Images exclusives d’un défilé polémique. Les 13 et 14 juillet 2016, Nuit Debout Lannion organise un carnaval révolutionnaire et coupe des têtes, provoquant l’ire du Parti socialiste et du préfet des Côtes-d’Armor. Était-ce justifié ? À vous de juger.
Au quatrième mois de mobilisation contre la loi Travail et au 84e jour de présence quotidienne devant la mairie de Lannion pour Nuit Debout, quelques militants organisent un « carnaval révolutionnaire », annoncé dans la presse.
Le 13 juillet, avant le traditionnel bal des pompiers du quai d’Aiguillon, puis le 14 juillet, les militants baladent une charrette dans laquelle sont installés des poupées représentant le président de la République, François Hollande, son premier ministre, Manuel Valls, la ministre du Travail, Myriam El Khomri, le président du Medef, Pierre Gattaz, et la députée PS de Lannion-Paimpol, Corinne Erhel (décédée un an plus tard d’un arrêt cardiaque, en plein meeting pour Emmanuel Macron).
Seule Corinne Erhel sera épargnée par L’Ankou, le « serviteur de la mort » dans la mythologie bretonne.
Le 19 juillet, le Parti socialiste des Côtes-d’Armor publie un communiqué pour « condamner une mise en scène macabre […] une incitation à la haine et à la violence ».
Dans la foulée, le préfet des Côtes-d’Armor, Pierre Lambert, condamneà son tour « cette mascarade faussement républicaine. Un dépôt de plainte est envisagé pour diffamation publique et outrage à l’encontre de personnes dépositaires de l’autorité publique. […] Toute manifestation nouvelle, susceptible de troubler l’ordre public, organisée à Lannion et à l’initiative des auteurs de ces actions, sera strictement interdite. »
Plus tard, Myriam El Khomri témoigne lors du documentaire sur Nuit Debout diffusé par France 5 avoir vécu cette décapitation symbolique, dont elle a été informée, comme une « intimidation ».
Finalement, Nuit Debout Lannion poursuit ses actions sans être inquiété. Aucun militant n’est poursuivi pour ce carnaval et ceux traînés devant le tribunal pour des rassemblements sur le parvis de la mairie de Lannion ou sur les rails de la ligne TGV Paris-Brest sont relaxés lors de procès organisés à Guingamp.
À ce jour, en décembre 2017, Nuit Debout Lannion continue de se réunir chaque semaine, participe au Front social Lannion-Trégor, qui s’oppose au contre-réformes Macron. Le groupe informel s’inscrit dans de nombreuses luttes contre l’extraction de sable en baie de Lannion, les projets miniers en Centre-Bretagne, les accords de libre échange, l’extrême-droite, le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes ou l’austérité budgétaire dans les hôpitaux publics.
Le premier Fest-Noz du mouvement « Nuit Debout Lannion » s’est tenu le 26 mai 2016, lors de la trente-sixième soirée d’occupation de place de la Mairie.
Les jeunes et prometteurs groupes traditionnels bretons War-Sav et Sparfell, notamment, ont fait danser jusqu’à 300 personnes, pour cet événement placé sous le signe de la lutte contre le projet de loi Travail, du gouvernement Valls.
Une caisse de grève a été mise en place pour soutenir le mouvement. Le matin-même, une centaine de manifestants ont répondu à l’Appel de Plouaret en bloquant la circulation des trains pendant six heures sur l’axe Paris-Brest.
Trois-cents personnes se sont aussi réunies à midi devant la Maison de l’emploi, à Lannion, à l’appel de l’intersyndicale, qui compte construire la grève dans le plus grand nombre d’entreprises du territoire trégorrois.
La « Radio Debout Lannion » a émis en parallèle, depuis un appartement surplombant la place pour sa cinquième émission en direct, consacrée à l’actualité du mouvement social et aux questions de précarité. Un vif débat s’est engagé sur la priorité que représente l’écriture d’une nouvelle Constitution.
Près de 300 personnes ont manifesté dans les rues de Lannion (22), le 17 mai 2016 contre le projet de loi Travail du gouvernement Valls. Une partie du cortège a organisé une marche funèbre et musicale pour enterrer le code du travail, à l’initiative du mouvement Nuit Debout Lannion.
Certains manifestants chantaient des slogans contre la députée PS de Lannion-Paimpol Corinne Erhel, sur la musique de Merci Patron, des Charlots, bande originale du film éponyme produit par le journal militant de gauche Fakir et réalisé par le journaliste François Ruffin.
Sur la vidéo, le défilé passe sur le quai du Maréchal-Foch, près du centre Sainte-Anne. Les manifestants se trouvent ensuite devant la sous-préfecture. Le faux-cercueil sera plus tard balancé dans le jardin de Sophie Yannou-Gillet, sous-préfète. Enfin, les derniers manifestants réalisent une opération escargot sur le rond-point de Saint-Marc, avant de rallier les ronds-points Coppens et de Boutil, qui se trouvent sur l’axe Lannion-Guingamp.
Je me saisis de propos tenus dernièrement par Manuel Valls pour réfléchir un peu au sujet du nucléaire. Bonne nouvelle, ça va s’arrêter, c’est inéluctable. Reste à savoir pourquoi les dirigeants (politiques, entreprises) n’arrivent pas à le digérer, et j’ai ma petite idée sur la question.
Le nucléaire, une grande filière d’avenir
Le 27 août, notre Premier ministre participait à l’Université d’été du Medef. J’ai eu l’occasion de suivre son discours grâce à Twitter. Ladite allocution a été plus que largement reprise et commentée sous beaucoup d’angles différents. Personnellement, une chose m’a sauté à la figure et j’ai regretté qu’elle soulève si peu de réactions. Voilà l’objet :
#Valls “je considère, au-delà de l’indispensable transition énergétique, que la filière nucléaire est 1 grande filière d’avenir” #uemedef14
Notez bien que notre nouvelle ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie Ségolène Royal parle du nucléaire comme d’un atout pour la France, même si dans son cas, les énergies renouvelables occupent le devant du discours.
Wokay. Étudions donc un peu la question.
Un bât qui blesse : la finitude de l’uranium
Toute autre considération mise à part, voici un fait : nous n’avons pas assez d’uranium.
Sur le sujet, je vous conseille cet excellent dossier de Science et vie de mai 2012 (n°1136). Il détaille l’état des stocks de 26 éléments ainsi que la vitesse à laquelle nous les consommons ce qui promet pour l’essentiel d’entre eux leur raréfaction voire leur disparition. Concernant l’uranium, voici un constat de Marc Delpech, chef de programme de l’amont du cycle à la Direction de l’énergie nucléaire du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) :
“Compte tenu des besoins du parc nucléaire actuels et projetés, les ressources “raisonnablement assurées” aujourd’hui, soit environ 2,5 millions de tonnes d’uranium, seront entièrement consommées d’ici à 2035″
Retournons le problème, parlons démantèlement et déchets
Le nucléaire est une filière d’avenir, clairement, indiscutablement. Nous sommes parvenus à l’ère du démantèlement des premières générations de centrales. Les déchets que nous avons produits ont 200.000 ans de dangerosité devant eux. Sur le sujet, je vous renvoie à au documentaire diffusé cet été par Arte, Centrales nucléaires, le démantèlement impossible.
Ça, c’est donc ce que j’appelle un coup de Léonard. Avec les solutions envisagées à l’heure actuelle, le marché français est estimé à la louche à 150 milliards d’euros par Corinne Lepage, dans le documentaire. Lorsque l’on s’intéresse aux déchets, là c’est 200.000 ans d’activité devant nous.
Pour comparaison, il y a 200 000 ans, l’Europe était peuplée par Néandertal. Voyons, quel autre secteur se projette à l’échelle de temps de l’évolution des espèces ? Ah, le secteur pétrolier qui modifie le climat. Nous parlons encore énergie.
Ce n’est donc a priori pas nous, humbles Homo sapiens qui verrons la fin du nucléaire en tant que gouffre à pognon et source de nuisances environnementales. Le nucléaire, un secteur d’avenir certes, mais c’est sous l’angle d’em***des incommensurables.
Oui mais d’où tirer l’énergie ?
Nous vivons dans un monde dont l’humanité touche la finitude des deux mains et du portefeuille. La matière y est présente en quantités limitées. S’en servir comme source d’énergie est donc une stratégie délicate qui impose un changement de technologie à l’échelle industrielle à chaque fois que nous asséchons une ressource.
Si nous n’avions pas le choix, et toute considération environnementale mise à part, je ne dis pas. Mais regardons ailleurs que sous nos pieds. Là-haut. Plus haut. Voilà. Le soleil. La quantité d’énergie qu’il nous expédie à chaque instant est faramineuse comparée à celle que nous produisons (voir les encadrés de fin pour les sources du calcul).
Visualisons le tout en un graphique.
Voilà ce que représente l’énergie que nous produisons chaque année par rapport à l’énergie circulante reçue du soleil : 0,014 %. Or, rappel, pour générer ce petit bout de fifrelin, nous devons assécher les ressources géologiques (pétrole, charbon, uranium) et réformer notre tissu industriel tous les 50 ans.
Et si on tirait l’énergie d’une source d’énergie ?
Je ne suis pas la seule à savoir faire des calculs. Assurément nos dirigeants ont déjà tout ceci en main, et sans doute bien plus encore. Dans ces conditions, mon interrogation est la suivante : comment se fait-il que le secteur du nucléaire puisse encore être associé au terme “avenir” sachant que le gisement potentiel ouvert aux énergies renouvelables représente 7.000 fois ce que l’on arrive à produire à l’heure actuelle en étant au max de nos capacités (c’est à dire nucléaire + pétrole + charbon et tout de même 13,3 % d’énergies renouvelables) ? Comment peut-on dans ces conditions considérer d’investir des millions et des milliards dans le nucléaire au lieu de les transférer là tout de suite maintenant dans des solutions pérennes ?
Autre question, comment se fait-il que les accros de la croissance économique exponentielle infinie ne se soient pas encore saisis de ça, ne se soient pas même rués dessus ? Du point de vue du marketing, c’est sans comparaison possible.
Du contrôle de la filière
Le renouvelable pose quand même un gros souci pour les grandes entreprises.
Avec le renouvelable, la source d’énergie est très diffuse, l’appareil de production associé doit donc aussi l’être… et d’ailleurs il peut être très divers : panneaux solaires, hydroliennes, éoliennes, arboriculture etc. Tout ça impose de le partager avec le clampin moyen, ce qui allume des alertes rouges partout sur le schéma des cinq forces de Porters. Or, le positionnement stratégique, c’est crucial pour une entreprise.
De la rentabilité
Henri Snaith est un physicien que travaille à l’Université d’Oxford sur des cellules photovoltaïques à base de pérovskite. Selon lui, la combinaison entre les faibles coûts de production et l’efficacité de cette nouvelle génération de composants est en passe derendre le solaire plus rentable que l’utilisation des ressources fossiles. Que voilà une excellente nouvelle. Le “en passe” nous indique toutefois que ça n’est pas encore le cas.
Une entreprise, c’est fait pour gagner des sous
Plaçons nous dans la peau d’un industriel, confronté à une compétition internationale ultra rude. Peut-il prendre des décisions qui d’une part vont fragiliser la position stratégique de sa boite et d’autre part augmenter ses coûts de production ? Selon moi, la réponse est OUI, il peut le faire, mais il n’y a pas du tout intérêt.
Certes, on apprend parfois qu’une Anne Lauvergeon s’est opposée à la vente d’une centrale nucléaire à la Libye lorsqu’elle était à la tête d’Areva. Anticipait-elle un risque si important pour le plus grand nombre que même la bonne marche commerciale de l’entreprise est passée après ? Comment le savoir, peut-être y avait-il d’autres raisons, peut-être pas. Toutefois, cela n’enlève rien au fait que la simple lecture de statuts d’entreprise montre qu’elles sont légalement outillées pour employer des gens, produire des biens et services, faire du commerce, pas pour œuvrer pour le bien général.
De mon point de vue, les résistances que nous vivons à l’heure actuelle sont vouées à lâcher. Pétrole, nucléaire and co vont inéluctablement prendre fin parce qu’ils utilisent la matière comme source tandis que les énergies renouvelables s’en servent comme outil. Ils vont inéluctablement prendre fin parce que d’un point de vue économique, le solaire est en passe de devenir plus rentable que les énergies fossiles. Compte tenu de tous ces éléments, serions-nous en ce moment même sur la ligne de crête matière/énergie ?
Si tel est le cas, perso je croise les doigts que nous la franchissions assez tôt pour que la mutation en cours puisse se faire avec le minimum de dégâts environnementaux et sans période de pénurie. Sur ce dernier point, il ne s’agit pas (uniquement) d’une question de confort. Personnellement je me passerais bien d’une nouvelleguerre du pétrole. Voyons donc ce que les faits vont répondre.
L’ÉNERGIE SOLAIRE CIRCULANTE ANNUELLE
Notre ami soleil nous expédie à chaque instant une moyenne de 1.360 W/m2 (constante solaire, reconnue à peu près partout). Le tout n’est pas disponible, par exemple une large partie est directement réfléchie vers l’espace (environ 30%). Le reste transite d’une façon ou d’une autre par le système planète/atmosphère pour ensuite être réémis, sans quoi nous grillerions tel des œufs au plat à feu vif : en quelques minutes.
Nous en arrivons donc à 240 W/m2 (source : Rebecca Lindsey, Nasa earth observatory, 2009) soit 240 J/s/m2. Si nous ramenons ça à la surface de la planète (510.067.420 millions de m2) pour un an (31.536.000 secondes) nous voilà à 386.051.668 x 1016 joules/an qui se baladent entre chaleur, lumière, mouvements de convection, biomasse et ce dans la croute terrestre, l’atmosphère et les océans.
Attention 1 : ceci est une évaluation du potentiel total. À titre indicatif les agronomes estiment que 50% de cette énergie parvient jusqu’au sol.
Attention 2 : le calcul inclue un grand nombre d’approximations, il faut donc voir dans ce chiffre un ordre de grandeur.
Je tiens à remercier les personnes qui ont accepté de prendre du temps pour vérifier la validité de mes calculs et/ou me mettre en relation avec les bons interlocuteurs, et/ou me donner des infos supplémentaires : Bruno Tréguier, Michel Aïdonidis, l’école de Météo de Toulouse. Nota bene : cela ne signifie en aucun cas que ces personnes cautionnent le contenu de l’article, qu’ils n’ont d’ailleurs pas lu (en tout cas avant publication). Retour au graphique
LA PRODUCTION ANUELLE D’ÉNERGIE PRIMAIRE
Prenons maintenant la production d’énergie primaire par an en 2011 (Agence internationale de l’énergie) : 13.113 millions de tonnes équivalent pétrole. Or, 1 million de tonnes équivalent pétrole équivalent à 4,1868 x 1016 joules (source de l’équivalence : American physical society). Nous sommes à 54.902 x 1016 joules/an. Retour au graphique
Image à la une : photo de peintures rupestres libyennes de Luca Galuzzi, disponible ici sous licence CC-BY-SA 2.5, revue par mes soins.