteilles de vin au bistro officiel, et pourtant, on croise peu de festivaliers très imbibés.

Enfin, pour parler tendance, on pallie l’interdiction des tabourets sur le site avec une nouvelle arme, le cartable qui devient une assise avec dossier ! Le vieux Québécois adore.

Côté prog : de tout. Et de partout. Alors on a fait une mini mini sélection. Notamment le jeudi 11 juillet, l’une des soirées electro de la dizaine, probablement celle où il y a eu le plus de monde et le plus de décibels.

On a raté le talentueux Madeon à cause de la file d’attente. Dommage.

Martin Solveig : une vraie déception. Martin aime beaucoup ce qu’il fait. Tant mieux pour lui. Il s’adresse à la foule en anglais (au Québec…) ou dans un français teinté d’accent américain ridicule. Il mixe du Daft Punk (pour l’originalité on repassera), le groupe Fun… et tes propres compos à succès mec ?

Tiësto, tête d’affiche du jeudi 11 juillet

Wolfgang Gartner enchaîne, se coulant dans la masse electro-club, faisant « la job » de façon efficace.

Vient Tiësto, le Néerlandais tête d’affiche de la soirée, se contente du minimum d’échanges avec son public, mais personne n’a vraiment l’air de s’en soucier.

Habitué des soirées à Ibiza, le DJ livre un gros show boum-boum, avec de la pyrotechnie tout le long, avant un feu d’artifice final impressionnant, qui explique en partie les 250.000 dollars de sa prestation. Merci pour la cécité temporaire et l’acouphène !

Parmi les artistes français, on comptait Zaz (non merci, on n’a pas quitté la France pour ça), mais aussi -M-. La presse québécoise lui a reproché d’avoir trop peu joué ses dernières chansons et de se reposer sur ses lauriers musicaux.

On pense au contraire qu’il a eu la meilleure stratégie, face à un public pas forcément conquis (comme il peut l’être en France), en se basant sur ses classiques, en se faisant pédagogue et en usant de beaucoup d’instrumentaux et d’improvisations pour faire bouger les plaines.

On dit le public québécois policé, -M- le rend polisson

On dit le public québécois policé, -M- le rend polisson, « hum tu m’excites ! » Et ça marche. Dans la province, pourtant bastion féministe, les filles reprennent en chœur « macho macho j’adore ».

Si tu le pousses un peu, le public québécois se laisse même aller à quelques mouvements de bras.
Si tu le pousses un peu, le public québécois se laisse même aller à quelques mouvements de bras.

Tête d’affiche très attendue, le 8 juillet, Bruno Mars, en bon américain, se déplace avec une équipe de 80 personnes et fait le show.

Chemise léopard et déhanché langoureux, il enchaîne les succès radio, passant du reggae aux influences seventies, avant de dégainer l’atout charme ultime : le piano.

Bruno fait la cour à sa cour. Le public est, sans surprise, majoritairement composé de jeunes filles en fleurs aux cris suraigus. Il gratifie cette foule hormonée de plusieurs « Koubec je t’aime, bisou ».

On a beau avoir dépassé l’adolescence, on se laisse prendre au jeu. On salue les courageux parents accompagnateurs.

On pourra regretter un Bruno Mars un poil trop sûr de son effet. Lorsqu’il entonne When I was your man, chanson sur le thème très très original d’un amour perdu, il explique que « c’est dur de chanter ça ce soir ». Quelque chose nous dit qu’il le raconte tous les soirs…

Parce qu’il y en avait aussi pour un public plus mûr, la chanteuse Emmylou Harris, accompagnée de Rodney Crowell, le charisme tranquille, la voix parfaitement maîtrisée, a apporté une touche country folk au festival.

Les fans, moins nombreux ce mardi soir-là, n’en ont pas moins été en communion avec l’artiste à la tignasse blanche immaculée, qui se fait très rare en Europe. Les petits avantages de l’Amérique.

On a aussi vu Ellie Goulding, géniale, MGMT, ça sentait le joint comme jamais et c’était mou, Cœur de pirate, les Black Keys, les Trois Accords, le meilleur concert décrète la groupie en nous, Karim Ouellet, mouais, Cafeïne, ouais, Weezer, énergique !

Ne reste plus qu’à se reposer un peu avant le prochain festival de Québec. Celui des bières, en août !

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