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=XPO : le design au secours de l’égalité hommes-femmes

Noëllie Perrusset et Marine Le Razavet ont convaincu douze artistes suédois.es et français.es de leur prêter leurs œuvres sur le thème de l’égalité entre les sexes pour une exposition organisée à Lannion (22), dans l’espace municipal Sainte-Anne. Avec pour objectif d’interroger les visiteurs.

Les deux jeunes designeuses, originaires de Lyon et Lannion, sont parties à Stockholm, en Suède, entre mai et novembre 2017, profitant de leur césure après la fin de leurs études. Un pays que les jeunes femmes décrivent comme plus ouvert que la France sur les questions de genres.

Précédemment, à Göteborg, Marine Le Razavet avait réalisé dans le cadre de ses études le tabouret bancal FREDO, sur lequel on ne peut s’asseoir qu’en ayant les deux pieds posés au sol. Ainsi, les hommes et les femmes dont l’attitude diffère généralement en raison de la norme sociale, se retrouvent sur un pied d’égalité.

Le scandale des abus sexuels pratiqués par Harvey Weinstein à Hollywood et son onde de choc mondiale s’est déclaré en pleine préparation de l’exposition. L’artiste Jenny Edlund a justement rebondi sur les mots-clés #metoo et #balancetonporc, qui ont participé à la libération de la parole des victimes. Son oeuvre participative consiste à broder le nom de son agresseur sur du tissu.

Noëllie Perrusset et Marine Le Razavet n’en insistent pas moins sur la réciprocité de l’égalité hommes-femmes, en ce qui concerne les congés parentaux, notamment. Elles espèrent pouvoir présenter leur exposition à Lyon, Nantes et Stockholm.

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Mission Knut, l’anti-jeu vidéo

Critique – La dernière fois je vous parlais de Candy crush saga en tant qu’interface d’accès à la recherche en mathématiques appliquées sans prérequis culturel. Cette fois-ci, j’ai envie de discuter de ce qui fait le fun dans le jeu, et d’éducation. Nous en viendrons à Mission Knut, qui représente à mes yeux un Amoco Cadiz vidéo-ludique.

Mais vous savez quoi ? Jouons, on parlera après.

Celui où on est seul

Nous sommes aux sources du casse-tête : votre cervelle contre la difficulté de la configuration proposée, stou. On aime ou on n’aime pas.

Les règles ? Non hein, ça vient tout seul. Et au pire, vous savez que vous pouvez cliquer sur le p’tit point d’interrogation. Le jeu c’est aussi une culture et des codes.

Celui qui vous parle

Encore des carrés, mais là, c’est un peu différent.

Copie d'écran d'une partie de Game about squares. Pour jouer c'est là-bas que ça se passe http://gameaboutsquares.com/ (et toujours sans pub).
Capture d’écran d’une partie de Game about squares. Pour jouer c’est là-bas que ça se passe (et toujours sans pub).

Celui-ci illustre à merveille la notion de progression (pourtant présente dans le précédent). Très régulièrement, les solutions qui vous ont permis de passer au niveau suivant ne suffisent plus, il faut trouver un truc en plus. Bé oué, s’il n’y avait aucun enjeu, on s’ennuierait et clac, on passerait à autre chose. Or, relever un défi, c’est fun. À l’opposé, si on devait commencer par le dernier niveau, pfff, laissez tomber, inabordable (en tout cas pour moi !).

Toujours sans fioriture. Pas de pub ni temps de chargement, accès immédiat, règles du jeu intuitives. Il vous parle de vous entre les niveaux… et ça n’est pas anecdotique. Vous les écoutez vous les gens qui passent leur temps à parler d’eux-mêmes ?

Celui qui a fait le buzz

Si vous l’avez loupé celui-là, c’est que vous avez dû passer les derniers mois à hiberner. Accès immédiat, commandes fluides, graphismes ultra-clairs. Quand on ne voit que la qualité du concept, c’est que tout le reste est au rendez-vous.

Capture d'écran d'une partie de 2048
Capture d’écran d’une partie de 2048, pour tester, c’est là-bas que ça se passe.

Dixit l’auteur, 2048 est dérivé de 1024 de Veewo studio, lui même dérivé de Three, qui s’inspirait des mécaniques du Taquin… Oui, le jeu c’est aussi du recyclage. Parlez-en avec les ayants-droit de My way, le concept d’adaptation, ils adorent. Seule différence pour le jeu vidéo, du fait d’un statut juridique délicat, les mécaniques ne sont que très peu voire pas protégeables. De ce fait, elles restent librement (et gratuitement) réutilisables. Ahah, ça vous en bouche un coin hein?

Pourquoi un principe est-il fun et pas un autre ? Il est parfois possible de l’expliquer a posteriori. Mais soyons sérieux, dans la conception du cocktail qui fonctionne, il y a une bonne partie de mystère. Toujours est-il qu’avec 2048, des millions de gens se sont éclatés à réviser la suite des 2n, sans même parler du fait qu’ils ont abordé des problématiques de ressource limitée, gestion de l’espace etc.

Celui qui console de celui qui a fait le buzz

Vous avez testé 2048, et vous galérez comme un chien mort. Ou alors vous y étiez presque, et paf, un 2 qui pope au plus mauvais endroit. Vengez-vous avec 8402.

Vengeance! Capture d'écran d'une partie de 8402. Pour jouer ça se passe là-bas https://sphere.chronosempire.org.uk/~HEx/8402/
Vengeance ! Capture d’écran d’une partie de 8402. Pour jouer ça se passe là-bas.

En matière de vengeance, on a déjà vu mieux. C’est qu’elle a de la ressource cette evil AI player, de quoi filer des complexes. Bon, on peut faire son/sa susceptible certes, mais une fois la claque digérée, observez puis revenez à 2048.

Hey, vous avez remarqué ? Avec 2048 et son pote, en fait, on joue contre l’ordinateur. Il n’est plus question seulement d’une difficulté statique posée par une configuration à résoudre. Y’a de l’IA.

Celui qui achève ceux qui font les malins avec 2048

Vous faisiez les malins ? Pour moins la ramener, c'est là-bas que ça se passe.
Vous faites les malins avec 2048 ? Pour moins la ramener, c’est 2048-hard, et c’est là-bas que ça se passe.

Voilà, voilà. Vous venez de vous prendre la notion d’équilibrage en plein dans la face. S’il y a IA, il est possible d’ajuster la difficulté. Un jeu qui vous défonce, c’est pas marrant. Et si un jeu n’est pas marrant, il ne concerne que quelques indiens perchés sur leur montagne.

De l’intérêt de connaître le public que l’on vise et de s’adapter à lui.

Celui qui fait la guerre

Okay, le même topo fonctionne avec un autre concept. Amateurs de jeux de stratégie, inutile de perdre votre temps. À ceux qui ne connaissent pas, ça peut faire une bonne intro.

Tout le principe du jeu de strat en 3 graphismes : c'est là-bas que ça se passe.
Capture d’écran de Dicewars. Tout le principe du jeu de strat. en trois graphismes : c’est là-bas que ça se passe.

Quand on n’y connaît rien, on attaque par la configuration à deux joueurs, puis on progresse. Ah ça fonctionne bien, y’a des ptits bruits sympas, un peu de hasard, les différentes IA ne réagissent pas de la même façon tout ça.

Celui qui laisse complètement perplexe

Passons au niveau supérieur. Le jeu qui créé un lien affectif pour faire un truc avec.

Capture d'écran d'une partie de Don't shoot the puppy, jouable là-bas.
Capture d’écran d’une partie de Don’t shoot the puppy, jouable là-bas.

Désolée, j’aurais voulu ne sélectionner que des trucs sans pub, mais je n’ai pas d’équivalent à celui-là qui remplisse le critère. C’est juste énorme, et ce pour plusieurs raisons selon moi.

Ce jeu-là vous saisit par les sentiments pour mieux vous rendre idiot. Vous pouvez trouver ça complètement absurde, inutile etc. Perso, j’ai pris ma clickeuse folle intérieure en flag’ : surtout ne rien toucher alors que j’en crève d’envie. Même si vous vous demandez à quoi ça rime, j’vous jure, testez, allez jusqu’au bout et observez ce que ça génère en vous. C’est passionnant.

Autre élément, après avoir passé huit minutes à déjouer les plans machiavéliques des concepteurs, vous savez ce qu’envie veut dire. Seul bémol, il est possible que la mayonnaise ne prenne que sur les gamers. Nous en revenons à la culture…

Celui qui est beau

À entrer dans le monde de l’agilité, autant le faire de la plus belle des façons.

Aura, par le collectif One life remains (jeux expérimentaux)
Capture d’écran d’Aura, envol disponible là-bas.

Juste owi \o/

Notez bien que pour un tel résultat, le jus de cervelle ne suffit pas. Il faut que ce soit celui d’artistes… accompagnés de développeurs qui maîtrisent. La façon dont les commandes répondent est juste puissante.

Art, ah y est, le mot est lâché.

Celui qui fait pulser l’adrénaline

One life remains, même collectif que précédemment joue encore (ça se sent que j’ai les nerfs d’avoir loupé leur installation en gare de Brest ?).

Pacmad par le collectif One life remains, ça se joue là-bas. http://oneliferemains.com/game.php?game=pacmad
Capture d’écran de Pacmad qui se joue là-bas.

Croquer les ptits pour avoir la ressource d’échapper aux gros quand vous vous prenez les pieds dans le tapis, ça vous parle ? Ajoutez à cela un rythme ultra rapide, et vous obtenez un vrai discours aussi dense que complexe. Inutile d’aller claquer une 3D invraisemblablement réaliste et des équipes de 80 personnes pour ça.
Ça fait de la flippe hein ? Qui a dit que l’art ne suscite que des émotions confortables ?

Voici donc quelques jeux qui m’ont accrochée sur le net. Aucune prétention d’être exhaustive. Il en existe sans doute plein d’autres dans la même veine, le seul défaut expliquant leur absence étant de ne pas s’être trouvés sur ma route. Mon critère pour cet article était que les jeux présentés soient accessibles gratuitement et sans délais.

Techniquement, 99 % des lecteurs ont lâché ce papier pour rester sur un des jeux présentés. Ils louperont donc ce que je peux avoir à dire maintenant. Bon, je pense qu’ils devraient survivre quand même. Pour les autres, la suite porte sur le fait que dans serious game, il y a game.

Celui qui a fait saigner mon cœur

Si j’ai pris la peine de raconter tout ça, c’est aussi pour en arriver à quelque chose qui m’a fait froid dans le dos il y a quelques jours. Maintenant que nous avons quelques éléments en commun, nous pouvons y aller.

Je viens de découvrir Mission Knut. C’est un jeu destiné à faire connaître les pourquoi et les comment du Parlement européen. C’est donc un serious game. Comme le disait notre ami Confucius : « Dis-moi et j’oublierai, montre-moi et je me souviendrai, implique-moi et je comprendrai ». Le fun comme outil pour impliquer les gens, jusque là, tout va bien.

D’abord le trailer.

Je ne peux m’empêcher de penser que quand on n’a pas le budget pour une grosse prod’, on en évite la rhétorique, d’autant qu’en matière de super-héros, le commissaire européen, c’est pas ce qui vient à l’esprit en premier lieu. Erf. Admettons.

Puis vient le jeu à proprement parler (rappel, il est là-bas). J’ai chronométré, en ne lisant rien et en passant tous les textes dès qu’il est possible de le faire, il faut quatre minutes pour poser sa première question (c’est la base du gameplay). En lisant, dommage, c’est indispensable pour comprendre les règles, nous arrivons donc à un bon dix minutes. Dix minutes de culture et de codes technocrate-centrés à ingurgiter, quand on s’adresse à des gens qui eux sont dans le jeu vidéo. Non. Non, définitivement non.

S’il y en a qui jouent pour de vrai, qui ressentent quelques chose en dehors d’un ennui profond, et ce sans faire partie des indiens perchés sur leur montagne (au hasard, les créateurs ou les corps de métiers présentés), qu’ils me contactent. Ça n’est pas une blague. J’ai vraiment envie de savoir. Si de telles personnes existent, ce qu’elles ont à m’apprendre dépasse mon imagination.

Mission Knut Journaux - La Déviation

Revenons à mon steak. La critique est facile certes. Pourtant je ne peux m’empêcher de penser qu’un truc reprenant un peu le principe de Sim city (à ne pas confondre avec Les Sims) aurait bien mieux fonctionné. Peut-être que je sous-estime les temps de développement, que ça n’était pas faisable pour des questions de coût. Dans ce cas, je ne saurais que suggérer de faire appel à des gens tels que ceux à l’origine des exemples précédents.

En fait, je pense avoir une petite idée de ce qui a mené à ce jeu. Ptet qu’il serait judicieux de déposer un dossier de financement auprès de la Commission européenne pour un dispositif destiné à sensibiliser les acteurs de la sensibilisation sur ce qu’il est possible de faire, et ce qu’il faut à tout prix éviter, nan ? (C’est dit sur un ton ironique, malgré tout…)

En écrivant ce papier je pense aussi aux dégâts à moyen-terme d’un tel projet. Avec des précédents de ce type (ne me dites pas que des gens jouent, je n’y crois pas), autant dire que la planche est savonnée au dernier degré pour les artistes et game designers de talent qui auraient un projet à présenter. Tout ça les éloigne encore un peu plus du vrai rôle d’utilité publique qui pourrait leur revenir. À la place, ceux qui arrivent encore à tenir bon se trouvent confinés dans un ghetto de confidentialité.

Mission Knut écolo - La Déviation

Bien sûr qu’il est déterminant se sensibiliser les masses au fonctionnement des institutions. Si pour ça on doit permettre aux gens de mettre à feu et à sang le trafic maritime mondial dans un jeu, et bien pourquoi pas ? Je vous parie un resto que ça ne créera pas une génération de psychopathes qui vont se fader dix ans d’études puis grimper patiemment les échelons afin de se trouver en position de mettre leur projet diabolique à exécution.

PS : si un tel jeu se met en place, envoyez-moi le lien SVP. Moi aussi j’veux mettre le trafic maritime mondial à feu et à sang !

Image à la une : Fun par Elizabeth Hudy, licence CC-BY-ND disponible sur Flickr.

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Parité à Angoulême : vers le début des quotas ?!

Infographie – En cette période électorale, j’ai eu envie d’aller voir où en était le milieu de la BD avec la parité. J’ai analysé les maisons d’éditions présentes au Festival international de la BD d’Angoulême (#FIBD 2014), en me limitant à celles qui font venir cinq auteurs ou plus sur les 128 présentes (histoire d’épargner vos rétines).

Infographie réalisée à partir des données fournies par le festival (pdf).

Chez Glénat, 9 femmes contre 73 hommes font partie des auteurs présents sur le salon, soit 11 % de femmes au total, le ratio est plus impressionnant sur un grand nombre d’auteurs (Glénat compte le nombre le plus importants d’invités).

La médaille d’or est décernée à une maison qui tient bien son nom… Ego comme X : avec parmi ses auteurs, 3 femmes pour 36 hommes présents (8 %). Elle est suivie de près par Dargaud qui affiche 4 femmes pour 36 hommes présents (10 %).

Rappelons aussi que sur les 42 auteurs ayant reçu le prestigieux Grand Prix de la ville d’Angoulême seules 2 femmes ont été distinguées (5 %) : Claire Brétécher (en 1982) et Florence Cestac (en 2000).

La Déviation fait un peu de discrimination positive

Cette petite balade parmi 1.600 auteurs a été l’occasion de croiser quelques noms d’artistes à la virilité revendiquée (merci El Diablo, Terreur graphique, Ancestral Z, je n’ai pas eu à googliser vos noms pour savoir que vous êtes des messieurs) et de se bidonner devant le sérieux de certains autres… B-gnet, Muzotroimil, Mojojojo et la palme revient sans doute à Sarah Fist’hole.

Illustration - Crédits Sébastien Thibault - La DéviationL’occasion aussi de redécouvrir quelques perles au-dessus du panier de crabes (faut bien que ça serve d’être sous-représentées, mesdames). Des pépites qui seront, bien entendu, présentes au FIBD. Saluons donc la Danoise Anneli Furmark qui a signé “Peindre sur le rivage”, en 2010 : un journal intime qui tend vers l’autobiographie, d’une étudiante en arts en proie aux doutes sur sa vocation d’artiste et sur son orientation sexuelle. Un autre de ses bouquins à ne pas manquer : Le Centre de la Terre.

À ne pas louper non plus, la dessinatrice et caricaturiste congolaise Fifi Mukuna. En RDC, elle a publié dessins et caricatures, avec le soutien des rédacteurs, jusqu’en 2000 où elle a remporté la deuxième place au Grand Prix des Médias dans la catégorie caricature. Une reconnaissance qu’il l’a faite connaître, mais sa “couverture” en a pris un coup, puisque beaucoup pensaient que c’était un homme qui se cachait sous son pseudo.

Formose, de Li-Chin Lin, édition Cà-et-là
Formose, de Li-Chin Lin, éditions Cà-et-là.

Émigrée politique, Fifi Mukuna vit aujourd’hui en France et a rejoint, notamment, l’association L’Afrique dessinée, qui œuvre pour la promotion de la bande dessinée africaine. Pour elle, “trop souvent la place d’une femme est jugée comme étant singulière dans un environnement encore essentiellement masculin. La protection et le respect dont je peux bénéficier aujourd’hui ne sont pas le fruit du hasard et quand il s’agit de plancher, je le fais, comme tout dessinateur le ferait. Homme ou femme… même si en tant que femme, je pense avoir apporté un autre regard sur la femme dans le domaine de la caricature”.

Et puis il y en aurait plein d’autres : Li-Chin Lin et son premier roman graphique très prometteur Formose, sur son enfance dans la campagne taïwanaise ; Émilie Plateau, l’auteur du tout petit livre carré “Comme un plateau” qui raconte la vie d’une Française à Bruxelles ; la friponne Aurélia Aurita qui a signé “Fraises et chocolat“, un récit hautement érotique des premières semaines d’une passion amoureuse, cru, franc, tendre et amusant, à dévorer !

Anouk Ricard n’est pas non plus en reste avec son récent “Plan-plan cucul” chez les Requins Marteaux.

À vous maintenant de vous promener dans les allées et de tendre le stylo, l’oreille,ou la main aux artistEUs du neuvième art !

Visitez notre dossier Angoulême 2014

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