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Édouard Bergeon présente « Au nom du père »

Du drame qui frappa sa famille, Édouard Bergeon tire une fiction coup de poing racontant le glissement de l’agriculture française vers un productivisme qui broie les hommes. Nous avons rencontré le réalisateur du film « Au nom de la terre » lors de son passage à Lannion.

« Un agriculture met chaque jour fin à ses jours. » Édouard Bergeon martèle cette statistique récemment réévaluée par la Mutuelle sociale agricole (MSA). Il y a vingt ans, c’est son père qui disparaissait en avalant des pesticides. Ultime étape d’une dépression causée par l’impossibilité de maintenir à flot l’exploitation familiale.

Incarné par Guillaume Canet dans « Au nom de la terre », le père d’Edouard Bergeon se confronte au grand-père, hostile aux agrandissements de la ferme bien qu’il ait le premier suivi la course aux rendements.

Alors que l’écologie trône au centre des préoccupations, le réalisateur s’adresse aux consommateurs pour accompagner la transition des agriculteurs vers des pratiques plus respectueuses de la nature et des hommes.

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Pour Pierre Pézerat, amiante et pesticides, même combat

Pierre Pézerat présente son film documentaire « Les Sentinelles » (2017) disponible en DVD depuis le 16 février 2019, date anniversaire des dix ans de la mort d’Henri Pézerat.

Le père du réalisateur a découvert le caractère cancérigène de l’amiante en 1973 puis animé le Comité anti-amiante de Jussieu. Son activité scientifique et militante a contribué à faire interdire ce silicate en 1997. L’association qui porte son nom défend aussi bien les victimes de l’amiante que celles du nucléaire ou des pesticides de synthèse.

Dans les années 1990, l’amiante devient un enjeu de santé publique ainsi qu’un synonyme de scandale. Des travailleurs meurent de cancers de la plèvre à cause d’un maux identifié vingt ans plus tôt par le toxicologue Henri Pézerat. Il s’était rendu dans l’usine de filage et de tissage d’amiante Amisol, alors en grève, à Clermont-Ferrand, pour alerter les ouvrières et les ouvriers.

Pierre Pézerat a retrouvé Josette Roudaire, qui avait ouvert les portes de l’usine à son père. Le début d’un très long combat pour accompagner les victimes qu’il met en parallèle avec celui de Paul François, un agriculteur intoxiqué par un pesticide produit par Monsanto ainsi que les ex-ouvriers agricoles de Nutréa-Triskalia, devenus hyper-sensibles aux produits chimiques multiples.

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L’Émission Dessinée : le rendez-vous manqué ?

Point de vue – On l’attendait depuis plusieurs semaines cet événement. Pensez donc, « La Revue Dessinée », qui a su se creuser une niche au milieu de la jungle des kiosques à journaux en proposant un défi éditorial audacieux dans un format soigné, et qui se lance à la télé ! Ça promettait !

Me voilà donc à l’heure au rendez-vous. Et avec un lancement pareil, le présentateur Ziad Maalouf semblait avoir donné le la d’une sacrée émission. (voir en intégralité)

L’Émission Dessinée c’est une production indépendante et libre, c’est une œuvre sonore, graphique, visuelle, toutes les séquences seront dessinées et mises en musique.

Inutile de s’attarder sur les flops, gros et petits, qui ont parsemé cette première émission, même s’ils ont commencé tôt : aucun applaudissement à la fin du chouette « générique » siffloté par Bernardo Cinquetti, pour accompagner à la guitare les traits de crayon de Thibaut Soulcié qui proposait une introduction dessinée de cette soirée.

Premier flop à deux minutes du lancement donc, auquel s’enchaîneront les mauvais réglages sons des invités, dont chaque début d’intervention s’est quasi systématiquement retrouvé étouffé.

Face à ces embûches, le choix du direct n’était peut-être pas le plus judicieux (d’autant que la pause de 40 minutes nous a laissé pauvres ères, désœuvrés derrière notre écran alors la prochaine fois que vous voulez boire une tisane ou faire pipi ça peut être sympa de penser à un vide un peu plus récréatif pour nous aussi).

Dommage enfin que l’affichage des noms ait été plusieurs fois erronés face aux visages correspondants. Tout ça ça peut arriver, et ça donnait même un petit air « les copains parlent aux copains ».

Mais voilà, justement, les auteurs présents sur le plateau de L’Émission Dessinée, (alias les locaux de la rédaction de la revue éponyme), semblaient endormis. Peu enthousiastes ou stressés. Bref, la fan de la première heure que je suis attendais un peu plus d’enthousiasme de certains de ses auteurs préférés.

Le grand entretien avec René Pétillon, pas très anglé, a suffi pour plomber définitivement l’ambiance. Il y pouvait rien René, mais 48 minutes a papoter, sans même un verre de bière pour dérider l’assemblée, ça fait long la parlote.

On aurait préféré que ce grand entretien le soit un peu moins (grand) ou qu’il soit découpé et proposé en guise de fil rouge de l’émission. Idem pour les différentes rubriques. Agencées autrement, elles auraient pu donner plus de rythme.

Tac au tac, La tête à tuto, Plans larges

Les bons points reviennent au Tac au tac, proposé en hommage à Jean Frapat, son légendaire producteur décédé le 8 octobre. En croisant les doigts pour que, hommage ou pas, cette capsule continue et se développe dans les prochaines émissions dessinées !

Un tonnerre d’applaudissements aussi à la Tête à tuto, des leçons rigolotes où Loïc Sécheresse et Thibault Soulcié expliquent chacun LEUR façon de dessiner Jean-François Copé… « Mal dessiné, on dirait Gargamel », et celle de Manuel Valls « quid de son oreille gauche ou droite penche le plus ?! »…

Bonne surprise également avec les Plans larges : trois débats pour présenter trois grands reportages parus dans le dernier et l’avant-dernier numéro de la Revue.

Le premier concernait l’enquête de Catherine Le Gall et Benjamin Adam sur les fameux emprunts toxiques qui font des ravages parmi les collectivités locales. Au cours du visionnage en direct, sur Youtube, un spectateur a exprimé dans le forum en ligne, son regret que la journaliste menant le débat n’ait pas demandé au duo comment ils avaient travaillé à la vulgarisation des termes techniques.

La Revue Dessinée est suffisamment innovante avec son parti pris « d’informer autrement » qu’il est dommage d’utiliser le sujet de l’enquête comme prétexte à l’organisation d’un débat qui creuse finalement peu le travail de narration.

« Un lien doit s’établir, avec la volonté d’associer le meilleur des deux rives où chacun joue sa partition : le journaliste, avec sa rigueur de l’info, la qualité de ses sources ; le dessinateur avec la puissance de son imaginaire, sa poésie, ses ficelles narratives », précise l’éditorial du numéro 5 de La Revue Dessinée. C’est cette danse à deux qu’a bien réussi à présenter le deuxième Plan large de la soirée, concernant le long travail d’enquête de Benoît Collombat et Étienne Davodeau sur l’assassinat du Juge Renaud (abonnés Le Monde).

C’est pas le tout de vous voir parler et dessiner, chers auteurs adorés, on veut que vous nous ouvriez la porte de ce laboratoire enthousiasmant qu’est La Revue Dessinée !

Et toi ? T’en as pensé quoi ?

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Les Expériences spectaculaires du lutin lunettes

Si le lutin lunettes donne à penser sans avoir l’air d’y toucher, c’est sans doute parce que son créateur l’a nourri d’une philosophie bien à lui.

J’ai découvert le lutin lunettes aka Pascal Lascrompe à l’occasion des journées grand public de Faîtes l’énergie, le festival quimpérois de la transition énergétique. Il y présentait les Expériences spectaculaires, qui met en scène les questionnements d’Orphise, fils d’Orphucius, comte d’Orphée, de la planète Orphèse du nuage d’Oort, arrivé sur terre sur le dos d’une comète.

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« Hmm, ça sent l’intelligence par ici. »

Quand il était petit, Orphise voulait impressionner son père. C’est ainsi qu’il a commencé à essayer de comprendre, en le regardant cuisiner, comment le blanc d’œuf gluant pouvait devenir ferme.

« Le lutin lunettes est un spécialiste des sciences amusantes. Les notions que j’aborde dans le spectacle relèvent de la physique et de la chimie, mais on s’en fiche. L’important, c’est que nous essayons d’observer le monde et de le comprendre. Plus important encore, on ne rate jamais. Il se trouve que par moments, le résultat des expériences n’est pas celui que l’on attendait. »

lutinlunettes5Pascal Lascrompe, auteur et interprète du spectacle, s’est lancé dans ce nouveau personnage en juillet 2010 avec le soutien du programme Réussite éducative (Rennes) et du collectif ABBP35. Il a créé à cette occasion la Compagnie du nuage d’Oort.

« Je suis comédien, sorti du conservatoire de Rennes en 2003, à la fois fan d’astronomie et de science-fiction. J’ai rencontré les Petits débrouillards (association d’éducation populaire à la science) et ça a été le déclic. Depuis, j’allie mes passions, et c’est là que je m’éclate le plus. »

C’est ainsi que l’on découvre que ce que l’on pensait être de l’eau n’en est pas et qu’il convient de se méfier des apparences et des certitudes. On assiste au gonflement inversé d’un ballon à l’intérieur d’une bouteille et finalement Roméo séduira Juliette en la surprenant et en la faisant rire plutôt que par ses longues tirades enflammées.

Le lutin lunettes essaie d'aider Roméo à séduire Juliette avec une tirade enflammée.
Le lutin lunettes essaie d’aider Roméo à séduire Juliette avec une tirade enflammée.

Les Défis et énigmes (le premier spectacle qui mettait en scène le lutin lunettes) proposait des ateliers parents-enfants. Les Expériences spectaculaires relèvent d’une forme théâtrale plus classique même si la mise en scène offre de grands espaces à l’intervention du public.

Quels sont les avantages du format spectacle par rapport aux ateliers ?

« Les gens sont “protégés”, je leur donne la possibilité de rester passifs s’ils le souhaitent. Et en fait, ils ne le restent jamais. (Je confirme !) Le décor, le personnage, les costumes mettent du rêve, donnent envie, stimulent l’imagination. »

Est-ce bien de l'eau ? Crédit photo : un illustre inconnu du public avec l'aimable autorisation du propriétaire de l'appareil, Babas Babakwanza, tous droits réservés.
Est-ce bien de l’eau ? Crédit photo : un illustre inconnu du public avec l’aimable autorisation du propriétaire de l’appareil, Babas Babakwanza, tous droits réservés.

Les Expériences spectaculaires ne sont ni un spectacle de magie – ici on parle de froid, de chaud, d’air – ni un cours théorique. Même si la loi des gaz parfaits rode, elle ne se montre jamais.

« Je le répète, on ne se trompe jamais. Le “nul” n’existe pas. Quand on tente quelque chose, et bien parfois cela fonctionne comme on l’espérait, et parfois non. Dans ce cas, cela mène simplement ailleurs que là où on le voulait, mais ça n’a pas d’importance. Par exemple hier, avant le spectacle, le décor s’est effondré, ça a cassé du matériel. Très bien, je prends ça comme une expérience. Elle m’a appris que je dois toujours veiller à avoir un lest. »

Selon Pascal Lascrompe, il est possible de divertir de plusieurs manières. Dans tous les cas, son rôle consiste à faire plaisir aux gens.

Stimuler l'imagination, donner envie. Crédit photo : Babas Babakwanza, avec son aimable autorisation, tous droits réservés.
Stimuler l’imagination, donner envie. Crédit photo : Babas Babakwanza, avec son aimable autorisation, tous droits réservés.

Le divertissement que je propose s’appuie sur le questionnement. Certains acteurs et metteurs en scène considèrent que dès lors que cela fait réfléchir, on sort du divertissement pour entrer dans l’art. Je ne suis pas d’accord. Pour moi c’est en s’amusant qu’on apprend des choses. La vie est un divertissement (mine sceptique de ma part). Oui parfois il y a des obstacles. Mais ça n’est pas contraignant, ça prend juste un peu plus de temps, ça demande juste un peu plus de réflexion que ce qu’on pensait initialement. C’est aussi ce que j’essaie de transmettre au public dans le spectacle, parfois pour répondre à une question, cela prend du temps et il faut être patient.”

Quoi qu’il en soit, les spectateurs petits et grands, ainsi que ma personne, remercions chaleureusement le lutin lunettes pour ce bon moment passé en sa compagnie venue des étoiles.

Disclaimer

Pascal et moi faisons partie de la même association. Nous nous étions déjà rencontrés une fois avant que nous prenions connaissance de nos activités respectives. Je précise qu’il ne m’a pas demandé de réaliser cet article, c’est moi qui le lui ai proposé après avoir vu la première représentation.

Crédit photos : prises de vue réalisées à Faîtes l’énergie Quimper 2014. Sauf mention contraire : Geneviève Canivenc, licence CC-BY-NC-ND.

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28 jours plus tard (ou presque)

Reportage – Vous faites quoi demain à 16h ?

Si l’on vient à vous poser la question un de ces jours, lors d’un festival ou au beau milieu de la rue, sous le zénith ou dans la pénombre des projecteurs d’une scène en plein air… Peut-être faudra-t’il vous méfier et surtout ne pas répondre illico… rien, pourquoi ?

Lendemain. 22 août. Lieu de rendez-vous : la caserne Niel à Bordeaux. Cette ancienne manufacture a vu débarquer il y a un an, une épicerie bio, un restaurant bobo, des espaces de travail et puis, vu qu’il restait encore de la place, quelques-uns des bâtiments en friche (ou presque) le sont restés. Sans doute le lieu de tournage, me suis-je dit.

Crédit photo : Zombie Walk Bordeaux
Crédit photo : Zombie Walk Bordeaux

À l’entrée de ce royaume de la récup’, un jeune enfoncé dans un canap’ planté au pied du bâtiment principal nous lance, sérieux, « Bienvenue à U Mad Bro production ». Euuuh, merci.

La signature du papier autorisant l’exploitation de mon image commence à m’inquiéter… J’étais censée « filer un coup de main pour le maquillage », m’avait dit un certain Thomas, la veille au soir. Il est en réalité le producteur du film. Celui-ci arrive la bouche en cœur, lunettes de soleil vissées sur le nez et claque la bise à toutes ses proies, les figurants recrutés de ci, de là.

156061_883578505005275_5725229809439599138_nSi la trentaine de badauds qui poireaute n’a pas l’air plus au courant que nous, ce n’est pas un hasard. « À part le résumé qu’on a posté sur le site, on a fait exprès de maintenir le suspense », se félicite Oliver Henchley, le réalisateur. « Ça fait tellement longtemps que je travaille là-dessus que je n’ai pas envie que ça fuite, explique le jeune homme à catogan. C’est pas un Tarantino mais quand même… il faut vraiment que le public ait cette surprise. »

Quid du scénario, donc ? Oliver se lance, prudemment, pour qu’une phrase n’en n’entraîne pas trop vite une autre, et que j’en apprenne trop. On ne sait jamais, il pourrait se venger en me faisant farder en zombie en phase terminale de décomposition…

Notre web-série va se structurer autour d’un journal d’informations diffusé quelque part sur la Ferre (c’est comme la Terre, mais avec un F). Sur cette planète, les zombies sont apparus pour la première fois il y a 400 ans, alors les gens vivent avec eux. À tel point que, quand ils en croisent un, ils font des selfies ensemble ! Les zombies font partie du paysage, et donc de l’actu, on les retrouve au fil des sketchs lancés sous forme de reportages. – Ah tiens, voilà le héros, annonce soudain Oliver.

Qui a pris le flacon de sang ?!

Bastian Paumier, alias George Putain, arrive en treillis, le sourire en coin. Il est aux zombies ce que Bear Grylls est à la nature. Il a son émission, Man VS Zombie, proposée par la très réputée chaîne « U Mad Bro » (du moins sur la Ferre).

Pas le temps d’en apprendre plus, mon heure a sonné, il est temps de se faire grimer. « Est-ce que je pourrais donner l’impression de m’être pris une balle dans le nez s’il vous plaît ? », « Qui a pris le flacon de sang ? », « On dirait que j’ai les entrailles qui sortent, géniaaaal »… Mon manque d’expertise ès zombie commence à se faire sentir, je me contente donc de m’asseoir et d’enlever mes lunettes.

KlerviC’est froid, ça coule, ça chatouille, c’est mou. Je n’aurais pas cru que mon premier passage entre les mains d’une maquilleuse professionnelle consisterait en ça, mais le résultat est pas mal. À la sortie un monsieur me propose un peu plus de sang au chocolat, parce que j’ai l’air un peu trop « propre ».

Maintenant, en plus, ça colle.

L’inconnu, qui vient également de m’encourager à m’ébouriffer un peu les cheveux pour plus d’authenticité, c’est Zombie One, mais on peut aussi l’appeler Franck Bonhomme. Pour l’heure, il est encore en civil mais, dans le 1er épisode, c’est lui qui incarnera le plus vieux zombie de la Ferre, une star planétaire là-bas. Le cinquantenaire n’en n’est pas à son coup d’essai, il préside la Zombie Walk de Bordeaux, une association qui organise chaque année, à l’automne, une farandole de morts-vivants. Elle fédère aussi toutes les initiatives sur le sujet et, apparemment, il y en a beaucoup. « Films, BD, romans… on met les gens en relation et on s’amuse. »

Lui est tombé dedans ado, bravant les interdits avec ses copains en visionnant le film de George Romero, alors non autorisé à la vente, Dawn Of The dead. « On avait réussi à récupérer le film sur une VHS, on s’était tous planqués dans une petite chambre pour le visionner de nuit, imaginez l’ambiance ! »

Depuis, Franck Bonhomme n’a jamais cessé de s’intéresser aux zombies, bien qu’il y ait eu un long passage à vide dans la cinématographie du genre. « Heureusement, Dany Boyle a fait le revival avec »

Même si 25 ans le sépare de la moyenne des figurants, Zombie One s’en fout. « Il faut avoir l’esprit ouvert pour s’intéresser à ça, ça suffit. Chacun peut y projeter ses interprétations. »

Le zombie est là pour incarner concrètement l’image de la menace, où l’homme a peur de sa propre extinction

Le zombie incarnerait-il les inquiétudes de notre siècle ? On peut critiquer la société de consommation, les crises financières ou politiques (François Hollande bute du zombie dans la BD Zombies Néchronologies), le business des laboratoires pharmaceutiques (28 jours plus tard, Resident Evil), la peur de l’Autre ou la crainte d’une invasion d’une autre planète (Dead Space).

Oliver Henchley donne les dernières consignes avant le tournage.
Oliver Henchley donne les dernières consignes avant le tournage.

Avec tout ça, l’heure a sonné. La trentaine de zombies se rassemble devant une porte de hangar. Notre rôle ? Ouvrir la porte, vite, mais pas trop rapidement quand même, et se précipiter tour à tour sur les deux types en tenue d’air soft puis sur la speakerine en ayant l’air d’avoir faim.

Oliver résume : “Vous devez juste avoir les yeux dans le vide, la tête lourde, les bras ballants, être en quête de nourriture, mais pas trop efficacement quand même vu que vous êtes morts… Des questions ?” C’est parti. Mes jambes sont trop raides, j’essaye de me cacher un peu derrière un grand costaud à lunettes dont le maquillage rappelle les séances trash de prévention routière à l’école.

Je tente des trucs, un peu trop molle, un peu trop motivée à aller croquer un mollet, je mixe la crise d’épilepsie et des crampes de gastro avec une situation d’ébriété avancée. Au bout de quatre ou cinq prises ça commence à venir, même si j’ai encore un peu de mal à coordonner la non-coordination de mes membres. Et tandis que je regrette d’avoir lu plutôt que visionné la série Walking Dead et d’avoir uniquement vu le film le moins crédible en la matière (Shaun Of The Dead), la caméra tourne.

Les scènes s’enchaînent dans une ambiance potache. À force de se pousser pour manger de la viande humaine, les figurants deviennent de plus en plus crades… et on s’arrose de Nesquik entre les prises en commençant à avoir faim, pour de vrai cette fois.

Au bout de cinq heures, c’est fini, ne reste plus qu’à compter les jours avant de voir le résultat.

Verdict ici. Qui sait, j’ai peut-être de l’avenir dans le métier, en plus niveau texte c’est plutôt simple… Gaaaaaaaaa.

Crédits photo : Romain Peyrard

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Les agents d’artistes deviennent des truands

La photographie de concert marche sur la tête. Les agents d’artistes se croient tout permis. Je ne publierai aucune (autre) photo du festival Panoramas.

Et ça me donne un excellent prétexte pour gueuler un bon coup contre des pratiques en coulisses qui deviennent détestables.

Le petit monde de la photographie de concert est très secoué par la révolution numérique. Les photographes professionnels sont en voie d’extinction, conséquence logique mais non moins regrettable de la démocratisation des appareils reflex et de la multiplication des blogs et webzines accrédités pour chaque festival (désolé). Pourtant, s’il y a bien une cause contre laquelle les photographes professionnels, amateurs et les photo-journalistes (comme nous) doivent se liguer, c’est la généralisation des contrats.

Je ne fréquente les fosses de festival que depuis 2010. Je n’ai pas beaucoup de recul, mais je constate déjà une accélération des dérives. De plus en plus d’artistes refusent la présence de photographes en front de scène pendant leur concert. Que les groupes aient quelques exigences quant à leur mise en scène, soit. Qu’ils empêchent les reporters de rendre compte des événements, non.

Pendant longtemps, la norme était d’accepter les photographes pendant les trois premiers morceaux.

La pratique est déjà aberrante, car globalement il ne se passe rien pendant le premier quart-d’heure. Les chanteurs attendent un peu pour faire tomber la chemise. Amassés dans un périmètre très réduit, en contre-plongée par rapport à la scène, nous avons ont peu de chance de briller par notre originalité. Je l’ai vécu, pendant les festivals, la succession des concerts nous oblige à courir en permanence pour accéder aux sacro-saintes trois premières chansons.

Les conditions de travail étaient déjà compliquées, mais elles se compliquent drastiquement.

La confiance est rompue

Les agents d’artistes réclament désormais que les photographes signent un contrat avant d’accéder aux fosses.En d’autres termes, nous devrions accepter d’expédier nos clichés pour un accord préalable avant publication (lire les consignes ci-dessous, très explicites).

C’est une forme d’extorsion, et je pèse mes mots. Les agents voudraient être juges et parties. Ces contrats contreviennent à la liberté de la presse et il est grand temps de remettre les choses en place. Ne pas les signer est une question d’éthique, un devoir pour ne pas saborder la profession.

Le seul contrat qui doit exister, il n’est pas écrit, il est moral, c’est la confiance mutuelle entre les professionnels. La confiance dans l’honnêteté d’autrui, qui n’empêche pas pour autant l’expression d’opinions négatives. C’est évidemment cette marge qui déplaît aux communicants les plus zélés.

Si nous voulons photographier les pieds d’un DJ, s’il nous prend l’envie de publier la grimace d’un guitariste, si nous voyons un intérêt à montrer le regard embué d’un rappeur, nous devons avoir l’entière liberté de le faire. Sans passer sous les fourches caudines de la censure, cela va de soi ! Peut-être qu’à force de renier les droits des photographes, les agents se sont sentis pousser des ailes. Ne comptez pas sur nous pour accepter ce jeu plus longtemps.

Une pratique illégale

Ces contrats sont illégaux. Une cession de droit ne peut pas être concrétisée avant la réalisation des clichés, selon l’article L131-1 du code de la propriété intellectuelle.

J’aurais donc pu sans crainte balader mon boîtier ce week-end à Panoramas. Mais j’évite de parapher n’importe quel document et tout simplement de rentrer dans un jeu de dupes. Je préfère mettre les choses au point. Participer serait cautionner, or nous devons mettre le holà.

Comme il ne suffirait pas de taper à l’aveugle contre tous les agents, voici la liste des équipes qui ont mené la guerre aux photographes et vidéastes au festival Panoramas : Rone, S-Crew, Bakermat, Klingande, Kölsch, Amide Edge & Dance, Cleavage, Pan-Pot, Sarah W Papsun, Claptone, The Popopopops, Danton Eeprom.

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Notez la mention “pour une utilisation strictement à titre promotionnel” de S-Crew, des rappeurs qui connaissent bien les lois du biz. Réduire la presse à un support promotionnel, c’est évidemment tentant vu ses perpétuelles compromissions, mais un tel aveu dénote surtout une belle étroitesse d’esprit. Oui messieurs, parfois, un article peut être critique et la photographie l’illustrer.

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Nous ne travaillons pas pour vous, mais pour nos lecteurs.

J’accorde le bénéfice du doute aux artistes qui ont peut-être d’autres chats à fouetter. C’est pour ça que j’adresse mon billet à leurs agents. Je ne les excuse pas pour autant d’accepter ce système qui finira par leur nuire, quand plus personne ne voudra relayer leurs performances.

Pour prévenir toute mauvaise interprétation de mes propos,

  • je précise que les organisateurs du festival Panoramas sont également victimes de ces méthodes.
  • je n’aborde ici que la question de la fosse, l’espace situé entre la scène et le public, régit par des règles spéciales pour ne nuire ni aux artistes ni aux spectateurs (“no flash”). De nombreux festivals – ou en tout cas de nombreux agents de sécurité – oublient que les photo-reporters (journalistes) ont le droit de prendre des photos à n’importe quel moment de n’importe quel concert, depuis le public. “La jurisprudence considère que les artistes, dans le cadre de leurs activités professionnelles, donnent leur autorisation tacite pour la diffusion. Cette autorisation est néanmoins limitée à des activités artistiques ou d’information de la part du photographe”, pour reprendre les mots de Clovis Gauzy sur son blog.

Disclaimer

J’ai couvert une dizaine de festivals bretons entre 2010 et 2012 en tant qu’accrédité presse, sans être détenteur de la carte de presse, pour des médias associatifs. J’ai de nouveau été accrédité à plusieurs festivals depuis 2013, en possédant cette fois une carte de presse “pigiste”, pour publier mes photos exclusivement sur “La Déviation”, site qui n’a pas le statut d’entreprise de presse, bien qu’il poursuive les mêmes objectifs d’information. Je n’ai jamais cédé mes photos à des tiers et je n’ai tout simplement jamais tiré de revenu de cette activité. Mes photos n’ont d’ailleurs pas de valeur commerciale et je pense ainsi ne pas concurrencer les photographes professionnels. Notez que la carte de presse n’est pas obligatoire pour pratiquer la profession de journaliste.

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12 avril, jour du marronnier dans les JT ?

Dataviz – 12 avril 1961, Youri Gagarine devient le premier homme à voyager dans l’espace. Depuis, que s’est-il passé à la Saint-Jules, jour du marronnier dans le calendier républicain ? Analyse des JT du 12 avril de 1970 à 2010, grâce aux archives de l’Ina.

Les journaux télévisés

Disclaimer

Ce travail ne constitue pas une enquête scientifique. Les données collectées pour cette analyse de contenu ne représentent pas un corpus assez important pour en tirer des conclusions. Par ailleurs, les éditions de 1972 et 1975 ne figurent pas dans les résultats car il n’a pas été mis en ligne par l’Ina.
De 1970 à 1973, il s’agit des JT de 13 h de la Première chaîne de l’ORTF. En 1974, c’est le JT de 20 h de la Première chaîne de l’ORTF. De 1976 à 1978, ce sont des JT de 20 h d’Antenne 2 (ORTF). En 1979, il s’agit du JT de 20 h de TF1 (ORTF). De 1980 à 1984, il s’agit des JT de 20 h d’Antenne 2. En 1985, c’est le Soir 3 d’FR3 qui est pris en compte. De 1986 à 1989, ce sont de nouveau les JT de 20 h d’Antenne 2. De 1990 à 1992, on utilise le 19/20 d’FR3. Enfin, de 1993 à 2010 ce sont les JT de 20 h de France 2 qui sont pris comme référence.

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Diapéro, l’évangile du diaporama sonore

Reportage – Mardi 26 février avait lieu le cinquième rendez-vous Diapéro, à Paris. Organisée par les journalistes Gilles Donada, Marianne Rigaux et Paul-Alexis Bernard, la rencontre trimestrielle vise à réunir les adeptes du diaporama sonore. À l’heure ou le journalisme web est en constante évolution, quelle place donner à ce format ?

Chez “La Déviation”, aborder la question du diaporama sonore n’est pas anodin. Pour une raison simple : nous évoluons sur le web. Pour des raisons moins simples : nous nous efforçons d’être les producteurs des contenus présents sur ce site, nous cherchons à sortir du temps journalistique de plus en plus rapide et enfin nous nous questionnons sur les formats journalistiques qu’ouvre le web.

D’après Gilles Donada, en charge du développement éditorial de l’audience digitale web chrétien à Bayard, le diaporama sonore répond en partie à nos questionnements de jeunes journalistes. « Contemplatif et informatif », le format est «  plus puissant en terme de narration que les vidéos qu’on trouve sur le web et à la télé ».

Par l’addition de ces deux moyens d’expression, par un travail judicieux, une sorte de contre-point, de dialogue, de danse même… Il y avait une forme d’expression que je n’avais jamais vu jusque-là.

Gilles Donada découvre le diaporama sonore lorsqu’il est, de 2009 à 2012, responsable du site Pelerin.com. Les photo-reporters du média viennent lui proposer de créer une extension web à leurs reportages diffusés sur la version papier. « Le son apporte du relief », explique-t-il.

Ce sont ces premières rencontres qui poussent Gilles Donada à collaborer avec le service iconographique du magazine.

Valoriser le photo-reportage

Aujourd’hui il œuvre à « l’évangélisation » du format au travers de ces rendez-vous trimestriels. Le temps d’une soirée, les Diapéro permettent de découvrir, de visualiser des diaposons, d’échanger entre journalistes, photographes, réalisateurs, diffuseurs, producteurs et curieux.

Échanger, c’est ce que j’ai fait avec Gilles Donada qui se trouve à l’autre bout de mon micro.

Et alors ? Ce cinquième diapéro ?

Le début des festivités annonçait 19 h. Mais pour ce cinquième rendez-vous, l’évènement se déroule dans un quatrième lieu.

Après le Café de Paris et le Comptoir Général, c’est maintenant au tour des Voûtes, rue des Frigos, à Paris, de passer le test de la qualité visuelle et sonore et de la convivialité. Des critères essentiels pour Marianne Rigaux, journaliste et membre très active des Diapéro.

Les portes n’ouvrent pourtant pas avant 20 h. « On a l’image mais pas de son », entend-on. Le message est clair. Direction le bar pour un moment de convivialité.

Il n’y a pas trop le choix de la boisson, mais le lieu sous les voûtes est chaleureux. J’en profite pour discuter avec un jeune journaliste. Il a entendu parler des Diapéro car il vient juste de suivre une formation dirigée par Marianne Rigaux. Panne de courant. Décidément.

Une fois tous installés dans la salle entre les sièges de cinéma et les chaises de campeur, la rencontre débute avec la réalisation d’une journaliste de France Info. Étonnement ! Radio France investirait le diaporama sonore ?

Mon veau s'appelle Hashtag - Crédits France Info - La Déviation

En réalité, la proposition de Clara Beaudoux tient plus de la Pom (comprendre petite oeuvre multimédia). L’équipe des diapéros ne souhaite pas se restreindre au rendez-vous stricte autour du diaporama sonore.

D’ailleurs, les réalisations se permettent très souvent de courts extraits vidéos. Et de toute évidence, le web casse les formats. Les règles sont souvent faites pour ne pas être respectées. C’est dans cet esprit que les trois organisateurs déclarent Mon veau s’appelle hashtag comme étant leur coup de cœur du trimestre.

 Des photo-reporters, on n’a pas ça en stock.

Radio France va-t-elle développer ce genre de format ?

Réponse en demi-teinte. Et c’est Xavier Meunier qui s’y colle. En tant que rédacteur en chef des nouveaux médias à Radio France, il répond en bon communicant.

Après avoir dispersé quelques mots-clés pour rappeler la équalité exceptionnelle de production du groupe Radio Franceé, il faut bien comprendre que les budgets ne sont pas à destination du web.

Cependant, il rappelle, à raison, que le web est un grand chantier qu’il faut investir. Seulement, pour les quelques pigistes qui espèrent collaborer avec la radio publique, la passerelle entre la FM et la toile semble destinée à l’équipe interne.

Ainsi, pour le travail photographique, c’est Clara Beaudoux elle-même qui s’en charge. Pourquoi ? « Des photo-reporters, on n’a pas ça en stock », répond Xavier Meunier.

Journaliste ou réalisateur ?

Entre en scène, Alexandre Marionneau, qui est conseiller documentaire à France 2. Il coordonne notamment le concours de courts-métrages documentaires Infracourts, diffusés dans le cadre de l’émission Infrarouge. Lors de la première édition du concours, qui s’est achevée début janvier, l’équipe de Diapéro avait largement mobilisé ses troupes.

Le résultat est convaincant, au point que le documentaire Revivre de Christophe Siebert et Sonia Winter se voit sélectionné parmi les dix lauréats. S’il est difficile de remettre en cause le travail des deux réalisateurs, l’objet interroge sur le bon équilibre entre le travail sonore et visuel.

Au fil des projections, il semble que le diaporama sonore soit avant tout une affaire de photographes.

L’intervention de Christophe Siebert, photographe, vient confirmer cette impression. Les témoignages sont difficilement audibles, le son n’est pas propre, alors que les images sont parfaitement maîtrisées.

Marianne Rigaux commence d’ailleurs par lui demander « Comment avez-vous effectué votre captation sonore ? Vous étiez loin, non ? ». La réponse est simple : « J’ai pris le son avec mon deuxième appareil photo. »

D’après Alexandre Marionneau, la réalisation a plu au jury car il traitait le sujet de la maladie d’une façon différente et positive.

Pour l’équipe de Diapéro, savoir que Revivre est diffusé sur France 2 est une victoire. Cela signifie que l’image fixe a aussi sa place et son intérêt à la télévision.

Ouvert à toutes propositions

La dernière partie de soirée s’ouvre sur les Diap’open. Le concept est simple. Chacun est libre d’envoyer ses réalisations auprès de l’équipe qui se chargera d’effectuer une sélection. Ce soir-là, sept diaposons se retrouvent diffusés.

La soirée ne manque pas de rythme. Les réalisations font en général trois ou quatre minutes et sont entrecoupées de courtes interventions, de l’équipe organisatrice ou des journalistes-réalisateurs.

S’enchaînent alors les réalisations avant d’arriver à la dernière étape de ce diapéro : la rencontre. Convivialité oblige, le bar est présent et les lumières sont tamisées. Producteurs, diffuseurs et journalistes peuvent alors profiter de cet instant pour étoffer leur carnet d’adresses.

D’ici là, les diaporamas sonores diffusés sont visible sur Vimeo, car il faudra attendre juin pour le Diapéro #6. Les Voûtes semblent parfaites. Et s’il fait beau, le jardin sera investi.

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Cinéma : Qui a peur de Vagina Wolf ?

Interview – À 40 ans passés, Anna Margarita Albelo endosse les casquettes de réalisatrice, DJ, journaliste et militante féministe et LGBT. Son premier long-métrage de fiction “Qui a peur de Vagina Wolf ?” (sortie en salles le 19 mars) n’est pas seulement le remake lesbien de la pièce de théâtre d’Edward Albee “Who’s afraid of Virginia Woolf ?”, c’est aussi et avant tout l’histoire d’une réalisatrice vivant dans le garage d’une amie qui, le jour de ses 40 ans, n’a toujours pas réalisé le film dont elle rêvait.

Ce dimanche n’aura pas vu le soleil sans raison. Dans les couloirs des cinémas Studios de Tours, le sourire d’Anna Margarita Albelo attire toutes les bonnes humeurs. Elle est venue aujourd’hui présenter son premier long-métrage de fiction au festival Désir Désirs.

Du côté de l’organisation du festival, c’est un véritable bonheur d’accueillir un film LGBT qui respire autant de joie. Un film à l’image de sa réalisatrice. Je suis allé à sa rencontre.

La Déviation – « Qui a peur de Vagina Wolf ? » promet un film lesbien qui ne l’est finalement pas tant que ça. Pourquoi est-il aussi facile de se reconnaître dans Vagina Wolf ?

Anna Margarita Albelo – C’est un film à double tranchant. Je me suis demandée comment écrire un film qui parle à tous. Et je crois que j’ai réussi avec mon film à rester fidèle aux différentes identités de ces femmes lesbiennes et à offrir ce film au public le plus large possible.

Si tu veux, aujourd’hui, pour une réalisatrice comme moi, il s’agit de trouver sa place devant le grand public et de trouver les financements pour diffuser le film en salle et à la télévision. Toucher plus de monde, c’est aussi toucher des jeunes excentrés, en dehors des grandes villes ou de la culture.

J’ai produit ce film moi-même, en coproduction avec un producteur français. Plus de 400 personnes ont participé au financement en apportant 27.000 $. La production s’est faite de manière hybride. Pour moi c’est énorme, car ça veut dire que tous ces gens ont cru en mon scénario et en mon travail de réalisatrice. Même le simple fait d’être aujourd’hui en France est incroyable. Je n’aurais jamais pensé être distribuée. Mon plus grand désir, c’est de continuer à être intègre tout en m’adressant au grand public.

Le film met en scène deux producteurs prêts à donner 4.000 $ pour votre film avec quelques réserves : le film doit être sexy.

L’un des problèmes avec le cinéma lesbien, c’est qu’en général c’est un cinéma très sexy qui excite les hommes hétérosexuels… entre guillemets hein ! Si tu fais un film lesbien et qu’il n’y a pas de scène de cul et de belles actrices sexys, c’est difficile de trouver de l’argent. Pourtant il faut soutenir le cinéma.

Je crois qu’en France, on a très bien compris qu’il fallait soutenir le cinéma d’art et essai indépendant. Si le Centre national du cinéma ne donnait pas d’argent, on ne produirait qu’à peine 10 % de la production indépendante. Car qui donnerait cet argent ?

La sexualisation des gays et des lesbiennes est un problème.

En plus de ça, dans le film, les deux producteurs sont gays. Ce ne sont pas des hétéros qui disent “on veut voir des lesbiennes baiser”. Moi, ça fait quinze ans que je fais des films et que je parcoure les festivals LGBT. C’est la même réalité pour tous. C’est toujours du militantisme que de proposer un film lesbien intelligent qui ne parle pas forcément de cul.

Par exemple, La vie d’Adèle marche très bien et j’en suis contente car je pense que ça donne de la visibilité aux histoires lesbiennes, malgré le fait que ce film soit réalisé par un homme. Car le problème c’est que l’on regarde ces films avec ces scènes de sexe sans jamais penser que l’on pourrait faire sans. La sexualisation des gays et des lesbiennes est un problème. Je pense venir en complément à cette production. Je veux apporter un autre regard.

Est-ce que l’expérience de cette réalisatrice qui vit dans le garage d’une amie pour financer son film est l’expérience d’autres réalisateurs ?

Aux États-Unis, c’est l’histoire du cinéma indépendant depuis toujours. Même John Cassavetes a réalisé ses films indépendants de cette façon dans les années 1970 car Hollywood ne voulait pas produire ses films.

Oui, je suis le cliché de la réalisatrice qui vit dans un garage, qui veut faire un film et qui fait tout avec trois fois rien. Malgré le peu d’argent qu’on avait, on désirait tout de même une production de la plus grande qualité possible. Je ne voulais pas qu’on dise “Ah ! Encore un film lesbien fabriqué avec deux bouts de ficelle !” et que ça soit cet élément là qui nous ferme les portes de la distribution.

Avec mon équipe, qui n’est pas exclusivement lesbienne puisqu’il y a des gays et des hétéros, nous voulions montrer que ce n’est plus un cinéma ghetto. J’adore le cinéma underground, et j’en ai fait. Mais mon évolution, c’est d’accéder au grand public. Et surtout avec de l’humour. Parce que ça n’est pas toujours facile d’être lesbienne et féministe.

On a tous en tête le stéréotype de la nana pas drôle, agressive, méchante et bornée. Pourtant ça fait 25 ans que je suis féministe et lesbienne et que j’adore la comédie. J’utilise la comédie pour trouver une universalité entre nous. Ici il s’agit de l’histoire d’une nana qui veut faire un film. Mais ça aurait pu être l’histoire d’un mec qui veut construire un bateau ou d’une femme qui veut construire une maison pour sa famille. On a tous des buts et ce film démontre qu’on peut y arriver malgré un environnement hostile.

L’évolution du cinéma lesbien que vous évoquez, c’est la votre ou celle de la production lesbienne ?

Je pense qu’il y a de moins en moins de films lesbiens car il est de plus en plus difficile de trouver de l’argent. Et ça n’a jamais été facile. Ça, c’est juste la réalité. Mais on est plusieurs, à l’international, à continuer à faire des films et à y mêler nos vies… J’ai quand même vécu dans un garage.

L’intérêt, c’est de continuer à communiquer avec le monde. Il y a énormément de gens qui n’ont pas fait leur coming-out. Et ce n’est qu’à la télévision ou dans le cinéma grand public qu’ils peuvent voir des tranches de culture gay ou lesbienne.

Si tu dis que tu es lesbienne, les gens pensent tout de suite à deux femmes en train de baiser.

Certaines personnes ont peur d’aller dans les festivals et librairies LGBT, ou tout simplement d’en parler autour d’eux. Et en même temps quand tu découvres ton homosexualité, les images que tu voies sont très sexualisées. Si tu dis que tu es lesbienne, les gens pensent tout de suite à deux femmes en train de baiser. Il faut s’approprier cette sexualisation des identités et proposer d’autres alternatives.

Quel regard portez-vous sur les dernières manifestations françaises autour des questions du genre ?

Je suis étonnée car lorsque j’ai fini l’université, j’ai immigré en France en 1993, et j’ai vécu ici pendant seize ans. Aux Etats-Unis, on associe la France aux droits de l’homme. On voit la France comme un pays avant-gardiste car il y a beaucoup d’artistes et de têtes pensantes en avance sur leur temps. Et en même temps il y a une culture très conservatrice.

Je n’avais pas imaginé qu’elle pourrait en arriver au point d’organiser les Manifs Pour Tous.

Du coup j’ai amené mon grand costume de vagin en France pour la sortie du film. Je vais manifester devant l’Assemblée nationale et devant le siège social du PS avec une pancarte et des slogans pour la PMA et tout simplement pour l’égalité.

La devise de la France, c’est tout de même Liberté, Égalité, Fraternité. Et tu te rends compte que certains ne comprennent pas ce qu’est l’égalité. Si tu commences à choisir qui est égal et qui ne l’est pas, ça n’est plus l’égalité. Je suis juste étonnée de voir que c’est en France qu’il y a ce débat et qu’il faut combattre des gens qui pensent que l’égalité est une histoire de sélection.

Qui a peur de Vagina Wolf, d’Anna Margarita Albelo, avec Anna Margarita Albelo, Guinevere Turner, Janina Gavankar, 1 h 24, Local Films, 2014.

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Dans les pas de Walter Mitty jusqu’en Islande

J’attendais La Vie rêvée de Walter Mitty avec tellement d’impatience que la bande originale et ses trésors nordiques n’avaient déjà plus aucun secret pour moi avant sa sortie en salles le 1er janvier. À la fois drôle et poétique, cette cinquième production de Ben Stiller est LA solution pour commencer 2014 du bon pied.

Walter Mitty (Ben Stiller) a une vie bien rangée. Voilà seize ans qu’il travaille pour le prestigieux magazine Life où il est responsable des archives photos. Salarié modeste et effacé, il n’a jamais trouvé le courage d’approcher sa collègue Cheryl (Kristen Wiig), pour qui il fond littéralement.

Sa plus grande réussite jusqu’à présent, c’est son amitié épistolaire avec Sean O’Connell (Sean Penn), un photographe mondialement connu. Il est son contact privilégié au sein du magazine et Sean a toujours loué le talent de Walter pour le traitement de ses photographies.

Dans les pas de Walter Mitty - La Déviation

Seulement un jour, tout bascule : Life cesse sa diffusion pour ne devenir qu’un site internet. Walter Mitty va alors se lancer dans la quête d’un cliché mystérieusement perdu, destiné à illustrer l’ultime couverture du journal. Lui qui a toujours réfréné ses envies d’aventures va devenir un héros digne des plus beaux reportages de Life. Finies “les déconnections” pendant lesquelles il se rêvait aventurier et super-héros. Place à la réalité. Et quelle merveilleuse réalité !

C’est sur les terres du Groenland, d’Islande et d’Afghanistan que Walter Mitty part à la recherche de Sean O’Connell. Je vous préviens, les paysages sont à tomber et vous donneront qu’une envie : remplir votre sac de 60 L (ou votre petite mallette) pour la première destination venue.

Les paysages présents à l’écran m’ont rappelé pourquoi je ne cesse de parler de ce pays avec une telle passion depuis plus de 6 ans. Seyðisfjörður, Grundarfjörður, Stykkishólmur… Toutes ces villes ont servi de décors grandeur nature pour accueillir le périple de Walter Mitty. Et quand Ben Stiller vous fait croire que Walter est au Groenland ou en Afghanistan, il n’en est rien, c’est toujours l’Islande qui crève l’écran avec la ville d’Höfn ou les sommets enneigés du parc national de Vatnajökull.

Dans les pas de Walter Mitty - La Déviation

Scénario, OK. Décors, OK. Humour, je ne reviendrai pas dessus, on peut compter sur le talent de Ben Stiller pour amuser la galerie.

Non, la cerise sur le gâteau c’est bien la bande originale du film.Personnellement, elle m’a captée de la première seconde à la dernière. Pêle-mêle, on retrouve les Islandais d’Of Monsters and Men, le groupe suédois Junip et leur chanteur José Gonzalez, mais aussi d’autres noms moins nordiques comme David Bowie, Rogue Wave, Rogue Valley.

L’une de mes scènes préférées restera sans doute le passage où l’on entend Wake Up d’Arcade Fire. Ce moment marque le saut de Walter Mitty vers de nouvelles aventures. Magique.

Donc si vous ne l’aviez pas encore compris, je vous encourage grandement à voir La Vie rêvée de Walter Mitty pour faire plus ample connaissance avec cet anti-héros parfait et irrésistible. Alors certes, on pourra reprocher à Ben Stiller de ne pas exploiter plus le côté psychologique de son personnage, mais la recette miracle fonctionne, on sort de la salle détendu, avec le sentiment d’avoir passé un très bon moment.

On reste dans la comédie légère, mais ce feel-good movie est une grande bouffée d’air frais dont je ne peux dire que du bien. Walter Mitty est incroyablement génial tout simplement.

La Vie Rêvée de Walter Mitty, de Ben Stiller, avec Ben Stiller, Kristen Wiig, Shirley MacLayne, 1 h 54, 20th Century Fox, 2014.

Bakpok - Blog de Justine Briot

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Jurés d’Infracourts : qu’est-ce qu’on attend ?

Et si nous nous prenions pour les jurés d’un prix cinématographique ? France Télévision et la Scam nous permettent cette expérience, grâce au concours de mini-documentaires vidéo Infracourts, pour lequel le public est appelé à voter. Nous relevons le défi.

Le comité de présélection a gardé 30 films parmi les 468 qui lui ont été adressés. Aujourd’hui, 28 restent en compétition. Tous doivent répondre à la problématique imposée : “qu’est-ce qu’on attend ?” et durer moins de 3 min 15.

Les internautes peuvent voter sur cette page jusqu’au 5 janvier pour décerner le prix du public. Le règlement indique que le lauréat recevra un contrat d’aide à l’écriture pour une forme documentaire et qu’il rencontrera des professionnels du documentaire.

Sylvain Ernault

J’ai regardé la totalité des films d’une traite, sans m’attarder ni sur le total des votes déjà attribués, ni sur les noms des auteurs et sans savoir à l’avance de quoi il en retournait.

Mon coup de cœur c’est La tente suspendue de Barthélémy Olivier. C’est le portrait de Kader, un sans-abris qui vit près de la Place de la République, à Paris, donc près du canal Saint-Martin, mais aussi du 4 étoiles Crowne Plaza.

Un bonnet vert vissé sur la tête, assis près de quelques journaux, Kader regarde les Parisiens passer, sans aigreur, a priori sans envie. Certains le saluent, discutent et plaisantent avec lui. L’homme n’est pas en colère, il est plutôt amusé par ceux qui lui ont apporté un gros matelas dont il ne fera rien. Il est surtout désabusé et n’attend plus rien de la vie.

Bathélémy Olivier a posé sa caméra près de Kader avec modestie, sans ajouter un mot. Il a rencontré l’humain que la ville déshumanise. Même si Kader affirme s’être lui-même exclu, on y voit processus de mise au ban que subissent ceux qui n’aiment pas les normes.

J’aime ce documentaire parce qu’il raconte une histoire actuelle, sans truchement, car on ne pourra pas dire que le film est mis en scène.

C’est le premier film du concours que j’ai visionné, je m’efforce de penser que ça n’a pas influencé mon choix.

Dans une toute autre forme, j’ai également apprécié Foi, espérance et efficacité, par l’association ACTE Cinéma.

Comme dans L’attente suspendue, les documentaristes traitent de la question du mal-logement en France, en présentant cette fois la cité du Haut-du-Lièvre, à Nancy. C’est un quartier de grandes tours qui abritent des logements sociaux depuis les années 1950.

La barre la plus impressionnante du “Haudul”, et, disons-le, la plus monstrueuse aussi, fait 400 mètres de long, compte quinze niveaux pour 917 logements. Le quartier comporte en son point central une prison, ce qui vue du ciel rend, comme vous pouvez l’imaginez, l’ensemble architectural des plus esthétiques, dans le style jardin à la française.

Le discours politique de critique sociale du documentaire est affirmé. Il s’inscrit dans un montage original. Le tout dure deux petites minutes. Ici, le temps court n’est pas un handicap. Il devient même un allié, sans pour autant faire du film un clip militant, car il appelle surtout à réfléchir.

Mon dernier vote va vers Jules (1918 -), de Julien Cabon et Marina d’Été.

Beaucoup de films traitent de la fin de vie des anciens dans cette sélection. Signe des temps moroses ? Ce n’est donc pas un sujet original. Toutefois ce film sort de l’ordinaire car son héros et personnage unique est tout à fait atypique.

Jules Ollivier – nous dirons Jules pour respecter la simplicité de l’homme – a 95 ans. Il se considère lui-même “dans l’antichambre de la mort”, bien qu’il ne “soit pas pressé”. Il est originaire de Gouarec, un village costarmoricain du Kreiz Breizh dont la page Wikipédia est illustrée par une photo du cimetière.

Sur la tombe de son père devant laquelle Jules va se souvenir, la croix est catholique. Mais Jules ne croit pas à l’au-delà. Il croit en revanche à l’amour, bien que le temps de chien “n’y soit pas très propice”. Chantant Carmen, il vit toujours, en quelques sortes, avec sa femme.

Cet homme singulier, toujours vif , ce “caractère breton” délivre paradoxalement face à la mort un message d’espoir, à la manière des vieux sages, dont Stéphane Hessel était l’un des plus éminents représentants. J’aime ce portrait émouvant sans être larmoyant.

Jules (1918 – ) est co-réalisé par Marina d’Eté, ancienne étudiante en journalisme de l’IUT de Lannion, c’est-à-dire l’école de laquelle je sors. Je pensais l’exclure d’office de mes coups de cœur pour conflit d’intérêt, mais comme je trouve qu’il est vraiment bon, je le laisse, tout en vous avertissant.

Justine Briot

Pour apprécier au mieux les 28 films restants en compétition, j’ai fractionné mes instants de visionnage en trois fois. Je les ai regardés dans l’ordre, sans me soucier des votes déjà obtenus et du sujet qui allait être traité.

Mon coup de cœur revient à 52 km réalisé par Nicolas Djian et Arthur Rifflet. Alors que la question des migrants revient régulièrement à la Une avec l’île de Lampeduza, ce mini-documentaire nous rappelle que dans le Pas-de-Calais, ils sont toujours autant à espérer et à attendre un départ pour l’Angleterre. La page du centre de Sangatte s’est peut-être tournée le 16 décembre 2002, mais les migrants sont toujours présents et se réfugient le long du littoral dans des abris de fortune.

Pour ce migrant syrien, son “5 étoiles” français, c’est une tente. Il passe ses journées à attendre la bonne opportunité pour gagner les terres britanniques.

Malgré le froid, les doutes et la peur, il sait qu’en Syrie ses proches comptent sur lui. “J’ai parcouru plus de 6.000 km depuis mon départ mais ce sont les 52 km les plus difficiles qu’il me reste à franchir”. Un constat implacable.

Par sa musique, ses images mais aussi son titre, c’est ce mini-documentaire qui m’a le plus touché, peut-être parce que je connais Calais et ses rues. Il me fait inévitablement penser au film Welcome de Philippe Loiret, même lieu, même espérance. Ce film en 2009 m’avait profondément touchée, il en est de même ici en un peu plus de 3 minutes.

En deuxième position, c’est ma corde artistique qui a vibrée. Place à Louise Traon et son film La pose. Un mini-documentaire tout en simplicité où Alice, modèle de nu, nous explique avec ses mots comment elle est arrivée à dévoiler son corps aux regards d’inconnus pendant de longues heures.

Pour la jeune femme, cette action permet de “revenir à une certaine naissance”. D’elle, nous ne connaîtrons que son prénom, ses formes et quelques détails de son visage. C’est à travers les statues réalisées ce jour-là par les élèves de l’atelier d’art de Rrose Sélavy qu’on peut mettre un visage sur cette voix. J’ai beaucoup aimé ce parti pris.

Autour d’elle, on entend les murmures du prof et des élèves. Les yeux vont et viennent. Comme elle le conclut si bien : “Je sens une énorme énergie, mais je ne sens pas pas un regard posé sur moi et c’est plutôt rassurant”.

Pour finir, mon dernier vote est pour l’un des premiers films que j’ai visionné : Entre elle et moi de Yann Belguet. Il est le premier a avoir retenu mon attention à la fois car il n’y a aucun mot de prononcé, mais aussi pour l’émouvante fin qu’il réserve.

À l’intérieur, assise sur différents sièges, à différents instants de la journée, une femme attend. Mais quoi ? Le mystère reste entier. Son regard est fuyant, elle semble absente et réagit peu aux bruits qui l’entourent : on comprend par certains détails qu’elle souffre d’un handicap.

Alors que la même séquence semblait se dessiner à nouveau un sourire vient éclairer son visage. Une belle déclaration d’amour et de tendresse d’un frère pour sa sœur.

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Antigone est un homme au sanctuaire de Cybèle

Gwénaël Morin, metteur en scène de la pièce, nous offre une version moderne et vivante d’un classique. Le cadre, minimaliste, a permis l’osmose entre comédiens et public. L’histoire d’Antigone, vous la connaissez. Pour le reste, lisez plutôt.

C’est le début de la pièce. Les comédiens surgissent de toutes parts. Ils nous regardent dans les yeux et transmettent leur émotion. Le chœur débarque et crie. Chante. Et transmet le message. Il est le même, l’histoire est la même : la loi des hommes contre celle des Dieux et le combat d’une jeune fille, Antigone, pour la sépulture de son frère.

Le chœur est constitué de personnes comme vous et moi. Ce ne sont pas des comédiens, ce ne sont pas des chanteurs. Ce sont des personnes qui se sont inscrites sur une site qui proposait d’interpréter le chœur de cette pièce. Le théâtre se démocratise donc de plus en plus. Le chœur scande des “destin !”, “tragédie !” avec des mégaphones de fortune. Ça nous prend aux tripes.

Le combat d’Antigone est interprété à merveille par un Julian Eggerickx complètement transformé. Il transcende le public, il le touche. La larme a l’œil, il s’efface et s’écrase face au puissant et un tantinet misogyne Créon, joué par Virginie Colemyn.

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La particularité de cette première représentation lyonnaise était bien l’aspect moderne. D’abord les décors, Thèbes, la cité où se situe l’action, est matérialisée par un drap blanc sur lequel est inscrit sobrement en noir “Thèbes”.

La porte, sur laquelle Antigone s’élève pour gagner de la hauteur face aux hommes, est bricolée en bois. Les costumes sont très sobres. Une jupe bleue pour Antigone et deux cercles rouge sur la poitrine du comédien pour représenter les seins de la jeune fille, une vieille perruque pour Hémon, un chapeau et une épée en carton pour Créon.

En bref, il s’agit de décors et de costumes pour le moins minimaliste. Ce minimalisme permet clairement de s’imprégner de la force et de la sensibilité des comédiens. Ce classique de Sophocle n’a rien perdu de son authenticité, au contraire, il réussit toujours à attirer et à séduire le spectateur.

Et comme le metteur en scène me le confiait, “la modernité de cette pièce réside dans sa simplicité”.

Antigone, d’après Sophocle, mis en scène par Gwenaël Morin, aux Ruines romaines de Lyon, chaque soir jusqu’au 12 juin, à 19 h. 20 €/15 €, guichet des Nuits de Fourvière.

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