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Beaucoup de pas grand chose

Puisque tout le monde parle de canicule, voilà une lecture qui se marie très bien avec des températures oscillant entre 37 et 41°c. En vrai, elle se marie à n’importe quelle saison, pourvu que vous ayez le sens de l’humour pour apprécier cette série autobiographique, « Les Petits riens », qui se décline en albums et dont le 7e volume vient de paraître.

Dans « Les Petits riens », Lewis Trondheim prend la vie comme elle va et fait de toutes ses petites anecdotes, drôles, rageantes, belles ou attristantes, des pépites.

Chacune est mise en relief par un auteur qui est à l’image du slogan de la collection Shampooing, dans laquelle paraissent ses « petits rien » aux éditions Delcourt : « Shampooing c’est pour les grands qui savent rester petits et les petits qui veulent devenir grands. » Et voilà tout est dit. On regarde la vie comme on farfouille dans sa boîte aux trésors, tout vaut le coup d’être accepté et raconté pour peu qu’on y accorde un peu d’importance.

Ça passe par ce petit buisson sec, gros comme le point qui roule, porté par le vent comme dans les westerns, que Lewis Trondheim regarde. Il se félicite de cette mini touche d’exotisme dans sa rue. Passage piéton - Les Petits riens de Lewis Trondheim tome 7 - Un arbre en furie - La Déviation

C’est aussi cette conversation avec ses vieux copains dans un bistrot, pour savoir combien d’entre eux collectionnaient les petites billes qu’il y a dans les cartouches d’encres des stylos plumes… en fait ils la faisait tous cette collection. Alors Lewis s’interroge sur le réel intérêt de la chose. En fin de soirée, il décide de donner un nom à cette collection puisqu’il n’en trouve visiblement pas sur internet : la parvapilaphilie ! Et de conclure que « ces années d’accumulation stérile auront au moins servi à ça ».

Charlie Hebdo

Il s’amuse de tout. Ses anecdotes font sourire, parfois rire un peu jaune ou rire tout court.

Le plus souvent c’est tout simplement vrai, pas de fausses notes mais une sincère autodérision. Pas de rancœur, pas de jugement ou de méchanceté.

Les petits riens de Lewis Trondheim 4. Mon ombre au loin

La violence n’est pas non plus absente dans ces « petits rien ». Résultat, on se prend parfois une claque.

Entre deux pages qui font sourire on tombe sur celle-ci par exemple : Lewis trondheim évoque les évènements de janvier en disant « depuis trois jours qu’il y a eu l’attentat, plus personne n’envoie ses bons vœux pour 2015 »… Il réfléchit en regardant par la fenêtre et ajoute : « je me demande quel va être le délai décent pour que ça reprenne… ».

Il se dit dans une autre page que s’il avait su que Wolinski allait être exécuté à la kalachnikov pour ses dessins, il ne se serait pas pris le chou avec lui lors des votes pour décerner les grands prix du festival d’Angoulême et aurait même voté pour Manara, pour lui faire plaisir.

Ce sont des remarques et des regrets doux amers qui passent d’autant mieux que l’auteur se représente sous la forme d’un faucon anthropomorphisé. Sa famille, ses amis et les autres personnages ont également des têtes d’animaux.

Les Petits riens de Lewis Trondheim - Tome 7 planche 14244  -  La Déviation

Le volume 7 s’intitule « Arbre en furie ». Il nous raconte les vélos prioritaires d’Amsterdam ; le monde parallèle des pâtes Barilla ; la découverte de la faune du Québec. C’est léger et c’est comme un miroir qui transfigure notre routine et la rehausse d’un peu de couleur, d’odeur, de sensations. Les imprévus deviennent des surprises ; les retards, des occasions de rencontres, et les virées au supermarché sont dignes des tribulations d’un aventurier.

* Le titre de l’article est inspiré de l’invariable verso de chaque volume des « Petits riens ».

Les Petits riens, Lewis Trondheim, éditions Delcourt, collection Shampooing, « Arbre en Furie », 125 pages, 9 juin 2015, 9,90 €.

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Li Zhiwu renouvelle l’art de la BD chinoise traditionnelle

Le lianhuanhua, littéralement “images qui s’enchaînent” est un genre en déclin en Chine, méconnu ailleurs… Découvrez la traduction de la BD de Li Zhiwu.

On part en Chine. Mais pas dans la Chine d’aujourd’hui, celle de Xi Jinping. Non. On va assister à la chute de la dynastie mandchoue et à l’avènement de la République de Chine avec la victoire du communisme. « Au pays du Cerf blanc » est, initialement, un récit de Chen Zhongshi publié en 1993, un monument littéraire en Chine qu’il a mis vingt-huit ans à accoucher, une étourdissante fresque historique qui débute en 1911 pour s’achever en 1949, lors de la prise du pouvoir par Mao.

Plutôt que de m’attaquer en 816 pages de la version traduite du roman, (parue aux éditions du Seuil pour les plus courageux), j’ai choisi d’en feuilleter tout autant, mais celles de l’adaptation en bande dessinée réalisée par Li Zhiwu en 2002, dont la traduction française vient d’être publiée. Une adaptation qu’il a choisi de réaliser, selon la tradition de la BD chinoise, en lianhuanhua (ou “images enchaînées”, NDLE).

Une tradition ancienne, millénaire, “mais après 1949, ils ont beaucoup été utilisés par le pouvoir en place pour montrer l’histoire d’une certaine manière et aussi pour mettre en avant l’évolution de la société chinoise”, explique Li Zhiwu.

L’auteur du roman a intégré le parti communiste en 1966. Aujourd’hui ce genre n’est plus vraiment usité en Chine, mais pour lui, c’était incontournable d’employer ce style littéraire pour adapter « Au pays du cerf Blanc ».

Si Li Zhiwu a choisi de respecter une tradition millénaire dans la mise en forme, son style graphique est assez novateur quand on compare son lianhuanhua avec d’autres plus anciens.

“Je m’inspire plutôt d’une tradition issue de la calligraphie ou du dessin de paysages chinois et c’est avec un trait presque caricatural que j’ai eu envie de dessiner les personnages”.

« Au pays du cerf Blanc », Bailuyuan,  page 119 - La Déviation

Li Zhiwu. Crédits Yohan Radomski
Li Zhiwu. Crédits Yohan Radomski

Le style graphique contribue pour beaucoup à l’humour du récit, déjà présent dans les lignes du roman de Chen Zhongshi. Savamment redécoupée, cette bande dessinée traditionnelle qui nous fait parcourir à toute vitesse la vie de ces deux clans : la famille Bai et la famille Lu qui s’affrontent sur le partage des terres, le pouvoir au sein du village du Cerf Blanc…

Au fil des pages et des années, on a l’impression d’être assis au milieu du village à les regarder s’aimer ou se déchirer lorsque les catastrophes diverses, famine, bandits, révoltes s’abattent sur leur village. Et pour ne pas se perdre entre les générations, un petit arbre de chacune des familles a soigneusement été dessinée en fin d’ouvrage.

L’adaptation française en lianhuanhua d’« Au pays du cerf blanc » a été éditée en deux volumes aux éditions de la Cerise. Le tome 2, qui nous mènera jusqu’en 1949, devrait être publié dans quelques mois.

Merci à Yohan Radomski d’avoir traduit les propos de Li Zhiwu.

Au pays du Cerf blanc, Chen Zhongshi et Li Zhiwu, Éditions de la cerise, avril 2014, 29 €.

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Une semaine sur les ondes #11 – 20 octobre

Les radios, en pleine mutation, ne sont pas à une contradiction près. Alors que la RNT patine, que la 4G devient accessible en France et que l’écoute se fait d’ores-et-déjà une fois sur dix sans passer par un poste traditionnel, des radios associatives soutiennent qu’un retour aux ondes moyennes, en AM analogique, serait bénéfique pour contourner la saturation de la FM. Très loin du son multicanal 5.1.

Cliquez ici pour ouvrir la frise chronologique en plein écran et profiter d’une meilleure expérience de lecture. Rafraichissez la page si la frise ne s’affiche pas.

Cette semaine, les Rencontres de la Radio 2.0 se sont tenues à Paris. Comme son nom qui sonne très marketing l’indique, il s’agit de conférences destinées aux professionnels et non aux auditeurs. Ça n’empêche pas d’y glisser une oreille, pour savoir ce qu’on nous prépare.

Dans cette semaine sur les ondes, on retient le commencement du début du top départ du changement – ou non – de président pour Radio France. Nous passons le bonjour à Megacombi, l’émission de critique sociale produite sur Radio Canut.

Plusieurs sujets traités cette semaine referont parler d’eux : la construction d’un robot animateur pour Radio Nova, l’expérience Tweet 2 Rue initiée par France Inter pour donner la parole à des personnes démunies, l’enquête de Radio France qui souhaite savoir pour qui ou pour quoi les Français sont prêts à donner leur vie et enfin l’appel à candidatures pour le Mixage Fou, concours de création sonore.

Tout cela est à découvrir dans notre ligne du temps.

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Encore! bravo

Interview vidéo – “On rajoute le point d’exclamation à la fin du nom pour la gagne. Encore !”

 Découvrez également les morceaux Feelin et Kingdom en session live sur notre site.

On est le 25 mai 2013 et c’est mon premier contact visuel avec ce groupe, découvert en amont via la compilation Novorama Indie Bands 2013. Trois gars qui te balancent un son electro comme t’aimerais entendre en boîte. Fais en live. Et c’est là que réside la magie du groupe.

Du bon gros son produit tel un DJ set. Et  avec ça, visuellement, ils arrivent à transformer une petite salle de concert parisienne en discothèque, tout en restant dans l’esprit très noble qui veut qu’un live reste un live. Sans ordi, sans triche. Respect.

Aux manettes, un trio : Guillaume, Charles et Baudoin, trois Versaillais déjà présents dans divers projets séparés, qui se retrouvent autour de cette formation explosive. Le groupe a deux ans et on sent déjà le potentiel d’un petit groupe qui a tout pour conquérir l’espace intersidéral de la musique electro-pop. On en demande encore. D’ailleurs ils ont cette chance inouïe d’avoir un nom que le public reprend en cœur à la fin de leur concert. “Encore! Encore! Encore!”

Coté sorties, ils en sont à leur deuxième EP, remixé par Julien Briffaz (de chez LAGO). On y retrouve plus de recherches, de voix trafiquées et moins de boucles, qui apparaissaient quelquefois un peu lassantes et répétitives dans leur 1er EP.

Pour ce deuxième round on commence avec Let It Up. Clairement une musique de boîte. Hyper répétitive, mais au final pas lassante du tout quand on se trouve dans une ambiance boîte disco bien arrosée. Bonne musique pour chanter les bras en l’air après une bonne pinte payé 7 €.

Encore avec Talents Frais making of - La Déviation
Making of de l’enregistrement avec Encore!

Next : You Should. On reste dans cette ambiance de boîte avec un petit côté dramatique rajouté par des violons, très spacio-robotique, ma préférée de l’EP. Ensuite, Kingdom (à retrouver en live ). Un début à la Falcon PUNCH, qui néanmoins perd un peu de sa valeur avec cette voix trafiquée à mort qu’on retrouve sur l’intro. Je reste d’ailleurs très sceptique quant à la réelle utilité de ce rajout qui gâche un peu ce morceau, néanmoins très entraînant à écouter en live.

Et on termine par J&L. Le titre qui sort du lot, moins rythmé et qui tend plus vers un petit côté moralisateur. Et qui au final rend très bien, soit dit en passant. Soit au final une création disco, dansante, rythmée et en évolution. À écouter, encore et encore.

Côté clip, leur premier, sur le titre Heavy disco est sorti l’an dernier. Au programme, une carte blanche laissée à la réalisatrice Marjory Déjardin, accompagnée par Fred Tribolet pour les incrustes. On y retrouve des extraits de films de voyages ainsi qu’une vidéo prise lors de leur concert à la Plage de Glazart (Paris, 19e) , l’an dernier.

À bien observer ce clip, on remarque que les visages de nos amis ne sont jamais montrés complètement. On retrouve là leur volonté d’apparaître plus en tant que DJ qu’en véritable groupe. La musique avant tout (swag).

Coté actu du groupe, on le retrouvera très prochainement sur un remix des Naive New Beaters, sur plusieurs dates parisiennes et un rendez-vous aux Bars en Trans 2013. Et ouais. Encore!

Écoutez également sur notre site “Talents Frais #1 le podcast” avec Encore! en invités.

Talents Frais - Cultivateur de nouveaux talents

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Une semaine sur les ondes #4 – 9 juin

L’international domine cette chronique dominicale. Les émetteurs d’ondes courtes s’éteignent les uns après les autres, le changement de nom de Radio Canada provoque un débat national, tandis que des reporters risquent leur vie en Syrie. C’est une nouvelle semaine sur les ondes.

À la une

Savez-vous que l’hymne nord-coréen nous traverse tous les jours. Il est dans l’air, insaisissable, à moins de posséder un poste radio qui reçoit les ondes courtes.

Voice of Korea (j’en reparlerai prochainement), Iran French Radio, Radio Chine Internationale, mais aussi Radio Prague, la BBC, la Deutsche Welle, NHK World, Radio Prague et bien d’autres* diffusent des programmes en langue française grâce à des antennes gigantesques qui se trouvent parfois à des milliers de kilomètres des auditeurs. Les ondes courtes véhiculent autant la propagande que des informations vitales, dans des zones désertiques ou en guerre par exemple.

Sauf que celles qui ont connu leur heure de gloire pendant la guerre froide sont aujourd’hui en voie de disparition. Les réductions de coûts et les changements de stratégies ont eu raison de Radio Bulgaria, Radio Canada International et Radio Netherlands Worldwide ces derniers mois. L’épée de Damoclès plane aussi au-dessus de RFI.

Alexis Ipatovtsev l’avait regretté en janvier sur France Culture.

Le site Syntone vient de publier une interview passionnante de Thomas Witherspoon, fondateur et directeur de l’ONG Ears To Our World. Le radioamateur reste optimiste quant à l’avenir des ondes courtes. Il souligne qu’on “commence à utiliser les ondes courtes pour transmettre des données numériques vers des pays privés d’internet libre, comme la Chine”.

* Vous trouverez ici un annuaire des radios internationales qui proposent des programmes en langue française.

Hot news

Les noctambules français seront-ils bientôt désorientés ? Ceux qui ont l’habitude d’écouter les programmes de la nuit sur France Info connaissent les journaux de Radio Canada, qui sont diffusés comme ceux de la RTS et de la RTBF. Or, l’indicatif changera bientôt.

Les différentes chaînes francophones uniformiseront bientôt leur nom pour officiellement, donner une image plus dynamique au groupe. Les noms des radios et des télés commenceront par “Ici”. Arrêt sur Images relevait cette information vendredi. Le spot explicatif ne suffit pas à convaincre.

L’idée, qui coûte 400.000 $ rien qu’en dépenses de communication fait presque l’unanimité contre elle. Gouvernement, syndicats et auditeurs se rebiffent. Beaucoup craignent que ce soit une façon de mettre de côté le caractère national du diffuseur, dans un pays où la question de l’indépendance du Québecoise reste posée.

On l’a appris cette semaine, des Assises de la radio se tiendront “à l’automne prochain“. C’est ce qu’a annoncée la ministre de la culture Aurélie Filippetti lors des Assises de l’audiovisuel, au Grand Palais, à Paris. Ces assises devraient confronter les professionnels historiques de la radio, aux nouveaux venus de l’ère numérique.

Radio Campus Paris (93.9 FM, de 17 h 30 à 5 h 30) a fêté ses quinze ans, lundi, au cours d’une émission spéciale (à écouter ici). Laurent David des Inrocks a interviewé Felix Paties, le président de la radio étudiante. Preuve de l’intérêt des jeunes pour la radio, les propositions de bénévolat affluent.

Et puis le journaliste d’Europe 1 Didier François, grand reporter, habitué des zones de guerre a été enlevé par des hommes en armes en Syrie, jeudi. Il était en compagnie du photographe Édouard Elias et d’un assistant et traducteur. Le Quai d’Orsay n’a pas de nouvelles du groupe.

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Didier François d’Europe 1 et Edouard Elias, journaliste indépendant, ont été enlevés jeudi en Syrie. DR

Michel Puech propose un portrait des deux français sur son blog. Leur travail relève de l’intérêt international. Comme leurs confrères américains, italiens et d’autres nationalités, ils doivent être libérés.

Décalage

Parmi les dizaines de Tumblr qui passent sur mon écran chaque semaine, “J’ai un physique de radio” m’a évidemment tapé dans l’œil pour son nom. Et parce que les journalistes aussi ont de l’autodérision.

Quand quelqu’un débouche une bouteille pour un pot - "J'ai un physique de radio"
Quand quelqu’un débouche une bouteille pour un pot – Tumblr “J’ai un physique de radio”

Restez connectés et à la semaine prochaine !

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Une douzaine sur les ondes #2 – spécial Cannes

Une fois Cannes débarrassée des images de son tapis rouge, du Grand Journal et des yachts plaqués or, on parle enfin de cinéma. Si un média peut mieux que tout autre délaisser les dorures pour traiter vraiment du 7e art, c’est bien celui qui stimule l’imaginaire, c’est bien la radio. Voici ce qu’il ne fallait pas rater de la douzaine cannoise sur les ondes.

La meilleure initiative web touchant au festival n’est pas sonore, mais elle est due à Radio France. Le groupe public a dépêché les dessinateurs Catherine Meurisse (à La Déviation, on l’aime bien) et Erwann Surcouf sur la Croisette pour qu’ils croquent les scènes de la vie médiatique cannoise. Un reportage dessiné dans les coulisses, à l’image du travail réalisé par Mathieu Sapin pendant la campagne présidentielle. Erwan Surcouf avait déjà collaboré avec Boulet pour couvrir le festival 2012 dans les mêmes conditions. Ses anciens dessins sont visibles sur son blog.

Pour avoir parcouru les mêmes chemins cannois que Meurisse et Surcouf, sans y trouver plus qu’eux ma place, je peux vous garantir que leurs dessins touchent juste. Les scènes cocasses décrites ne sont même pas caricaturales, tant ce festival offre à chaque coin de couloir des situations qui sortent de l’ordinaire. Leur travail se savoure sur ce site, par ordre chronologique et complété par des tweets de festivaliers, eux aussi souvent bien sentis. La meilleure trace à garder de ce grand cirque. À moins que vous ne préfériez les billets quotidiens d’Antoine Guillot sur France Culture.

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Le cinéma inspire souvent les réalisateurs… de radio. Ainsi, cette liste d’émissions au noms évoquant des films, proposée par Le Transistor.

Les archives d’Arte Radio nous permettent de faire un bon dans le passé. Encore faut-il savoir que les reportages d’Arte ont une décennie, car les indices sont minces pour le deviner. Les photo-amateurs sur escabeau qui n’ont pas mis les pieds dans une salle obscure depuis trente ans, les professionnels du cinéma qui se plaignent de la piètre qualité du marché, les critiques qui se souviennent, nostalgiques, du temps où Cannes était une fête avant d’être une salle des ventes géante, etc. Tous sont encore présents aujourd’hui. Cannes, serait-ce éternellement mieux avant ?

Depuis 2003, Arte a semble-t-il lâché l’affaire de la radio pendant le festival pour se concentrer sur le nautisme.

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Parmi les émissions qui parlent de cinéma à la radio, on ne peut pas zapper Le Masque et la plume, émission créée neuf ans après le premier festival de Cannes, c’est-à-dire il y a 58 ans !

Le concept des chroniqueurs qui éparpillent les sorties de la semaine façon puzzle a fait des petits chez les cinéphiles. Je citerai en priorité Extérieur nuit, chaque mercredi, à 20 h, sur Radio Campus Paris. L’occasion de faire un clin d’œil à cette radio associative étudiante qui fête cette semaine ses quinze ans.

Ses chroniqueurs iront peut-être un jour sur Télérama Radio pour opérer le même exercice, dans l’émission Séance tenante, dont plusieurs numéros ont été réalisés pendant Cannes 2013.

Petite annonce : cherche le nom d’une émission entièrement consacrée aux sorties cinéma, écoutée par hasard à Bruxelles, un début d’après-midi, en décembre, sur une radio associative aux moyens limités (la diffusion avait été interrompue soudainement, puis le top horaire de 14 h avait été remplacé par celui du 21 h). L’émission, très longue, interminable même, valait autant par la passion de ses chroniqueurs que par leur savoureux accent. S’agissait-il de Radio Alma, Radio Panik, Radio Campus ou d’une autre station ? Merci d’éclairer ma lanterne. #passérieuxsabstenir

Petit détour par les alpages pour finir. Vous aurez le plaisir de découvrir l’émission Chinese Theater sur la RTS. Catherine Fattebert revient sur des films qui ont marqué leur art, chaque samedi et dimanche. Un très bon prétexte pour réviser l’Histoire. Ce dimanche, c’est “The Servant”, de Joseph Losey, qui est à l’honneur.

Cette chronique reprendra son format normal dimanche prochain. En attendant, si vous me lisez de nuit, n’oubliez pas d’allumer France Info pour écouter sa bande son spéciale musique de films !

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Une semaine sur les ondes #0 – 25 mars

Beaucoup de vidéos dans cette première revue de web sur l’univers de la radio. Contradictoire ? On peut se poser la question, à l’heure où chaque station multiplie les captations filmées, les applications web et qu’un film s’apprête à sortir en salles, donnant à voir des voix, celles de Radio France. L’expérience radiophonique évolue en permanence et heureusement, certains prennent pour nous le temps de la décrypter. C’est une semaine sur les ondes, une semaine sur les réseaux.

À la une

Le web ouvre de nouvelles perspectives aux “vieux médias” et la radio n’est pas en reste. Radio France continue d’investir dans le numérique. Le groupe public, par l’intermédiaire du Mouv’, est à l’initiative de “Co³, la science dans ton chez toi”, une pastille lancée jeudi 28 mars, à 18h42 précises. Chaque semaine, trois colocataires, Dorothée, Swan et Axel, vont répondre à une question scientifique ayant trait à la vie quotidienne, dans la toute nouvelle émission Pop Corn. Le genre d’initiative qui pourra, peut-être, remettre la station sur les bons rails.

L’expérience se poursuit sur un site, construit tel un webdocu, mais où l’audio remplace la vidéo. Des lecteurs sont disséminés dans plusieurs pages, lesquelles représentent les pièces de la colocation. C’est beau et intuitif. Dorothée, Swan et Axel, colocs’ et journalistes scientifiques dans le civil, possèdent chacun un compte Twitter.

 

Hot news

Dans le reste de l’actualité radio, il y a peut-être le bout du tunnel pour Bretagne 5. Le CSA organise bientôt une consultation publique en vue de lancer un appel à candidatures en ondes moyennes, à Paris, Bayonne et Saint-Gouéno (Côtes-d’Armor). Bretagne 5 est pour l’heure une association qui dispose de tout le matériel pour émettre en AM sur une partie de la Bretagne, des studios à l’antenne située à Saint-Gouéno. Il ne lui manque qu’une fréquence. La consultation prendra fin le 30 avril. Et si la AM faisait son revival ?

Et quand je vous dis que les passionnés de Bretagne 5 ne font pas les choses à moitié…

 

La radio, c’est aussi de l’éco, et de ce point de vue, les nouvelles ne sont pas trop mauvaises compte tenu de la sinistrose ambiante. Les recettes brutes de la radio baissent de 1,3 % au mois de février. Sans transition, Denis Olivennes, président de Lagardère Active, a accordé une interview au Figaro.fr. Il en a profité pour démentir toute vente de Virgin Radio à NRJ. La station, qui affiche désormais son positionnement pop, vient de lancer une campagne de communication mettant l’accent sur sa playlist, davantage que sur ses animateurs. Il faut dire que Cyril Hanouna n’est pas certain de rempiler en septembre.

 

Loin de toutes ces considérations, les élèves du lycée Suger, à Saint-denis, ont hébergée, lundi, dans leur MDL (Maison des lycéens), un studio de France Info. Plus qu’un simple atelier, le 10-12 d’Agnès Soubiran y était carrément délocalisé, dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias à l’école.

La vidéo réalisée à cette occasion est tournée par les élèves de la section audiovisuelle.

Avant-goût

La sortie en salles de “La Maison de la radio”, le film de Nicolas Philibert, est imminente. Si vous avez raté les avant-premières à Brest et Berlin, il se pourrait bien que les nouveaux extraits diffusés par “Les films du losange” vous intéressent. Vous pousserez peut-être même plus loin en consultant l’interview du réalisateur sur Rue89. Nous en parlerons plus longuement dans quelques jours.

Temps long

Si Nicolas Philibert a pris le temps de filmer les voix, les auteurs du blog Syntone prennent quant à eux le temps d’écouter la radio changer. Le numérique – on y revient – modifie notre façon de consommer la radio, et ce n’est pas sans interroger la façon dont on doit la produire. Quatre billets sont programmés, le premier est paru jeudi et il ne faut pas le rater.

 

Dans le rétro

On termine cette revue du web par un petit saut dans le temps. Ce n’est pas vieux, février 2011, mais depuis, quelque chose a changé. Baffie n’est plus à la radio. “Howcast, le nectar de la bande FM” propose d’écouter un medley de deux émissions au ton… baffiesque, dans lequelle on entend (et c’est rare) Denis Olivennes. Et la boucle est bouclée.

Bonne semaine et n’oubliez pas, restez à l’écoute !

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Carnet de bord d’un apprenti écrivain

Il a Pascal Quignard pour maître, Amélie Nothomb pour modèle. Son projet ? Écrire un livre. Sur quoi ? Il n’en sait rien, il verra bien. Ce recueil de strips désopilant est l’anti-recette de l’auteur accompli.

Sur un scénario de Jean-François Kierzkowski, accompagné de Mathieu Ephrem au dessin, « En route pour le Goncourt » paru aux Éditions Cornelius, retrace les tribulations d’un amateur pas éclairé du tout qui se lance dans l’écriture. Mais attention, par n’importe laquelle, l’écriture d’un livre à succès, d’un livre à prix littéraire même !

Hé hé ! c’est parti pour le roman du siècle

Du choix de l’intrigue, au nom du héros, de l’hésitation sur le titre, à la relecture des amis…On suit le scribouillard dans l’écriture de sa prose. « Syndrome de Stockholm », « insomnies », ou « vachement truc », chaque strip est précédé d’un titre décalé, à l’image de ses pérégrinations cérébrales.

En route pour le Goncourt, Kierzkowski et Ephrem, Cornelius | So Ouest

Le graphisme minimaliste présente le héros à sa table de travail, sa table à manger, sa chambre à coucher ou dans une scène figée de promenade à bicyclette, il ne reste plus qu’à glisser quelques bons mots dans les bulles pré-dessinées. On ne leur en veut même pas pour ces scènes répétées inlassablement car l’efficacité de l’écriture transcende le reste.

L’apprenti écrivain accumule les déboires, et son désarroi égale sa personnalité comique. Faute de méthode, il s’inscrit à des cours d’écriture par Internet, qui se révéleront fertiles en conseils avisés… employés à tort.

Désopilant jusqu’à la fin, notre écrivain en herbe imagine déjà ses répliques pour briller dans les salons littéraires (« Yasunari Kawabata ? La traduction fait perdre beaucoup à l’oeuvre »)… avant même d’avoir envoyé son manuscrit !

“Ecrire, trouver le mot juste, c’est éjaculer soudain”

En route pour le Goncourt, Kierzkowski et Ephrem, Cornelius | So OuestLe joyeux drille aux allures de Mister Bean n’en finit pas de faire des erreurs et chaque strip est un gag subtilement emprunt de grandes références littéraires (Amélie Nothomb pour ne nommer qu’elle) et de faits divers historiques. Albert Camus s’est tué en voiture avec Michel Gallimard : « si je croise un éditeur et qu’il me supplie de monter sur le porte-bagages, je refuse catégoriquement ».

La propension de l’écrivain à citer les autres, à défaut de composer lui-même, nous fait découvrir des perles insoupçonnables mais véridiques. « Pascal Quignard (mon maître) a dit : Écrire, trouver le mot juste, c’est éjaculer soudain. Oh oh, j’espère que je n’aurai pas d’idée géniale en dormant ».

C’est parce qu’il n’est ni spirituel, ni poète, ni philosophe que l’on s’attache à cet écrivain sans nom. Tellement plus spontané mais tous aussi assoiffé de succès que ceux qui publient irrémédiablement un roman avant la rentrée littéraire.

« En route vers le Goncourt », n’est pas à l’image de son protagoniste, c’est un petit ouvrage sans prétentions qui parvient à atteindre l’universel. Le festival d’Angoulême dans ses bons choix, (notamment un autre ouvrage des éditions Cornelius, Une vie dans les marges) en a toutefois oublié certains. C’est dommage, on leur aurait bien donné un fauve d’or aussi.

En route pour le Goncourt, Jean-François Kierzkowski, Mathieu Ephrem, Editions Cornelius, 11 €

En route pour le Goncourt, crédits J.F. Kierzkowski, M. Ephrem | So Ouest

En route pour le Goncourt, crédits J.F. Kierzkowski, M. Ephrem

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Le Street Art Stencil book

Un pochoir et un coup de peinture en spray, pas besoin de plus pour la vingtaine d’artistes présentés dans ce très bel ouvrage des éditions Alternatives. En deux pschitt, ils dénoncent, détournent, désamorcent…

L’art du pochoir urbain est rarement au programme des cours d’arts plastiques. Il est pourtant l’un des plus accessibles. Au détour d’une rue ou d’un kiosque à journaux, Jef Aérosol, Btoy, Logan Hicks ou Bandit nous présentent leur version des faits. Politique, société de consommation, solidarité ou tout simplement expression artistique : pas besoin de changer de salles, ou d’étages : le musée est dans la rue et l’expo est partout où le regard voudra bien se poser.

Ça ne date pourtant pas d’hier ces silhouettes prédécoupées dans le carton. Blek le Rat sévissait déjà en France et en Europe dans les années 60 et 70, imposant le pochoir comme un élément phare de l’artiste urbain dans le coup. On a retrouvé à sa suite John Fekner, Jef Aérosol ou encore Ernest Pignon Ernest. Plus rapide qu’un tag, un détail important lorsque le travail se confronte à la police, le pochoir est un graffiti pouvant se reproduire à l’infini sans s’altérer. Ce qui n’est pas sans s’attirer le mépris des puristes du graff…

Crédits Jef Aerosol

Les pochoirs étonnent, détonnent souvent, sans doute car « leur emplacement fait souvent partie intégrante de l’œuvre finale ». L’ouvrage des éditions Alternatives, ne nous inonde pas de textes explicatifs ni de commentaires élitistes. Les photos sonnent simplement comme un appel à l’esprit critique, un coup de poing pour cesser de regarder les panneaux publicitaires de chez Decaux comme on regarde la vie, blasés.

Après l’interview retranscrite de Blek Le Rat, chaque double page présente succinctement le travail et le parcours des artistes urbains et s’accompagne de photos des pochoirs en situation. Et, afin de comprendre la finesse du travail de découpe, ou tout simplement pour s’amuser, on peut aussi utiliser l’un des vingt pochoirs présents dans l’ouvrage. Un lance-missiles, un nain qui skate, ou un globe terrestre qui se met à sonner… c’est au choix. Qu’on le mette sur la boîte aux lettres ou le mur du voisin, ce sera toujours un peu de liberté d’expression, à reproduire à l’infini.

Pochoir (à gauche) présent dans le Street Art Stencil Book

Le Street Art Stencil Book, éditions Alternatives, collectif, 30 €.

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Afghanistan, la bande décimée

Ils ont l’âge des soldats mais ces six illustrateurs se sont fixés une autre mission : témoigner pour eux et raconter la guerre d’Afghanistan en BD. Un récit entre invraisemblance et dénonciation.

C’est un anniversaire tout rond, dix ans. Dix ans que l’Armée française a commencé à envoyer des soldats en Afghanistan. « Nous sommes tous américains » qu’ils disaient, au lendemain du 11 septembre. La France, membre de la Force internationale d’assistance et de sécurité comme quarante autres pays, s’engage aux côtés des Etats-Unis pour chasser l’ennemi commun : Oussama Ben Laden, renverser le régime taliban en place et lutter contre Al Qaida. Des centaines de milliards de dollars plus tard, 8980 morts du côté des forces ingérantes, dont 78 soldats français, de 76 à 108 000 talibans et plus de 116 000 civils tués*…voilà qu’on annonce le retrait des troupes.

Tout se chiffre, sauf le traumatisme de la guerre. Pour les éditions FLBLB, Lisa Lugrin, Clément Xavier, Guillaume Heurtault, Lucie Castel, Maxime Jeune et Robin Cousin ont l’âge des soldats, mais ces jeunes recrues se sont engagées dans une autre mission : mettre des visages sur ces soldats envoyés en mission.

Par l’humour, l’imaginaire, le burlesque ou la satire, ils nous donnent à voir une guerre autrement plus humaine qu’un décompte quotidien du nombre de blessés. Afghanistan, récits de guerre, ou comment une « psy-op », tombe en embuscade, quand d’autres organisent des gueuletons pour satisfaire un ministre de la défense en visite, et sa cour de journalistes. En Afghanistan, la vie s’écoule entre les bitures avec des soldats de l’Alliance afghane, l’attente interminable d’un ordre de la hiérarchie ou la guerre du protocole pour savoir qui doit ouvrir les portes ou céder son lit quand on a eu l’audace d’enfreindre les règles.

Aquarelle, fusain, feutre, ambiance comics ou cahier à coloriage, finalement la critique prend tournure et les graphismes se mélangent pour n’en former plus qu’un : celui d’un groupe de jeunes dessinateurs plein d’espoirs et qui ont eu le talent de dessiner l’absurdité d’une guerre dont les acteurs ne communiquent pas, où les soldats ne savent pas, ou plus ce qu’ils font là…

De ce recueil on ne retient pas toutes les histoires, qui tournent parfois au cauchemar d’un trauma post-combat, ni tous les personnages, mais on comprend un peu mieux ces soldats, toujours anonymes, sauf lorsqu’il s’agit de leur remettre des légions d’honneur posthumes. De quoi encourager le rapatriement des 3800 soldats français encore stationnés sur place.

* les chiffres sont extrait d’un article du site d’information OWNI.

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Afghanistan, récits de guerre, Éditions FLBLB, 15 €.

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C’est l’histoire d’une fille qui aime une autre fille

Un texte poignant pour un récit efficace et militant, le premier roman graphique de Julie Maroh questionne la place des homosexuels dans la société.

Le bleu est une couleur chaude, c’est une histoire d’amour entre deux jeunes filles. Tout commence par une rencontre, un regard échangé dans la rue qui dure quelques secondes seulement et pourtant, Clémentine est perturbée par cette fille aux cheveux bleus. Incapable de mettre des mots sur cette obsession, elle se met à faire des rêves, érotiques, où l’amant est… une femme. Auto-censure, honte, déni, voilà la jeune lycéenne en proie aux doutes. Chaque point bleu qui l’entoure est comme une oriflamme à la mémoire de cette rencontre.

« Je suis une fille et une fille ça sort avec des garçons. »

Le récit se fait à travers le journal intime de Clémentine, les dessins à travers son regard. Afin d’éloigner ses idées qui la surprennent, elle va se jeter dans les bras d’un garçon car après tout, « je suis une fille et une fille ça sort avec des garçons » répète t-elle. L’idylle ne dure pas, et tout bascule un soir, où elle recroise la fille aux cheveux bleus, Emma. Étudiante aux Beaux-arts, plus âgée, plus affirmée aussi, elle considère son orientation sexuelle comme un acte politique, une source d’identification dans un courant artistique.

Clémentine refuse d’admettre qu’elle est « lesbienne » même si elle doute. « J’ai l’impression que tout ce que je fais est contre nature, contre ma nature ». Entre les réflexions homophobes de ses parents, ses amis qui lui tournent le dos, elle réalise que son histoire d’amour ne peut être qu’intime, mais s’inscrit dans un contexte social, où il faut sans cesse s’assumer, revendiquer son droit à une sexualité différente… Parfois elle se laisse gagner par le doute, « Pour Emma, sa sexualité est un lien vers les autres. Un lien social et politique.. Pour moi, c’est la chose la plus intime qui soit. » Peu à peu, Clémentine va se laisser apprivoiser par Emma, l’amitié va se transformer en tendresse, puis en amour, malgré la pression qui l’entoure.

Représenter une réalité qui n’existe pas dans la littérature

L’histoire est une succession de flash-back rondement menés par Julie Maroh : le temps du souvenir est en sépia teinté de bleu parfois, le présent est lui tout en couleur. Tout au long du récit, l’auteur nous suggère des regards, des visages qui souffrent, qui s’interrogent, des mains qui se frôlent, qui s’accrochent. Le couple se cherche, lutte contre l’attirance réciproque puis la partage, enfin. Les scènes d’amour, se situent entre érotisme et poésie et nous ramènent à une réalité : est-ce à ce point tabou pour qu’on en retrouve si peu en bande dessinée ?

Lauréate du prix du public à Angoulême en 2011, l’auteur a déclaré au magazine Têtu (un mensuel gay et lesbien) qu’elle était heureuse « d’avoir reçu, plus particulièrement, le prix du public (…) Je trouve ça bien qu’une thématique lesbienne ait réussi à toucher le public dans son ensemble. Les lecteurs ont reçu cette histoire entre deux femmes comme une histoire d’amour comme toutes les autres. » Dans une autre interview, l’auteur, homosexuelle, a expliqué son envie, son besoin de représenter une réalité qui n’existe pas dans la littérature, une réalité qui est la sienne.

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Le Bleu est une couleur chaude, Julie Maroh, Glénat, 15 €.

Édition : Le 26 mai 2013, le film La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche, avec les actrices Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux, inspiré de cette bande dessinée, a remporté la Palme d’Or, décerné par Steven Spielberg, président du jury du 66e festival de Cannes.

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Paroles d’auteurs : la BD se livre

Un livre sur la bande dessinée, sans case ni phylactère…il fallait oser. Avis d’orage dans la nuit, n’a pas eu besoin de bulles pour parler neuvième art, c’est justement dans le cocon créatif de ses penseurs qu’il nous a introduit.

Pour la première fois à la maison d’édition l’Association, le livre s’accompagne de sons. A la fin de l’ouvrage, on découvre un CD de 6h40, où 26 scénaristes et dessinateurs se sont laissés approcher par Christian Rosset, producteur à France Culture, dans le cadre de l’émission des « Passagers de la Nuit » (un rendez vous de création radiophonique aujourd’hui malheureusement disparu).

« Si on m’empêche de dessiner : je meurs.»

Avec David B, Anne Baraou, Fanny Dalle-Rive, Jean-Christophe Menu ou encore Riad Sattouf (La vie secrète des jeunes), on évolue d’ateliers en ateliers, au son des plumes qui grattent le papier, des bruits de gommes et des traits de crayons. Car si ces rencontres se démarquent par la qualité du dialogue mené, Christian Rosset a su mettre en résonance les souvenirs des auteurs. Tandis qu’Emmanuel Guibert (Le photographe, Sardine de l’espace, Des nouvelles d’Alain) donne une définition poétique du livre, « un cœur qui bat, des pages qui se tournent », Pascal Rabaté évoque le manque de pudeur du cinéma tandis qu’en BD, « c’est beaucoup plus dur de faire chialer ». Pour dessiner, Joanna Hellgren (Frances, mon frère nocturne) écoute la radio, regarde la télévision, aime qu’on lui parle « pour résister à l’envie d’aller dehors », se promener. Baudouin, lui, “dessine pour que la vie se continue“, comme en écho, Florence Cestac (Le concombre masqué, La véritable histoire de Futuropolis) annonce “si on m’empêche de dessiner : je meurs“.

Avis d’orage dans la nuit est également un livre, un recueil d’e-mail échangé entre Thomas Baumgartner et Christian Rosset tout deux passionnés de radio…et de BD. Intimement convaincus de l’existence d’une passerelle entre ces deux moyens d’expression.

«Une bande dessinée est unique à son lecteur, une émission de radio est unique à son auditeur…»

…explique le producteur des Passagers, qui poursuit, « la radio nous donne les voix et les sons. À nous d’imaginer le reste, les couleurs, les décors, les visages, les espaces. La bande dessinée nous donne les couleurs, les décors, les visages, des indices d’espaces. À nous d’imaginer les sons et les voix ». Derrière les voix des artistes, on découvre ou on redécouvre leur univers graphique, leur engagement, leur vision de la vie. Faute d’images illustrant le travail de chacun, Avis d’orage dans la nuit nous invite à se remémorer les lectures passées, ou à aller découvrir les auteurs inconnus, un petit jeu de piste en forme d’intéro visuelle.

Bien plus que de banales interviews d’auteurs, ces paroles dévoilées, pudiques et sincères annonceraient plutôt le soleil, après l’orage. Comme pour les Passagers, la nuit est une invitation à la confession. Sous forme de regards croisés, où les deux hommes de radios ont mis sur papier leur sentiment et où les artistes du pinceaux et du crayon se sont laissés parler, tous les protagonistes de cet album se mettent à nu, dévoilant leurs rêves, leurs envie de créer (en dessins, ou en sons) toujours à la recherche de nouvelles formes d’expression.

Avis d’orage en fin de journée, Christian Rosset, L’Association, 19,29 €.

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