Beaucoup de censure (ou non) cette fois-ci dans Une semaine en musique. C’est la tendance du moment. Le taulier, David Bowie, est toujours autant surprenant, tandis que des jeunots comme Asaf Avidan démontrent toute leur créativité. Attention, du glamour (ou non) et du air guitar (ou non) peuvent également faire leur apparition dans cette sélection.
Lana Del Rey – Young & Beautiful
Devenue une véritable icône de mode, Lana Del Rey ne laisse personne indifférent depuis ses succès de 2012. En ce mois de mai, elle est de nouveau au cœur de l’actualité avec Young & Beautiful. Ce dernier titre fait partie de la bande originale de Gatsby le Magnifique, film événement qui fait aujourd’hui l’ouverture du 66e Festival de Cannes. Univers très Art Déco pour ce clip baigné par cette atmosphère glamour et mystérieuse qui caractérise tant la chanteuse américaine.
The National – Sea of Love
Un plan fixe pour ce nouveau titre des excellents membres de The National. Bon, le cadre de la vidéo ne paye pas de mine, mais on peut déclarer sans retenue que Sea of Love est une nouvelle pépite du rock indépendant américain. Matt Berninger et sa bande livrent une prestation sans filet pendant quatre minutes chrono. Mention spéciale pour ce petit gars au premier plan et son innocent air guitar (Gunther Love, t’es tu trompé de clip cette semaine ?). Le titre sera présent sur l’album Trouble Will Find Me, dans les bacs le 21 mai.
David Bowie – The Next Day
Ah ce David, il n’en est plus à sa première polémique ! Retirée de YouTube, quelques heures après sa mise en ligne, la vidéo de The Next Day mêle sang, sexe et religion. Elle a tout de même fini par apparaître de nouveau, avec un accès restreint. Dans un décor lugubre, à mi-chemin entre maison close et église, c’est le grand n’importe quoi autour du gourou Bowie. On y croise, entre autre, un Gary Oldman en prêtre et une prostituée madone interprétée par Marion Cotillard. Si ça ne vous plaît pas, je vous propose une virée dans l’espace.
Sin Fang – What’s wrong with your eyes
Sin Fang, ou pour les LV1 islandais, Sindri Már Sigfússon, a révélé cette semaine le clip de What’s wrong with your eyes, chanson présente sur Flowers, son dernier album sorti au début du printemps. Des arrières plans pris dans les flammes, des pièces sans issue, un groupe étrange vêtu de foulards de la tête aux pieds… Dans cette vidéo, on oscille entre rêve/cauchemar et réalité. Ce grand créatif sera au Café de la Danse le 28 mai prochain avec à ses côtés Pascal Pinon, un groupe nordique à découvrir au plus vite également.
Sarah W_ Papsun – 5″
5 secondes, c’est le temps qu’il vous faudra pour adorer ce nouveau titre des six parisiens de Sarah W_ Papsun. Après un passage remarqué aux Transmusicales de Rennes en décembre dernier, le groupe a dévoilé un nouveau clip tout en noir et blanc avec en guest-star l’excentrique Gunther Love des Airnadettes. Leur album est sortit ce 13 mai. 5, 4, 3, 2, 1 ! Courez vous le procurer !
Sexy Sushi – Je doute
Le duo électro français est en concert ce 15 mai au Trianon de Paris et c’est encore une bien belle vidéo qu’il nous a livré cette semaine. Pour mettre en images Je doute, nouvel extrait de Vous n’allez pas partir les mains vides, Sexy Sushi nous a tout simplement compilé ce que la toile nous offre de meilleur en photos très, très étranges ou très, très moches. Je n’ai aucun doute sur l’effet que ce clip produira sur vous.
Asaf Avidan – Love it or Leave it
Asaf Avidan, qui sera de tous les festivals dans les semaines à venir, a bénéficié d’un buzz médiatique non négligeable avec la mise en ligne du clip Love it or Leave it. Censure ou non, c’est sans aucune pudeur, vulgarité et sexualité que des femmes et des hommes se déhanchent tour à tour sur les rythmes entraînants de ce dernier single. Un seul visage en commun, celui de l’artiste israélien, pour une chorégraphie endiablée.
Connaissez-vous Catherine Meurisse ? Non ? Allez un petit effort… Vous avez peut-être déjà croisé son nom dans les pages de Charlie Hebdo et d’autres titres car elle est dessinatrice de presse. Parallèlement, elle réalise des publications en solo ou en collaboration, à l’image de l’édition anniversaire 2010 du Petit Larousse, en illustrant des mots de la langue française.
En 2008, elle fut saluée par ses pairs pour Mes hommes de lettres, une bande dessinée qui met en scène les grands noms de la littérature française avec une certaine dose d’humour. EN mars 2012, elle est revenue avec un nouvel opus toujours autant bourré de talent. Cette fois-ci le bébé se prénomme Le pont des Arts et revient sur les relations parfois amicales, passionnées ou tumultueuses, qu’ont pu entretenir peintres et écrivains français à travers différentes époques.
C’est ainsi qu’au fil de ces 110 pages, nous sommes amenés à croiser un Charles Baudelaire en pleine visite guidée nous apprenant la différence entre un chef-d’œuvre et une croûte, plus loin nous saurons enfin pourquoi le vol de La Joconde a fait gagner un poème à Guillaume Appolinaire. Marcel Proust, Pablo Picasso, Denis Diderot, et j’en passe, sont également du voyage.
Divertissante et enrichissante, cette BD ne se veut pas élitiste, loin de là, c’est justement un moyen efficace de s’instruire pour éviter les biographies fleuves de grandes figures françaises ou la file d’attente devant le musée.
Catherine Meurisse, tout en gardant son style, a reproduit avec soin de nombreux tableaux (Le bain turc d’Ingres, Impression, soleil levant de Claude Monet, Un enterrement à Ornans de Gustave Courbet). L’idéal est de lire l’une des dix histoires présentes et de pianoter ensuite sur son ordinateur le nom des œuvres rencontrées au cours de sa lecture pour en savoir plus, les comparer avec les traits de la dessinatrice.
À la fin de la bande dessinée vous trouverez également un index des personnalités citées pour ne pas se perdre durant la visite. Le pont des Arts, un véritable concentré d’anecdotes pour enfin briller au Trivial Pursuit et remporter ce fichu camembert marron.
Le Pont des Arts, Catherine Meurisse, Éditions Sarbacane, 2012, 19,90 €.
La radio a pris le temps de souffler cette semaine. Le mercato attendra bien que l’on traverse le pont. Et lorsqu’on parle de reprendre sa respiration, c’est vers France Culture qu’on se tourne. Le retour au pouvoir des socialistes était à l’honneur cette semaine. L’occasion d’ouvrir le placard aux archives. Ce temps retrouvé permet de s’ouvrir vers des écoutes inattendues. Vous ferez bien un voyage dans la soucoupe d’Archeotronics.
À la une
Avec le printemps revient le temps des festivals. Nous en parlons abondamment sur ce site et je n’en remettrais pas une couche si la série d’émissions proposées par CulturesMonde de France Culture n’en valait pas la peine. En quatre tables rondes de 50 minutes, Florian Delorme et ses invités, souvent des chercheurs, ont tenté de comprendre quelles étaient les particularités de ces événements. Comment se différencient-ils des agendas culturels ? Quelles sont leurs origines ? Véhiculent-ils toujours des protestations, des revendications ?
Je vous invite particulièrement à écouter cette émission consacrée aux festivaliers. D’aucuns se reconnaîtront. Pour écouter l’ensemble de la série, rendez-vous sur le site de l’émission.
Hot news
Avec ce “plus long pont de l’année”, que certains grincheux voudraient sabrer, la semaine médiatique a été bien calme. Heureusement, il y avait un anniversaire, celui de l’élection de François Hollande. Les généralistes n’ont pas laissé passer cette chance de se remettre dans le bain si grisant de la présidentielle. Europe 1 a ainsi consacré une journée spéciale, le 6 mai, à la première année d’exercice du pouvoir par le socialiste.
Le Secret des Sources de France Culture a pris l’angle de la communication et du rapport du chef de l’Etat aux journalistes pour analyser cette année de présidence. Le bilan est aussi sévère que sur le plan économique et social. Possible que ça aille de pair, d’ailleurs.
Il y a deux ans, France Culture s’intéresait à une autre présidentielle. Celle conclue le10 mai 1981. La station a permis de revivre l’élection du premier socialiste président de la République grâce à un tout sonore sur cette soirée électorale, précieuse pièce d’histoire. Emmanuel Laurentin partait du postulat que malgré les 32 petites années qui nous séparent du 10 mai 1981, tant l’arrivée des chars russes sur les Champs-Elysée en que l’espoir des ouvriers nous paraissent étrangers.
La série d’émissions est à écouter sur Radio Fanch, qui y consacre un billet.
Et puis tiens, comme on parle d’histoire sur le service public, je partage avec vous ce portrait de Jean Lebrun (accès abonnés), également lisible dans le supplément Télévision du Monde. Où l’on apprend que celui qui s’amusa beaucoup sur France Culture, présente en parallèle de la Marche de l’Histoire, Les Frères Jean, une émission de discussion avec les Français, sur la télévision costarmoricaines (on y retourne toujours) Armor TV.
C’est aussi cette semaine que la radio des Hauts de Rouen, connue sous l’acronyme HDR, s’est retrouvée contrainte de lancer une souscription publique sur Ulule. “HDR doit aujourd’hui régler une dette de 30.000 euros par an, sur 6 ans, dans le cadre d’un redressement, en partie provoqué par le retard de versement de fonds européens en 2008”, explique la station associative.
En quelques jours, près de la moitié des 5.000 € recherchés ont été apportés par des auditeurs, tandis qu’une pétition a déjà recueilli 1.763 signatures (au 11 mai). Deux concerts de soutien auront lieu les 31 mai et 14 juin.
Temps long
Et maintenant, parlons d’un métier en voie de disparation. Cela se passe dans le charmant village de Saint-Ouen. Anita était vendeuse des postes de radio et de pièces détachés pour transistors depuis trente ans. Sa boutique a fermé fin mars. Un reportage de Charlène Nouyoux.
Un bien beau métier.
Pour les amoureux du son qui grésille, voici une pépite.Archeotronics est une émission mensuelle “dédiée à l’archéologie des médias sonores et à leurs manipulations”. Une présentation qui a le mérite d’être très floue, pour vous laisser le plaisir de découvrir un montage sonore… stupéfiant.
Dans le rétro
L’Ina a eu l’excellente idée de créer une chaîne de vidéos d’archives consacrées à la naissance des radios libres. Les radios pirates, telles qu’on les appelait à la fin des années 1970, se sont imposées dans le paysage médiatique par la force.
L’Institut national de l’audiovisuel n’offre malheureusement pas la liberté d’intégrer ces vidéos en dehors de Youtube. Il vous faudra vous résoudre à les regarder de ce côté.
On termine cette semaine sur les ondes par une note d’humour, qui fait aussi réfléchir quant au formatage des radios. Le Transistor consacre un billet aux parodies. Bien qu’Hervé semble nostalgique de l’époque de Nuls, il a trouvé sur la radio Couleur 3 une case qui mérite de tendre l’oreille. Voici l’un des “décrochages” proposés par la chaîne suisse. Je vous laisse chercher quelle émission est ici parodiée. Rendez-vous dans les commentaires. Un indice, elle est diffusée des deux côtés des Alpes. Pour en écouter d’autres, filez sur Le Transistor. On se retrouve dans une semaine pour une chronique spéciale cinéma en direct de Cannes. En attendant, voici un avant-goût. C’est une question à laquelle j’essayerai de répondre qui était posée sur Europe 1 hier : le festival de Cannes a-t-il pris un coup de vieux ?
C’est une bande dessinée engagée que signent le dessinateur Alexis Horellou et sa compagne Delphine Le Lay. Le récit d’une part de l’histoire contemporaine de la Bretagne, racontée du côté des militants antinucléaires. Ces militants, ce sont les habitants de Plogoff, ce village de la Pointe du Raz, qui s’est soulevé, il y a plus de trente ans, contre l’implantation d’une centrale nucléaire sur ses terres.
C’est l’histoire érigée en légende des Plogoffites. De leur prise de conscience des dangers de l’atome, au moment où la Bretagne se lasse de laver ses côtes souillées par le pétrole, au renoncement de l’État sous la nouvelle présidence Miterrand, en 1981. Des années marquées par des combats épiques contre les forces de l’ordre, des rassemblements géants qui marquent les débuts de l’écologie politique, mais aussi des coup de blues et des trahisons. “Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait“, aurait pu écrire d’eux Mark Twain. Delphine Le Lay souhaitait mettre en valeur cet exemple de résistance populaire. Interview.
Sylvain Ernault – Vous êtes originaire de Quimper, mais vous n’aviez qu’un an lors des événements de Plogoff. Qu’est-ce que cette lutte représente pour vous ?
Delphine Le Lay – C’était vraiment une légende pour moi Plogoff, le petit village d’irréductibles qui avait résisté à l’envahisseur et qui était sorti vainqueur ; ça n’allait pas très loin, mais ça faisait rêver. Et puis il y a deux ans, il y a eu évidemment la catastrophe à Fukushima et puis en même temps Plogoff fêtait ses trente ans. Là, j’ai entendu une émission de radio qui retraçait les événements. Ça m’a éclairé et ça m’a enthousiasmé bien plus. J’ai découvert une mobilisation, un acte de désobéissance civile très fort et qui était arrivé à une victoire.
Votre ouvrage s’inscrit dans un corpus déjà assez riche, il y a déjà eu un film, des reportages télé, des livres…
…Mais pas encore de BD. Voilà c’est chouette, on est contents de compléter le tableau. J’ai lu, je le pense, tous les ouvrages qui existent sur le sujet et chacun apporte, je trouve, un éclairage différent sur les événements. Il y a deux reportages (télé, NDLR) et chaque personne qui s’est intéressée au sujet pour un média ou pour un autre apporte quelque chose de différent et j’espère qu’on apporte aussi un éclairage par la BD.
Vous avez été surprise de la violence de l’opposition entre les antinucléaires et les policiers, lors de l’enquête d’utilité publique, au printemps 1980 ?
Oui, c’est même choquant. Le film des Le Garrec (Des Pierres contre des fusils, NDLR) est vraiment étonnant. Je le dis assez souvent, même c’est vrai que si notre génération n’avait eu que les témoignages des gens qui ont vécu les événements, moi je ne les aurai pas cru. Je me serais dit “oui bon, l’émotion prend le dessus. Ils ont cru qu’ils allaient mourir mais c’était pas vrai“. En fait quand on voit les images et le son du film des Le Garrec on se dit “mais c’est dingue“, c’est vraiment des scènes de combat et d’affrontements hyper violents et qui n’ont pas eu lieu qu’à Plogoff. Dans d’autres endroits aussi.
“Trois ans après Creis-Malville,
ils faisaient la même à Plogoff.
C’est dingue, c’est énervant en fait.”
À Creis-Malville il y a eu un mort, et c’était trois ans avant les événements à Plogoff, et quelqu’un était déjà tombé, un manifestant sous les grenades offensives des gardes mobiles. Trois ans après, ils faisaient la même à Plogoff et c’est dingue, c’est énervant en fait. Du coup c’est chouette si cette histoire peut en réveiller d’autres et se transmettre.
Nicole et Félix Le Garrec ont écrit la préface de votre BD. Ils sont donc les auteurs d’un film, réalisé pendant la guérilla rurale qui s’est tenue pendant l’enquête d’utilité publique dans le canton de Plogoff en 1980. Comment ont-ils apprécié votre ouvrage ?
Eux, je crois qu’ils sont contents de passer le flambeau, d’après ce qu’ils mettent dans leur préface. Et puis ils sont contents qu’on s’y soit intéressés. Ils y voient un intérêt que des jeunes générations, qui n’ont pas connu les événements, s’emparent du sujet et le racontent. Et puis à la fois que ce soit une BD parce que c’est aussi un médium qui est approché par d’autres générations, par des gens qui ne se sont peut-être pas intéressés par le sujet et qui par la BD vont y venir.
Après, j’ai des retours de gens qui ont vécu les événements et la plupart disent qu’ils s’y retrouvent bien et ils reconnaissent bien les événements et l’ambiance de l’époque et, du coup, on est contents de ne pas avoir trahi les personnes, que ce soit juste.
Vous rencontrez de nouveaux témoins des événements depuis la sortie du livre ?
J’ai rencontré des gens en dédicace. Alexis est allé à Rennes et ensuite, ensemble, on est allés à Brest et à Quimper. On a rencontré des gens qui ont vécu les événements, même parfois très proches. Il y a un tas d’anecdotes qui sont revenues et que j’ignorais, donc je crois que je n’ai pas fini d’en apprendre sur le sujet. Je crois qu’il y a autant de Plogoff que de gens qui ont vécu les événements. C’est assez marrant.
“Un deuxième tome ?
C’est une idée que je laisse à d’autres.
Mais bon, pourquoi pas ?”
J’ai découvert un tas de documentation supplémentaire. On pourrait presque faire un autre livre, avec tout ce que je recueille en dédicaces pour l’instant (rires).
Un deuxième tome, c’est une idée !
Une idée que je laisse à d’autres. Mais bon, pourquoi pas. Il y a encore beaucoup à dire sur le sujet, j’ai dû quand même faire des choix et je n’ai pas pu tout raconter. Déjà tout ce que je savais, je n’ai pas pu tout raconter, alors tout ce que j’ignorais et que j’apprends maintenant, c’est très riche.
Vous avez des contacts avec des policiers qui se sont opposés aux Plogoffites, parfois violemment, pendant l’enquête d’utilité publique ?
Non, je n’ai pas de contact. Je n’ai pas cherché à en avoir parce que leur point de vue était mis en images dans le documentaire de Brigitte Chevet, qui a fait un reportage vingt ans après les événements, et qui est allée à la rencontre de différents acteurs de tous bords. Donc ça rend son reportage très intéressant.
Bon, j’avais ce point de vue là, je devais choisir une trame, donc je suis restée sur ma lignée de départ. Par contre, des gens qui ont vécu les événements m’ont dit que de leur point de vue – c’est un témoignage qui revenait souvent – certains gardes mobiles n’étaient pas bien d’être là.
C’était compliqué pour eux à vivre, ils étaient là parce que c’était leur métier et qu’ils devaient le faire, mais ils étaient mal à l’aise et pas très heureux d’être là. Ça, je l’ai mis dans l’histoire parce que ça me semblait important. Ça revenait beaucoup. C’était pas eux les méchants, en tout cas pas tous (rires), malgré les apparences.
Plogoff reste une lutte emblématique pour les écologistes et altermondialistes bretons. Comment vous l’expliquez ?
Même au niveau national ça reste le combat populaire contre le nucléaire qui a été finalement victorieux. Il n’y a pas eu de centrales à Plogoff. Après, c’est à mettre un peu en demi-mesure parce qu’il y a eu un certain nombre d’éléments qui se sont bien accordés et puis une conjoncture qui a fait qu’en fin de lutte, la victoire est arrivée.
La mobilisation n’a pas été aussi simple que ça. C’est pas comme je le pensais enfant, une bande d’habitants de Plogoff qui ont jeté quelques cailloux à la tête des CRS et les CRS qui ont dit “d’accord on s’en va“. Ça a été, évidemment, bien plus complexe que ça, bien plus long et il y a eu beaucoup d’acteurs qui ont tissé la mobilisation, mois après mois, années après années et puis le contexte politique de la fin avec l’élection de Mitterrand qui a fait que l’opportunité était là, après cette résistance, de finalement mettre un terme au projet.
“C’est plein d’espoirs et, en même temps,
on se rend compte que c’est compliqué,
le pouvoir est quand même très fort.”
Donc ça reste une lutte emblématique au niveau de la Bretagne, mais aussi hors de la Bretagne ; et au niveau du nucléaire et au niveau de toutes les oppositions qu’on peut avoir envie de faire vivre. Celle-ci a abouti par plein d’événements intéressants. C’est pas si simple de réussir une mobilisation comme ils ont réussi la leur. Il a fallu pas mal d’ingrédients qui se connectent les uns avec les autres et au bon moment pour arriver à ça. C’est plein d’espoirs et, en même temps, on se rend compte que c’est compliqué, le pouvoir est quand même très fort.
Mitterrand avait promis que Plogoff ne se ferait pas, mais vous rappelez que depuis 1982, 39 réacteurs ont été mis en service en France.
Malgré des oppositions aussi, des gens se sont opposés partout où des centrale devaient être construites et dans les territoires frontaliers des centrales. Le Luxembourg, l’Allemagne, l’Italie, la Suisse ont soutenu la France dans ces oppositions. Pour le coup, ça ne s’est pas passé comme à Plogoff…
Malgré la promesse de Mitterrand, d’autres projets de centrales ont été sérieusement étudiés en Bretagne. Finalement, c’est la catastrophe de Tchernobyl qui a réglé la question. Dans ce flou, comment avez-vous décidé de poser le crayon ?
Le sifflet de l’arbitre, c’était clairement Mitterrand, malgré le fait qu’il y a eu des rebondissements après ça, la fin n’a pas été aussi simple que ça effectivement. Pour installer quelque chose en Bretagne, depuis c’est compliqué. Je pense qu’on montre les dents assez facilement sur ce territoire là, surtout qu’il y a quand même du nucléaire en Bretagne, militaire ou civil.
Dans l’écriture de la BD, ça s’arrête à 81. En 81, Mitterrand dans ses propositions il y a une proposition qui a trait aux énergies. Ça coupe là et après on arrive à 2012, puisque c’est en 2012 qu’on a terminé notre album. On fait le bilan de la situation énergétique en France, avec 39 réacteurs nucléaires depuis et puis un référendum qu’on attend toujours, des crédits alloués aux énergies renouvelables, des choses comme ça. C’est un bilan finalement assez gris par rapport aux promesses.
Aujourd’hui, Notre-Dame-des-Landes représente une nouvelle lutte des écologistes en Bretagne. Vous avez pensé en faire une BD ?
Non, peut-être dans trente ans, on verra, pour l’instant déjà je ne connais pas très bien le sujet, je sais qu’il y a des parallèles de faits, mais qui ne sont pas évidents non plus. Et puis, il y a un collectif qui a sorti une BD sur Notre-Dame-des-Landes aussi.
Il n’est jamais question de Radio Plogoff dans votre BD. Pourquoi ?
Oui c’est vrai. Non, malheureusement. J’ai quelques regrets de gens que j’ai vite fait mentionné, mais qui avaient une part plus importante que celle que je leur ai laissée dans le bouquin et la radio en fait partie. J’ai eu assez peu d’infos a priori sur ce sujet et du coup je n’en ai pas cherché davantage. J’avais beaucoup beaucoup de choses et c’est passé à côté. Comme Jean Kergrist, le “clown atomique”, ça fait partie des personnages forts de l’histoire que j’ai à peine montré. J’espère qu’ils ne m’en voudront pas trop !
Sur Radio Plogoff, j’ai trouvé très peu d’infos dans les livres. Et puis les gens qui m’ont parlé de Plogoff ne m’ont pas trop parlé de la radio, sauf à dire qu’il y avait une radio. Je ne sais pas qui l’animaient, je ne sais pas combien de temps par jour, par semaine, je n’en sais rien du tout.
Votre prochain projet de BD, il a un rapport avec l’actualité, les luttes…
On a tout le temps plein de projets avec Alexis, mais celui qui, a priori, se fera le plus facilement c’est aussi une forme de mobilisation et c’est aussi en Bretagne. Mais bon, pour l’instant je ne sais pas exactement sous quelle forme ni rien, donc je n’en parle pas tout de suite. Le premier livre qu’on avait fait (Lyz et ses cadavres exquis, NDLR) va être réédité par un autre éditeur et assorti de la suite et fin de l’histoire, donc en 2014 normalement le bouquin sortira, avec 100 pages supplémentaires.
Le couple sera en dédicace, à Lannion, le 25 mai, de 15 h à 18 h, à la librairie Gwalarn.
Plogoff, Delphine Le Lay et Alexis Horellou, Delcourt, mars 2013, 14,95 €.
Sélection éclectique pour cette nouvelle semaine faite de nouveautés musicales. Un sortilège, du champagne, un zombie, des grues cendrées, de la danse, un violon, un accent anglais plus que charmant sont cachés dans les vidéos suivantes, saurez-vous les retrouver ? Bonnes découvertes !
Bibio – À tout à l’heure
Du folk, des percussions tropicales et quelques touches électroniques… Quel plaisir d’entendre ce nouveau titre de Bibio ! Le morceau vaut la peine d’être écouté, juste pour avoir le plaisir d’entendre ce charmant accent anglais chanter “À tout à l’heure ! À tout à l’heure !” à chaque refrain. Son nouveau CD, baptisé Silver Wilkinson, sort le 14 mai prochain.
Retro Stefson – Qween
Cap vers l’Islande avec Retro Stefson ! Au milieu de paysages somptueux, Uni, le chanteur et leader du jeune groupe scandinave chasse, tranquille, sur son quad. Sauf que rien ne va se passer comme prévu et il va être victime d’un étrange sortilège… Voilà en quelques mots l’intrigue du clip Qween. Un tube très dansant qui s’inscrit dans la lignée des autres productions du groupe.
Sarah Neufeld – Hero Brother
Voilà, Sarah Neufeld, la jolie violoniste d’Arcade Fire a révélé quelques facettes de son projet solo. L’arrivée du bébé est programmé pour le 20 août prochain, mais la musicienne ne compte pas chômer d’ici là avec une tournée mondiale débutée la semaine dernière. Seule date française, le 27 mai au point Éphémère à Paris. Voici le morceau Hero Brother pour patienter gentiment.
Local Natives – Bowery
Local Natives propose une nouvelle vidéo pour accompagner son titre Bowery, en collaboration avec City of Music. Le groupe d’indie rock américain joue sur scène accompagné de sept danseuses. Un clip élégant, tout en grâce et en finesse. Le titre provient d’Hummingbird, sorti en janvier 2013. Leurs prochaines scènes françaises sont programmées pour novembre. Répétez les pas de danse en attendant.
Queens of the Stone Age – I Appear Missing
Voilà six ans que la bande de Josh Homme n’avait pas produit de nouvel album, se contentant d’effectuer des dates ici et là avec son répertoire bien rodé. Le 4 juin sera finalement la date du grand retour de Queens of the Stone Age avec… Like Clockwork. Dans la vidéo réalisée pour I Appear Missing, vous ferez la connaissance avec un charmant zombie tout en bandelettes et tâches de sang.
Vampire Weekend – Ya Hey
Nous aussi on va sabrer le champagne à la rédaction tellement on attendait le retour des gars de Vampire Weekend. Le groupe américain dévoile à nouveau un titre de son troisième album Modern Vampires Of The City qui sortira dans les bacs (lui aussi !), le 14 mai prochain. Allez, chantez tous avec Ezra Koenig ! Vous verrez, c’est plus simple à suivre que Cousins ou A-Punk…
Grimes – Venus in Fleurs
La chanteuse canadienne Claire Boucher, plus connue sous son nom de scène Grimes a fait un petit ménage de printemps ce week-end, c’est sûr ! Et devinez ce qu’elle a trouvé dans un carton ? Une vidéo pour une de ses chansons, Venus in Fleurs, datée de 2011. C’est sympa de partager Claire, merci ! Avec ce clip, les grues cendrées n’ont maintenant plus aucun secret pour nous.
C’est une journée spéciale le 6 mai. Une journée de frictions, de choix, de contrastes, d’émotions. Nous avons élu nos deux derniers présidents de la République, au suffrage universel, un 6 mai.
Ce fut un point de bascule. En 2007 et 2012, chaque fois, une longue campagne prenait fin. Une nouvelle séquence politique s’ouvrait. Ce jour rythme nos vies de citoyens.
C’est ce jour symbolique que nous avons choisi pour lancer notre média.
Parce que c’est un jour d’expression. Dans les urnes, dans les salons, dans les cafés, parfois jusque dans la rue, la parole se libère les jours d’élection.
Donner notre point de vue, apporter notre regard sur les événements, aiguiser notre sens critique, c’est justement ce que nous permettra ce site.
Nous sommes des amis jeunes journalistes, rencontrés à l’IUT de Lannion et aujourd’hui dispersés un peu partout en France pour pratiquer notre passion. Nous souhaitons partager nos coups de cœur et nos coups de gueule. Présenter nos découvertes. Tester des outils, interroger notre métier. Garder espoir dans un pays tourmenté et en pleine crise de la presse.
Parce que le web nous permet de dialoguer avec nos lecteurs, parce que nous n’écrivons pas pour nous, le débat fait partie de l’ADN de “La Déviation”.
Si le 6 mai est éminemment une journée politique, c’est aussi une journée médiatique. Une journée excitante pour les journalistes. Aujourd’hui, même sans élection, notre 6 mai est une journée spéciale.
Inséré dans l’autoradio, un disque égraine ses pistes au fur et à mesure du voyage. Un mélange parfait entre rap, électro, rock et d’autres styles. « Tu connais ? Ça vient de sortir… » Réponse négative. Ni une, ni deux je saute vers la boîte à gants pour en sortir une mince pochette cartonnée sur laquelle se dressent, derrière de la verdure, des barres d’immeubles. Ce CD de onze pistes intitulé Other People’s Problems est donc réalisé par Breton. Mais qui sont-ils donc ?
Non, le groupe Breton n’a aucun rapport avec le pays des galettes et du cidre, n’en déplaise aux bretons pur beurre. Si les cinq membres du collectif ont choisi ce patronyme, c’est avant tout parce qu’ils sont passionnés d’art et de surréalisme. Et si vous remuez un peu vos méninges, qui est le père de ce mouvement et a écrit les différents Manifestes du surréalisme ? Le français André Breton. CQFD.
Ces “Bretons” non français sont en réalité originaires de la banlieue nord de Londres et sont menés par Roman Kappak, homme aux multiples talents, qui accumule les rôles d’auteur, de compositeur, de multi instrumentiste, de chanteur et de réalisateur.
Other People’s Problems est sorti le 26 mars sous le label FatCap. Le disque a été enregistré entre Londres et l’Islande, dans les studios des nordiques Sigur Ros. Auparavant, nos jeunes anglais avaient déjà sorti plusieurs maxis, dont Blanket Rule EP (janvier), salué par les tout jeunes fans et les critiques.
Pour ces derniers, le premier disque de Breton est déjà « la révélation du printemps ». Ils n’ont en même temps pas tort, car l’éclectisme du disque offre un métissage musical, où l’on glisse de piste en piste avec délice.
Hypnotiques ou bien dansants, tous les morceaux sont efficaces et font penser à certains instants à des soupçons de Bloc Party, Foals ou The Streets. Coup de cœur cependant pour les titres Pacemaker (rap, rock et électro sont sublimés par des cordes), Jostle (très dynamique) et le terrible Wood and Plastic.
Faites vous une idée du potentiel créatif (musiques et images) de Breton en écoutant Interference, Edward The Confessor (ci-dessus) et The Commission. Alors, séduits ?
Dans la famille talentueux mais discret, je demande Kelly Pratt. En février dernier, cet américain sortait son premier album Natives accompagné de son tout jeune groupe Bright Moments. Il n’en est pourtant pas à ces premières gammes.
Multi-instrumentiste, Kelly Pratt peut vous jouer de la trompette, de la flûte, du bugle, du tuba ou encore du cor d’harmonie, histoire de mettre de l’ambiance durant une soirée entre potes, ou plus, c’est à voir. Ainsi en 2007 et 2008, il a collaboré avec Arcade Fire lors de leur tournée mondiale pour promouvoir Neon Bible, le second opus des Canadiens.
Depuis 2006, il fait également régulièrement équipe avec Zach Condon, le leader du groupe folk américain Beirut. À la première écoute de Natives, on ne peut d’ailleurs s’empêcher de faire un rapprochement en terme de son avec ces derniers : des sonorités d’Europe de l’est sont présentes sur certaines pistes.
Cependant, Bright Moments ne peut être réduit à une simple copie de Beirut. Là où Zach teinte ses chansons de mélancolie et de paroles graves, Kelly et son groupe de Brooklyn mettent le cap vers l’optimisme et des lendemains heureux. En voiture, en vélo, en bateau à moteur ou à voile ou en avion, le voyage est au bout de ces dix pistes au noms évocateurs (Travelling Light, Tourists, The Sailor, Travelers…).
Une invitation au voyage
L’album s’ouvre sur les applaudissements de Tourists, un son entraînant, morceau idéal pour sillonner les routes de campagne, tout comme Travelling lights, un peu plus tard sur l’album. Milwaukee Protocol et Travelers, véritables hymnes à l’été, nous transportent en terres slaves entre fanfares et cuivres. Avec ses tonalités électro, le titre Behind the Gun, très accrocheur, est l’ovni réussi du disque.
Mention pour les deux interludes, Ghost Dance I et II, doux, poétiques et rêveurs. Drifters, la piste numéro cinq au tempo plus lent est d’une élégance rare. Lightning se veut régressif avec l’utilisation d’instruments jouets avant d’atteindre The Sailor, titre profond à l’image de l’ensemble de l’album : éclectique.
Paru sous le label Luaka Bop durant l’hiver dernier, il n’est pas trop tard pour faire l’acquisition de Natives. Le beau temps tarde, alors autant le faire venir dans nos têtes par ce mélange de pop, de folk et d’influences balkaniques. Une envie de liberté, de grands espaces à l’approche de l’été ? Bonne pioche !
Programme chargé pour l’inauguration de cette chronique. Alors que les festivals estivaux révèlent un à un leur programmation, je vous invite à découvrir sept projets musicaux qui ont éclôt sur la toile cette semaine. Des grands bols d’air, des morts, des bars et la rencontre avec une certaine Fanny sont au programme. À votre mobylette, prêts ? Partez !
Aline – Je bois et puis je danse
Après une version bricolée avec de vieux extraits vidéo, les Marseillais d’Aline livrent un tout nouveau clip pour leur single Je bois et puis je danse. Bye, bye le combat de boxe, on alterne ici entre dessin animé, ombres et film pour ce morceau très dansant. Pour info, ils seront à L’Alhambra le 28 mai prochain. Bon, vous reprendrez bien un verre en les attendant ?
Fauve – Blizzard
Fauve, c’est un peu le phénomène du moment et leur premier Ep sortira le 20 mai prochain. Ces jeunes Parisiens n’ont pas encore signé dans une maison de disque, mais rien ne semble pouvoir les arrêter et l’été promet d’être fort rempli pour la formation avec de nombreux festivals au programme. Avec Blizzard, à vous l’aventure, la découverte de la France en compagnie de textes torturés et incisifs.
Vitalic – Fade Away
“C’est l’histoire d’un mec, qui tue un autre mec, qui lui même se fait tuer par un autre mec qui…” Bref, une nouvelle histoire sans fin. Après la récente sortie de son album Rave Age, Vitalic révèle le clip de Fade Away. Des meurtres en cascade pour récupérer une mallette au contenu mystérieux, admirez plutôt ses images signées du réalisateur Romain Chassaing.
Sigur Rós – Isjaki
Isjaki en islandais signifie iceberg. Et les icebergs on peut dire que les islandais de Sigur Rós ont eu le temps de les côtoyer sur leur île natale. Pas encore de clip pour cette piste mais le ton de l’album Kveikur, qui sera dans les bacs le 18 juin prochain, se précise tout doucement. Petite indiscrétion, le groupe aurait composé une chanson pour un prochain épisode des Simpsons.
Empire of the Sun – Alive
De la glace, il en sera également question avec le nouvel album d’Empire of the Sun intitulé Ice on the Dune. Alive signe le grand retour des plumes et des fourrures si prisées du groupe australien. Tout aussi dépaysant que le fameux Walking on a Dream, le clip d’Alive nous propulse dans un univers imaginaire où les montagnes sont reines. Très certainement un titre matraqué sur les ondes cet été.
Mermonte – Fanny Giroud
“Dis, tu connais Fanny Giroud ?” En tous cas, Mermonte lui signe une très belle chanson à son nom cette semaine. Les Rennais signent là un très joli titre, léger et poétique. Leur pop orchestrale ne cesse de faire des adeptes, surtout depuis la victoire au tremplin des Jeunes Charrues en 2012. Prenez rendez-vous avec Fanny, le single sort le 20 mai.
Miles Kane – Don’t Forget Who You Are
Liverpool regorge de pépites, ça ne fait aucun doute. Parmi elles, Miles Kane ancien leader des excellents The Rascals. Don’t Forget Who You Are sent la pop à plein nez et est mis en images par un clip “so british” tout en noir et blanc. Il ne manque plus que quatre garçons dans le vent et le tableau serait complet. Le gamin sera à l’affiche des Papillons de Nuit 2013.
Une plage, du bon son et (parfois) du beau temps, en pleine Franche-Comté ? Aux Eurockéennes de Belfort bien sûr. Pour ses 25 bougies, le festival s’étend sur quatre jours, du 4 au 7 juillet. 100.000 festivaliers sont attendus pour réitérer le record de l’an dernier. Les grands noms des nineteens seront accompagnés par une solide scène française, même si les Eurocks jouent face à plus forts qu’eux, comme nous l’explique sans langue de bois son programmateur Kem Tatot.
Comment as-tu réussi à monter la programmation des 25 ans des Eurockéennes ?
Pour monter une affiche de festival, ça prend une année, voire un peu plus, notamment pour les têtes d’affiches, où là on commence les tractations avant d’avoir fini la programmation de l’édition en cours. Donc oui, c’est quasiment le travail d’une année complète.
On a aussi un travail de recherche que l’on fait pour les programmations. Des artistes qu’on préfère attendre de programmer l’année suivante parce qu’on pense qu’ils sont trop jeunes, on attend de les voir évoluer, ou simplement parce qu’on a d’autres priorités à ce moment-là.
Avez-vous souffert de la concurrence des festivals en face de vous ?
La concurrence vient principalement de deux gros festivals : le Rock Werchter (Belgique) et le Roskilde Festival (Danemark) ce week-end-là, qui sont deux énormes poids lourds européens. Ce sont eux qui choisissent les dates des artistes et aussi ceux qui les intéressent. Après, tous les autres festivals comme le Beauregard, les Eurockéennes ou le Hove en Norvège prennent un peu ce qu’il reste.
La notoriété des Eurockéennes est établie désormais depuis 25 ans, on existe dans la tête des agents, des groupes, qui du coup viennent facilement chez nous. Ça vient plutôt d’histoire de routing ou de gros sous lorsque certains groupes ne viennent pas. L’affiche peut aussi faire la différence et décider certains groupes à venir au final en voyant les groupes programmés à leurs côtés. Blur, on a le fait qu’ils soient déjà venus, donc ils nous connaissent. Mais l’affiche leur plaisait également.
L’ajout d’un quatrième jour c’est juste pour cette année ou ça va être durable ?
Pour le moment, ce serait juste pour les 25 ans. Un cadeau qu’on fait aux festivaliers avec un forfait au prix abordable (129 € le pass quatre jours, NDLR). A priori on est parti juste pour cette année, mais si ça se passe bien pourquoi ne pas adopter la formule par la suite.
Pourquoi le choix du Mexicain sur l’affiche ?
C’était pour clôturer un triptyque qu’on avait commencé avec des personnages rebelles ou révolutionnaires sur l’affiche. On a eu Mohamed Ali l’an passé, c’était d’ailleurs une photo assez particulière, prise pendant un combat au Nigeria. Et là pour finir le triptyque on a choisi Zapata. De plus, la photo nous plaisait bien parce qu’on a l’impression qu’il est habillé de manière très actuelle.
Tu pourrais nous présenter la programmation dans ces grandes lignes ?
C’est très difficile ! J’ai du mal à en parler comme ça juste en sortant des groupes. L’idée c’était vraiment d’avoir une affiche éclectique ce qui est de mise sur chacune de nos éditions. Cette année, pour les 25 ans, on a une tendance à programmer des groupes qui ont marqué les années 1980–1990 comme Blur, Jamiroquai ou les Smashing Pumpkins.
On essaye toujours d’un autre côté d’être moderne dans les choix des groupes et peu importe leur style. On a tout de même une tendance en ce moment à revenir dans le old school, comme un groupe qu’on a programmé The Strypes, un groupe anglais qui sonne très seventies malgré leurs seize ans de moyenne d’âge. À les écouter on se croit avec les Yardbirds ou les Stones d’il y a quarante ans. C’est incroyable de voir les jeunes repartir comme ça.
Un coup de cœur dans la programmation ?
Impossible d’en dire un seul… Je peux en citer un par jour si tu veux. Le jeudi ce serait Gary Clark Jr, un bluesman d’Austin qu’on a découvert au South by Southwest et qu’on a pas pu faire venir l’an dernier parce que c’était un peu compliqué. Du coup on est vraiment ravis de l’accueillir cette année, certains le voient comme le nouveau Hendrix, ce qui est selon moi un peu exagéré mais sur scène c’est incroyable et il envoie du gros son !
Le vendredi ce serait plutôt Trash Talk, un groupe de hardcore de San Francisco, qui a la particularité d’être signé sur un label hip-hop avec Odd Future, qui sont des amis à eux. Selon moi, c’est inratable pour les fans du genre, parce que ça va être une des grosses sensations de l’année.
Le samedi on a Valérie June une américaine qui fait un mélange de country et de soul dans la veine du groupe Alabama Shakes, qu’on avait programmé l’an passé à Belfort.
Enfin, le dimanche on aura le groupe Neurosis qui me tient beaucoup à cœur parce que ça fait depuis 2001 et mon arrivée aux Eurockéennes que j’essaye de les programmer. Ce groupe a vraiment révolutionné la scène metal dans les années 1990, ils ont débarqués avec un son nouveau avec des riffs très lourds et lancinants. On ne sort jamais indemne leur concert. Ils clôtureront la scène de la Plage le dimanche et j’en suis ravi.
Des projets spéciaux de prévus pour les 25 ans ?
Non, ce sera plutôt le quatrième jour où on aura certainement des guest qui viendront pour jouer avec des artistes mais là on travaille dessus actuellement. On a aussi un projet assez fun qui s’appelle le Club des Justiciers Milliardaires d’Abidjan, c’est une réunion d’artistes de la scène ivoirienne. Ils ont pris des noms assez fous pour réaliser ce projet comme DJ Serpent Noir Sarkozy par exemple. Ils ont bien délirés pour faire ça, ce sera vraiment fun. Mais autrement on a pas de projet spécial 25 ans à part entière.
La Plage à Pedro c’est un projet qui s’est monté suite à la tempête de l’an dernier ?
Oui, tout à fait. On avait monté ce projet l’an passé avec Pedro Winter. Il y avait un line up bien précis avec des groupes électro mais pas que… On est plutôt sur une soirée avec les coups de cœurs de Pedro Winter. On a vu toute la programmation avec lui et ça aura lieu de 18h30 à 3 heures du matin avec Dinosaur Jr, un groupe de grunge, mais aussi de l’électro comme Kavinsky et Cassius.
On fait aussi ainsi un gros clin d’œil aux dix ans du label Ed Banger de Pedro. C’est quelqu’un qu’on apprécie beaucoup, un musicien français qui est un passeur de sons hors pair avec une grosse culture musicale.
Comment est venue l’idée du retour des anciens gagnants du tremplin ?
En ce moment on bosse sur une nouvelle formule de notre opération tremplin appelée Repérages. On a dû le mettre en stand-by cette année pour préparer ce projet qui est ambitieux. On a eu besoin de bien voir les choses avant de le lancer en septembre 2013.
Après on s’est dit que c’était dommage de n’avoir aucun groupe régional sur les 25 ans avec l’absence de tremplin. Du coup on a eu l’idée de regarder dans le rétroviseur des tremplins depuis dix ans et de prendre quatre groupes (Electric Electric, Chapelier Fou, Oy et Yules) qui sont passés chez nous avant. Voir ce qu’ils ont pu faire comme bonhomme de chemin, soit en trouvant un tourneur, en signant un album ou en jouant à l’étranger.
Justement en parlant d’Electric Electric vous avez déjà essayé de programmer leur projet en quadriphonie « La Colonie de vacances » avec aussi Pneu, Marvin et Papier Tigre ?
C’est trop compliqué pour nous de faire ça aux Eurockéennes, ça demande une installation complexe. On aurait pu le faire à un moment donné, mais ça aurait voulu dire leur laisser une scène pendant trop de temps de préparation pour monter la Quadriphonie pour leur montage… et on ne peut malheureusement pas se le permettre.
Les Eurockéennes font partie de l’association « De Concerts ». Est-ce qu’il y a une sélection de groupes faites au sein de l’association ?
Chaque année tous les festivals se réunissent et on propose tous deux groupes qui nous paraissent essentiels mais ce n’est pas forcément des groupes français. On va plutôt au coup de cœur. Après on met ça sur une base de données et chaque festival peut aller puiser s’il le souhaite des infos sur ces groupes… et ensuite on sélectionne entre un, deux… voir sept ou huit projets pour certains ! C”est une bonne manière de faire circuler des infos et découvrir des groupes.
Quels sont les groupes proposés par les Eurockéennes cette année ?
On a proposé Art District (présent aux Répérages l’an dernier) et JC Satan.
Un scoop pour Rockfanch ?
Je pense que ce sera lors du concert de la Plage à Pedro qu’on aura le plus de surprise, mais pour le moment rien n’est défini, c’est surtout dans sa tête en fait !
Depuis le 24 avril, L’écume des jours est enfin sur grand écran. Dans cette adaptation du chef-d’œuvre de Boris Vian, l’imaginatif Michel Gondry peine à toucher le spectateur, faute à la trop grande présence d’effets visuels dont il est friand, frôlant l’abus.
Lecture obligatoire lors des études pour certains, découverte sur le tard pour d’autres, il est certain que L’écume des jours, œuvre la plus connue de Boris Vian, est la voie royale pour plonger dans l’univers bien particulier de l’auteur.
Cette bulle de poésie courant sur 68 chapitres, Michel Gondry n’y est pas resté insensible. Le réalisateur évoque même avoir eu un déclic lors de sa première lecture et en être ressorti avec une imagination et une créativité renforcée. Si tout ça a pu l’aider à concevoir l’inclassable et sublime Eternal Sunshine of the Spotless Mind, je n’ai qu’une chose à dire : ” Merci Boris ! “.
La trame de l’histoire est fort simple et Boris Vian, avec un sens du résumé exemplaire, la décrivait comme ceci : “Colin aime Chloé, Chloé tombe malade, elle meurt. Colin ne pourra pas vivre longtemps.“
L’intrigue du roman se situe dans un univers réaliste, mais parsemé de touches fantastiques. Ici, les nénuphars sont des maladies, les murs rétrécissent quand la fin est proche et les expressions de la langue française comme “prendre dix ans en une semaine” sont plus vraies que nature. Un défi visuel et sonore qui n’a pas freiné l’imaginatif Gondry.
Trop de génie, tue le génie
L’écume des jours est donc une grande histoire d’amour débordante de jazz, de tendresse et de démesure. Mais malheureusement, la démesure, le réalisateur en abuse pendant une heure et demie. La cascade d’inventions, la myriade de trucages et le puits de créativité sans fond finissent par nous donner une sérieuse indigestion visuelle.
Pourtant pris une à une, ces techniques “gondryennes” frôlent le génie dans certaines scènes.
Le “pianocktail”, cet instrument farfelu que tout bon amateur de boissons rêverait d’avoir, n’aurait pu être mieux transposé à l’écran. De même pour les mets que dégustent Colin et ses amis, ils sont tous réalisés en matériaux textiles, confectionnés par la brillante Bénédicte Charpiat. Et que dire de ce Duke Ellington à la trompette lors des premières minutes du film ou de ces prototypes de véhicules créés par Peugeot tout spécialement pour le film?
Ce trop plein de bonheurs visuels éphémères débouche sur une absence cruelle d’émotions, elles y sont étouffées. De même pour le jeu des acteurs. Romain Duris (Colin), Audrey Tautou (Chloé), Omar Sy (Nicolas), Gad Elmaleh (Chick), les acteurs les plus bankables du moment nous ont habitué à mieux. Au final, le spectateur risque de n’éprouver que très peu d’intérêt pour les personnages.
“Ce qui m’intéresse ce n’est pas le bonheur des hommes, c’est le bonheur de chacun“, évoque Colin dans ces deux œuvres. Alors Michel, si tu me permets, je quitte la salle obscure pour revenir au bon vieux livre papier, c’est mon bonheur à moi. Sans rancune.
L’écume des jours, Michel Gondry, avec Romain Duris, Audrey Tautou, Omar Sy, Gad Elmaleh, Charlotte Le Bon, Aïssa Maïga. Distribution StudioCanal. En salles depuis le 24 avril.
On connaissait de Nîmes son festival au cœur d’arènes. Voici qu’il faut maintenant compter avec un nouvel rendez-vous très alléchant. This is not a Love Song, festival indé, investira la nouvelle salle Paloma du 22 au 25 mai. Son directeur Fred Jumel nous dessine l’affiche.
D’où est venue l’idée de créer ce festival ?
L’idée est née de la rencontre entre les membres de Paloma et l’association Come On People, nous étions fans des mêmes groupes et nous sommes très vite projetés sur ce que nous pourrions monter ensemble avec l’arrivée d’une nouvelle salle sur Nîmes.
Au niveau de la programmation, nous sommes séduits depuis de nombreuses années par des festivals comme le Primavera à Barcelone, La Route du Rock à Saint-Malo et aussi plus récemment par des événement comme le Pitchfork à Paris.
Nous étions cependant convaincus qu’un festival « à taille humaine » restait le meilleur moyen d’apprécier des groupes exceptionnels : pas trop loin de la scène, avec une bonne qualité acoustique, dans un environnement ludique, entre amis avec une ambiance « bon enfant ». Un festival qui ne se prend pas au sérieux, qui ne se revendique pas comme LE nouveau défricheur de « talents », mais capable de présenter autant nos nouveaux coups de cœur, curieux et insolites, que les références attendues mais néanmoins exceptionnelles de la musique Indie.
Pourquoi ce nom de This is not a Love Song ? Un hommage au groupe Public Image Limited (PiL) ?
C’est une blague, nous ne savions pas quoi mettre, nous avons établi des listes de noms tout aussi décalés les uns que les autres. Nous cherchions des titres d’albums qui nous avaient marqué, des morceaux qui font référence sans être convaincu de ce que nous listions. Puis This Is Not A Love Song est sorti, comme ça tout seul, en référence à PiL évidemment, mais aussi pour le sens que cela évoque. On a trouvé ça drôle et l’avons gardé.
Peux-tu nous présenter la programmation de ces quatre jours de festival ?
Quatre jours présentés comme une année test mais déjà ambitieuse, une programmation de rêve, originale et explosive avec du lourd et du très lourd, des groupes indé de la scène électro, hip hop, pop, rock et folk. Une touche de fraîcheur dans les festivals qui mise sur la nouvelle scène indé, avec des groupes émergents ou confirmés.
Pas facile, nous sommes un collectif et chacun aura ses propres coups de cœur, ils seront tous différents, mais pour ma part ce sera Hanni El Khatib, TNGHT, Death Grips, Nick Waterhouse, The Intelligence…
Pour la construction de la programmation avoir la Villette Sonique et le Primavera le même weekend ça été un avantage ou un inconvénient ?
Nous n’avons pas choisi cette période par hasard, beaucoup de groupes sont présent en Europe fin mai et permettaient de proposer un choix affiné de ce que nous avions envie de porter. Ce n’est donc pas un inconvénient, charge à nous d’articuler la programmation artistique, la manière de la poser, de la présenter différemment, pour avoir notre propre identité et de ne pas ressembler aux autres propositions.
Des souhaits de programmation pour les années qui viennent ?
My bloody Valentine, The Cure, et … non je blague ;-)
Un scoop pour Rockfanch ?
Nous sommes en train de travailler sur un contest skate qui pourrait se dérouler sur le parvis devant Paloma en journée, ça va rouler !